Est-il possible de rompre le contrat de travail d'un salarié en raison de son mi-temps thérapeutique ?
La condition du salarié en mi-temps thérapeutique
La mise en place du temps partiel pour motif thérapeutique (parfois dénommé "mi-temps thérapeutique" dans le langage courant) peut s'avérer nécessaire pour un salarié lorsque (1) :
- le maintien au travail ou la reprise du travail et le travail effectué sont reconnus comme étant de nature à favoriser l'amélioration de son état de santé ;
- il doit faire l'objet d'une rééducation ou d'une réadaptation professionnelle pour recouvrer un emploi compatible avec son état de santé.
Autrement dit, il s'agit d'un aménagement du temps de travail du salarié, afin de lui permettre de concilier son activité professionnelle avec la guérison de sa pathologie, que celle-ci soit physique ou mentale.
Ce temps partiel thérapeutique n'est pas nécessairement un mi-temps : il peut être effectivement de 50 %, mais aussi de 60 %, 80 %, etc. de la durée légale de travail. De plus, si la durée minimum du temps partiel est normalement de 24 heures par semaine, des dérogations sont adminises. Ainsi, le salarié peut, lorsque des contraintes l'exigent, travailler moins de 24 heures.
Pendant cette période, le contrat de travail du salarié n'est pas suspendu : son exécution se poursuit comme pour tout autre salarié à temps complet.
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La protection du salarié en mi-temps thérapeutique contre la rupture de son contrat de travail
Excluons l'hypothèse dès à présent : un salarié ne peut pas être licencié en raison de son état de santé (2).
Tout licenciement fondé sur le fait qu'un salarié est en mi-temps thérapeutique, serait analysée comme une discrimination.
En revanche, aucune autre protection particulière ne profite au salarié en temps partiel thérapeutique.
En d'autres termes, le licenciement d'un salarié en mi-temps thérapeutique est possible, à condition qu'il soit fondé sur un motif autre que l'état de santé du salarié : soyez vigilant quant au motif de licenciement invoqué.
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L'employeur peut-il proposer une rupture conventionnelle à un salarié en temps-partiel thérapeutique ?
Rien n'interdit à l'employeur, ou au salarié, de proposer une rupture conventionnelle. Effectivement, les parties sont libres de décider de mettre fin au contrat de travail d'un commun accord, et ce, même si le salarié a été placé en temps partiel pour motif thérapeutique.
L'employeur et le salarié devront alors suivre la procédure et les règles classiques de ce mode de rupture du contrat de travail (entretien, délais, indemnités, homologation, etc.).
Attention ! La rupture conventionnelle ne peut être imposée par l'une ou l'autre des parties.
Dans le cas où le salarié ne souhaite plus travailler pour l'entreprise, mais que la rupture conventionnelle n'est pas envisageable, il est également libre de poser sa démission du CDI, sans avoir à justifier sa décision.
Le temps partiel pour motif thérapeutique est donc compatible avec la rupture du contrat de travail.
Enfin, si le salarié considère que cette rupture lui est imposée en raison de son état de santé, il peut envisager un recours devant le conseil de prud'hommes pour faire valoir ses droits.
Dans quels cas l'employeur peut-il licencier un salarié en mi-temps thérapeutique ?
Les cas possibles de licenciements d'un salarié en mi-temps thérapeutique
📋 Il est possible d'envisager le licenciement d'un salarié en temps partiel thérapeutique, mais uniquement pour l'un des motifs suivants :
-
licenciement pour motif disciplinaire : la faute commise par le salarié, même s'il est en mi-temps thérapeutique, peut justifier un licenciement pour faute ;
-
licenciement pour motif économique : la suppression, la transformation d'emploi ou la modification d'un élément essentiel du contrat de travail, refusée par le salarié, consécutives notamment à des difficultés économiques, à des mutations technologiques, à une réorganisation de l'entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité ou à la cessation d'activité de l'entreprise, peut justifier un licenciement économique, même pendant un mi-temps thérapeutique.
Porter une attention particulière quant au motif invoqué
Nous l'avons vu, un salarié en temps partiel thérapeutique ne peut faire l'objet d'un licenciement sauf à ce qu'il soit fondé sur un motif étranger à son état de santé.
Il est donc nécessaire de rassembler assez de preuves justifiant la faute du salarié ou les difficultés économiques de l'entreprise. Vous pourrez ainsi prouver que vous ne licenciez pas le salarié en raison de son état de santé.
L'employeur doit également veiller à respecter la procédure de licenciement adéquate, comme il le ferait avec n'importe quel autre salarié.
Le respect de la procédure de licenciement
Si vous faites le choix de licencier un salarié pour motif disciplinaire ou pour motif économique, vous devrez respecter les procédures légales ou conventionnelles de licenciement.
Il faudra alors convoquer le salarié à un entretien préalable, la lettre de convocation devant comporter un contenu défini par la loi. La notification du licenciement, qui doit préciser des mentions obligatoires, ne peut être envoyée ni avant ni après des délais encadrés suivant l'organisation de l'entretien préalable.
Selon le type de licenciement (pour faute ou économique), la procédure diffère. C'est pourquoi nous vous invitons à consulter la procédure spécifique applicable à ces 2 types de licenciement, afin d'éviter de commettre une erreur.
Quelles indemnités verser en cas de rupture du contrat de travail du salarié en temps partiel thérapeutique ?
Salaire de référence, perte de salaire... Quelles sont les conséquences du temps partiel thérapeutique sur le montant de l'indemnité de rupture ?
Lorsqu'un salarié à temps complet connaît un aménagement de son temps de travail pour un temps partiel thérapeutique, sa rémunération est nécessairement impactée.
En effet, hors stipulations conventionnelles contraires prévoyant un maintien de salaire complet, l'employeur ne rémunère le salarié qu'au prorata des heures effectuées, comme pour un travail à temps partiel classique.
📌 Exemple : Daniel a été placé en temps partiel thérapeutique à hauteur de 50 %. Il réalise donc 17 h 30 de travail par semaine au lieu des 35 heures habituelles. Il est rémunéré pour ces 17 h 30, et non pour 35 h.
Or, l'indemnité légale de licenciement est calculée selon un salaire de référence correspondant (3) :
- soit à la moyenne mensuelle des 12 derniers mois précédant le licenciement ;
- soit au tiers des 3 derniers mois.
La formule la plus avantageuse pour le salarié (le montant le plus élevé) est celle qu'il faut retenir.
📌 Exemple : Daniel est en mi-temps thérapeutique depuis 6 mois. Il se fait licencier. Son salaire de référence serait donc nécessairement impacté : il a moins gagné ces 6 derniers mois en raison de son état de santé nécessitant l'aménagement de son temps de travail. Heureusement pour lui, ce n'est pas la position que son employeur doit suivre (voir ci-après).
Comment calculer l'indemnité de licenciement du salarié en temps partiel thérapeutique ?
La Cour de cassation a récemment répondu à la question de savoir si le calcul de l'indemnité de licenciement devait prendre en compte la période pendant laquelle le salarié est en temps partiel thérapeutique (4).
Selon elle, "lorsque le salarié en raison de son état de santé travaille selon un temps partiel thérapeutique lorsqu'il est licencié, le salaire de référence à prendre en considération pour le calcul de [...] l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse est le salaire perçu par le salarié antérieurement au temps partiel thérapeutique et à l'arrêt de travail pour maladie l'ayant, le cas échéant, précédé".
Autrement dit, le salaire correspondant à la période où le salarié est en temps partiel thérapeutique n'est pas pris en compte dans le salaire de référence servant à calculer l'indemnité.
La même solution est applicable à l'indemnité de licenciement prévue par une convention collective.
📌 Exemple : dans le cas de Daniel, en mi-temps thérapeutique depuis 6 mois et licencié, l'employeur devra calculer l'indemnité de licenciement par rapport aux salaires de 3 ou 12 derniers mois (selon le montant le plus favorable) précédant le mi-temps.
Ce mode de calcul permet de ne pas commettre de discrimination en raison de l'état de santé du salarié.
💡 Bon à savoir : auparavant, la Cour de cassation estimait que, sauf à s'appuyer sur des dispositions conventionnelles plus favorables, le salarié en temps partiel thérapeutique ne pouvait prétendre à ce que le montant de son indemnité de licenciement soit calculé sur la base des salaires qu'il aurait perçus s'il avait continué à travailler à temps plein (5). Cela impliquait donc que la perte de salaire du salarié impactait directement son indemnité de licenciement.
Comment calculer l'indemnité de rupture conventionnelle du CDI pour un salarié en temps partiel thérapeutique ?
Dans le cadre d'une rupture conventionnelle, les parties négocient librement le montant de l'indemnité de rupture conventionnelle.
Néanmoins, cette indemnité a un montant minimal : elle ne peut être inférieure à l'indemnité de licenciement (7).
De fait, selon nous, le calcul de l'indemnité de rupture conventionnelle devrait suivre le même raisonnement que celui exposé ci-dessus concernant l'indemnité légale de licenciement : afin de ne commettre aucune discrimination en raison de l'état de santé du salarié, le salaire à prendre en compte est celui perçu avant le temps partiel thérapeutique (et avant l'arrêt de travail l'ayant précédé, le cas échéant). Il s'agit de la position la plus favorable pour le salarié.
Pour plus de sécurité dans vos démarches, nous vous recommandons de vous rapprocher d'un avocat.
L'arrêt maladie précédant le mi-temps thérapeutique a-t-il une incidence sur le montant de l'indemnité de rupture du contrat de travail ?
Non, la solution de la Cour de cassation présentée précédemment le précise (4) : si le le temps partiel thérapeutique a été précédé d'un arrêt maladie, l'employeur doit se rapporter à la période qui lui est antérieure pour fixer le salaire de référence servant de base de calcul.
📌 Exemple : Paula a été en arrêt de travail 3 mois, puis a repris en mi-temps thérapeutique pendant 1 mois avant d'être licenciée. Son salaire de référence servant de base au calcul de l'indemnité de licenciement sera calculé en prenant en compte les salaires des 3 ou 12 derniers mois précédant à la fois son temps partiel thérapeutique, et son arrêt maladie.
Référence :
(1) Article L323-3 du Code de la Sécurité sociale
(2) Article L1132-1 du Code du travail
(3) Article R1234-4 du Code du travail
(4) Cass. Soc. 12 juin 2024, n°23-13975
(5) Cass. Soc. 26 janvier 2011, n°09-66453
(6) Article R1234-2 du Code du travail
(7) Article L1237-13 du Code du travail
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