1. La déclaration de politique générale du Premier ministre Michel Barnier
"Notre responsabilité, c'est d'alléger le fardeau et de retrouver des marges de manœuvre budgétaires. Aussi notre volonté est de ramener le déficit de notre pays à 5 % en 2025. Notre objectif est de remettre notre pays sur la bonne trajectoire pour revenir sous le plafond de 3 % en 2029, dans le respect de nos engagements européens."
Déclaration de politique générale de M. Michel Barnier, 1er octobre 2024
Ce mois d’octobre a marqué le coup d’envoi de la politique du Gouvernement du Premier ministre Michel Barnier, après sa nomination durant le mois de septembre 2024 (1).
Comme l'avaient fait avant lui Gabriel Attal ou Élisabeth Borne, c'est face à l'Assemblée nationale, le 1er octobre 2024, que le Premier ministre nouvellement nommé a procédé à la traditionnelle Déclaration de politique générale (dite DPG) (2).
À cette occasion, il a annoncé 5 grands chantiers traduisant la politique qu'il souhaite mener :
- l'amélioration du niveau de vie des Français : pour que les Français puissent affronter la vie chère, l'ex-Vice-président de la Commission européenne a annoncé différents leviers d'actions. Par exemple, il souhaite poursuivre l'accompagnement, par France travail, des allocataires du RSA vers l’emploi (impulsé par la Loi plein-emploi et déjà expérimenté dans plusieurs territoires), augmenter le SMIC de 2 % (voir ci-après), ou encore, relancer la participation des salariés aux résultats de l'entreprise, tout comme l’intéressement et l’actionnariat salarié, ailleurs que dans les grandes entreprises ;
- l'accès à des services publics de qualité : ont été évoquées les questions relatives à la santé avec les problèmes liés aux déserts médicaux mais également à la pénurie de soignants, ou encore à l'école avec la lutte contre le harcèlement scolaire, l'inclusion des personnes en situation de handicap et la revalorisation des filières professionnelles. Le Premier ministre a également salué le travail des maisons “France Services" dans l'accompagnement de proximité des citoyens ;
- la sécurité au quotidien : le Gouvernement souhaite augmenter le temps de présence des forces de l’ordre sur la voie publique, créer de nouvelles brigades de gendarmerie, ou encore renforcer la lutte contre le trafic de drogue et la criminalité organisée, lutte récemment précisée en détail par Bruno Retailleau, ministre de l'Intérieur, le 8 novembre à Marseille (confirmant le souhait, par exemple, de la création d'un parquet national anti criminalité organisée) ;
- la maîtrise de l’immigration : il s'agirait ici d'accélérer les réponses aux demandes d’asile, de renforcer les contrôles aux frontières à l'échelle de la France et de l'Union européenne ;
- favoriser la fraternité : prenant l'exemple des Jeux Paralympiques, Michel Barnier souhaite résoudre les inégalités que subissent les personnes en situation de handicap en matière de scolarisation, d’accessibilité aux transports, d’embauche, etc. Il aspire à soutenir les familles, en particulier les familles monoparentales. Il encourage le bénévolat et la vie associative, l’accès à la culture pour tous.
Enfin, il évoque à nouveau la question de l'accompagnement des personnes en fin de vie, dont les débats ont été prématurément clos en raison de la dissolution de l'Assemblée nationale.
Rappelons-le, cette politique générale s'inscrit, selon les mots du Premier ministre, dans un objectif de réduction de la “double dette” de la France, à savoir :
- la dette budgétaire (3.228,4 milliards d'euros à la fin du deuxième trimestre 2024) ;
- et la dette écologique.
2. PLFSS, PLF pour 2025, simplification de la vie économique : les grandes lois en débat devant le Parlement
Protection sociale : le Projet de Loi de financement de la Sécurité Sociale pour 2025 (PLFSS 2025)
Déposé à l'Assemblée nationale le 10 octobre 2024, le Projet de Loi de Financement de la Sécurité Sociale pour 2025 (3) n'a pas pu être examiné en totalité par les députés en première lecture, rattrapés par le calendrier législatif. Les élus ont malgré tout déposé quelques 2.374 amendements.
Actuellement en Commission des affaires sociales du Sénat, le texte sera présenté en séance publique au Sénat à partir du 18 novembre.
Ont par exemple été évoquées :
- une refonte de l'allègement des cotisations sociales ;
- une évolution du régime social applicable aux apprentis ;
- une baisse du plafond de prise en charge des indemnités journalières ;
- etc.
Pour l'heure, l'avenir des mesures présentées au sein du PLFSS 2025 est incertain puisqu'encore soumises au débat parlementaire.
Votée chaque année, la LFSS permet fixer un cadre aux dépenses de la sécurité sociale, c'est-à-dire en matières sociales et de santé, pour l'année à venir, au regard de la situation financière de l'État.
💡 Bon à savoir : dans l'objectif assumé de créer de nouvelles recettes pour la branche autonomie de la Sécurité sociale, l'idée d'une seconde journée de solidarité, et donc, d'une potentielle suppression d'un jour férié chômé pour les salariés du privé, poursuit son chemin. L'amendement, approuvé par le ministre du Budget Laurent Saint-Martin, a été proposé en Commission des affaires sociales du Sénat le 13 novembre 2024.
Dans tous les cas, le texte doit être promulgué, au plus tard, le 31 décembre 2024.
Budget de l'État : le Projet de Loi de finances 2025 (PLF 2025)
Le Projet de Loi de finances (PLF) permet d'établir les recettes et les dépenses de l'État. Cette année, les débats sont fortement marqués par la dette publique sans précédent du pays, et l'objectif conjoint de ramener le déficit à 5 % du PIB dès l'année 2025.
Dans la lignée des annonces faites par Premier ministre, le PLF 2025 entend accroître la participation des grandes et très grandes entreprises, qui réalisent des profits important, au redressement collectif (par exemple, via la contribution exceptionnelle et temporaire sur les bénéfices des grandes entreprises), ainsi que celle des Français les plus fortunés (par exemple, via la contribution différentielle sur les hauts-revenus).
Déposé le 10 octobre 2024 à l'Assemblée nationale et rejeté en première lecture par les députés le 12 novembre 2024, le texte doit désormais être présenté au Sénat (4).
💡 Bon à savoir : souveraineté alimentaire, renouvellement des générations d'agriculteurs... Le PLF 2025 devrait également poursuivre les mesures d'accompagnement pour le secteur agricole, fortement impulsées par les récents mouvements sociaux et la crise agricole.
Dans tous les cas, le texte doit, comme le PLFSS, être promulgué au plus tard le 31 décembre 2024.
Pour en lire davantage : Budget : que prévoit le projet loi de finances pour 2025 (PLF 2025) pour les entreprises ?
Le retour du Projet de Loi de simplification de la vie économique
Disparu des radars en raison de l'actualité politique de l'été 2024, le Projet de loi de simplification de la vie économique a fait son grand retour au Palais du Luxembourg et a finalement été adopté le 22 octobre 2024 (5). Il doit désormais être examiné par les députés nouvellement élus.
L'un de ses objectif principal est de simplifier les démarches administratives des entreprises, jugées lourdes et contraignantes par les chefs d'entreprises.
🔍 Exemple : le projet prévoyait initialement de simplifier le bulletin de paie, mais les dispositions afférentes ont été supprimées par les sénateurs.
Pour aller dans le détail du projet : Loi Pacte II : quelles sont les nouveautés apportées par le projet de loi de simplification de la vie économique 2024 ?
3. Nouvelle Prolongation du régime d’assurance chômage
31 décembre 2024Prolongation de l'assurance-chômage
Du côté de l’assurance chômage et du dispositif de bonus-malus, les règles en vigueur ont été une énième fois prolongées par décret. Elles sont désormais en vigueur jusqu’au 31 décembre 2024 (6).
Pour mémoire, les dernières négociations des partenaires sociaux en la matière avaient abouti à un protocole d'accord sur l'assurance chômage en date du 10 novembre 2023. Seulement, son agrément avait été abandonné après l'échec des négociations sur l'emploi des seniors au printemps 2024.
Cependant, dans sa déclaration de politique générale, le Premier ministre a appelé à un renouveau du dialogue social avec les partenaires syndicaux et professionnels, réouvrant ainsi la voie des négociations sur l’emploi des seniors et sur le système d’indemnisation du chômage.
Aussi, de nouvelles négociations ont eu lieu, sur la base de ce protocole, et sous l’impulsion d’Astrid Panosyan-Bouvet, actuelle ministre du Travail et de l'Emploi. Un accord, qui prendra la forme d'un avenant au protocole précité, a été trouvé le 14 novembre 2024.
Indemnisation des travailleurs transfontaliers, relèvement de l'âge du bénéfice des règles d'indemnisation spécifiques aux seniors, durcissement des conditions d'indemnisation des intermittents du spectacles... sont autant de thématiques qui ont été traitées (et parfois abandonnées) ces dernières semaines.
Faites le point sur l'assurance chômage : Nouvelle réforme du chômage : les règles actuelles prolongées jusqu'au 31 décembre 2024 ; Allocations chômage : les conditions pour en bénéficier
4. Le SMIC revalorisé de 2 %
11,88 euros brutSMIC 2025
Annoncée comme l'une des mesures essentielles du chantier "d'amélioration du niveau de vie des Français", le SMIC a été relevé, de façon anticipée, par un décret du 23 octobre 2024 (7).
Revalorisé de 2 % et applicable depuis le 1er novembre 2024, le SMIC 2025 s'élève à un montant horaire de 11,88 euros bruts.
Puisqu'il s'agit d'une revalorisation par anticipation, cela signifie qu'il n'y aura pas de nouvelle revalorisation au 1er janvier 2024, comme cela est habituellement le cas.
Rappelons enfin que le chef du Gouvernement a appelé à relancer les négociations dans les branches professionnelles dont les salaires sont en dessous du SMIC.
"Il reste dans notre pays des branches professionnelles dans lesquels les minima sont inférieurs au SMIC. Ce n'est pas acceptable, et cela fera l'objet de négociations rapides. L'État y veillera."
Déclaration de politique générale de M. Michel Barnier, 1er octobre 2024
Sur le même sujet : Salaire minimum conventionnel : faut-il le respecter ?
5. Cour de cassation : la rétroactivité des dispositions relatives aux congés payés pendant un AT/MP
À la suite d'une véritable saga jurisprudentielle et de la parution de la loi DDADUE le 22 avril 2024, les dispositions relatives à l'acquisition des congés payés et de leurs reports en cas d'arrêt de travail ont été modifiées pour être mise en conformité avec le droit de l'Union européenne (UE) (8).
Autrefois, le salarié dont le contrat de travail était suspendu pour cause d'accident du travail ou de maladie professionnelle (AT/MP) ne pouvait acquérir des congés payés que dans la limite de 1 an. Depuis la loi DDADUE, et en application du droit de l'UE, ce n'est plus le cas aujourd'hui. Les salariés dans une telle situation peuvent acquérir des congés payés, sans limitation de durée (9).
La question était de savoir si les périodes d'arrêts AT/MP supérieurs à 1 an, et antérieures à la loi du 22 avril 2024, pouvaient se voir appliquer cette règle issue du droit de l'UE, puisque le Code du travail n'était pas conforme à ce dernier.
⚖ La réponse est oui, selon un arrêt du 2 octobre 2024 de la Cour de cassation : le salarié peut prétendre à ses droits à congé payé au titre de ces périodes antérieures (plus de détail dans notre actualité dédiée) (10).
Ne ratez rien des nouveautés en matière de congés payés : Congés payés et arrêt maladie : nouvelles règles à appliquer en entreprise
6. Un salarié licencié pour l'utilisation d'un GIF Homer Simpson
Côté droit du travail, une actualité du 9 octobre 2024 a fait couler beaucoup d'encre : celle d'un salarié en CDI d'un centre d'appel, licencié pour faute grave, après l'utilisation d'un GIF Homer Simpson* sur la messagerie professionnelle.
Selon lui, son souhait était de détendre l'atmosphère parmi ses collègues, alors que les ressources humaines venaient d'annoncer un retard dans le versement des salaires. Il indique également que la faute reprochée ne repose que sur l'utilisation du GIF, jugée "non professionnelle".
Aucun jugement n'est intervenu sur cette affaire, laquelle interroge les limites de la liberté d'expression des salariés, et celles du pouvoir disciplinaire de l'employeur.
*(GIF = imagine animée)
Juritravail vous aide à faire le point sur le licenciement pour faute grave : Licenciement pour faute grave : tout savoir sur la procédure
7. L’actualité de vos conventions collectives
Enfin, le mois d'octobre a été riche en actualité du côté des conventions collectives. Voici quelques informations à retenir sur certaines d'entre-elles :
- Convention collective des services de l'automobile (IDCC 1090) : une légère modification du champ d'application de la convention est intervenue par avenant "au regard de la transition écologique et des métiers émergents dans le domaine des services de l’automobile et de la montée en puissance de l’économie circulaire" (avenant étendu par arrêté publié le 8 octobre 2024)) (11) ;
- Convention collective de la métallurgie (IDCC 3248) : un avenant du 10 juin 2024, dont l'extension a été publiée le 8 octobre au Journal officiel (JO) est venu préciser les modalités de versement de l'indemnisation complémentaire due par l'employeur en cas d'incapacité de travail du salarié à cheval sur 2 années civiles (aussi nommé "maladie chevauchante") (12).
Alpes-Maritimes, Charente, Côte-d'Armor... plusieurs valeurs de point, servant au calcul de la prime d'ancienneté, ont de surcroît été étendues (voir notre synthèse) ;
- Convention collective nationale de la boulangerie-pâtisserie (IDCC 843) : les congés exceptionnels pour événement familiaux prévus par la convention collective ont été modifiés, notamment pour prendre en compte les récentes évolutions du Code du travail en la matière (ex : les congés pour décès de l'enfant du salarié) (13) ;
- Convention collective des transports routiers et activités auxiliaires du transport (IDCC 16) : de nouveaux éléments sont entrés en application, concernant l'indemnisation des salariés en arrêt maladie, accident du travail et en congé maternité (14) ;
- etc.
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Références :
(1) Décret du 5 septembre 2024 portant nomination du Premier ministre (JO du 6 septembre 2024)
(2) Déclaration de politique générale du Premier ministre Michel Barnier, Assemblée nationale, prononcée le 1er octobre 2024
(3) Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025, déposé le 10 octobre 2024, dossier législatif
(4) Projet de loi de finances pour 2025, déposé le 10 octobre 2024, dossier législatif
(5) Projet de loi de simplification de la vie économique, déposé le 24 avril 2024, dossier législatif
(6) Décret n°2024-963 du 29 octobre 2024 relatif au régime d'assurance chômage
(7) Décret n°2024-951 du 23 octobre 2024 portant relèvement du salaire minimum de croissance
(8) Loi n°2024-364 du 22 avril 2024 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière d'économie, de finances, de transition écologique, de droit pénal, de droit social et en matière agricole (dite Loi DDADUE)
(9) Article L3141-5 du Code du travail
(10) Cass. Soc. 2 octobre 2024, n°23-14806
(11) Convention collective nationale du commerce et de la réparation de l'automobile, du cycle et du motocycle et des activités connexes, ainsi que du contrôle technique automobile du 15 janvier 1981 (dite Convention collective Services de l'automobile) ; Arrêté du 24 septembre 2024 portant extension d'un avenant à la convention collective nationale des services de l'automobile (JO du 8 octobre 2024)
(12) Convention collective nationale de la métallurgie du 7 février 2022 ; Arrêté du 25 septembre 2024 portant extension d'un avenant à la convention collective nationale de la métallurgie (JO du 8 octobre 2024)
(13) Convention collective nationale de la boulangerie-pâtisserie du 19 mars 1976 ; Arrêté du 24 septembre 2024 portant extension d'un avenant à la convention collective nationale de la boulangerie-pâtisserie (entreprises artisanales)
(14) Convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport du 21 décembre 1950 (dite Convention collective Transports Routiers) ; Arrêté du 24 septembre 2024 portant extension d'un accord conclu dans le cadre de la convention collective nationale des transports routiers et des activités auxiliaires du transport (JO du 31 octobre 2024)
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