Qu'est-ce que l'annualisation du temps de travail ?
Le contrat annualisé : une modalité d'aménagement du temps de travail (ATT)
Le dispositif d'aménagement du temps de travail permet à l'employeur subissant des fluctuations d'activité, de décompter la durée du travail du salarié sur une période supérieure à la semaine.
Dans le cas de l'annualisation du temps de travail (ATT), cette période est égale à l'année.
Différence entre annualisation et modulation du temps de travail
La modulation est souvent confondue avec l’annualisation du temps de travail, les deux termes étant généralement utilisés de manière interchangeable.
La modulation permet de prévoir une période de référence sur une partie de l'année ou sur l'année entière.
L'annualisation est un aménagement des horaires qui repose sur l'aménagement du temps de travail sur une période de référence égale à l'année.
Important : le dispositif de recours à la modulation du temps de travail a été abrogé du Code du travail le 22 août 2008 (1) : il n'est plus possible de conclure un accord de modulation. Toutefois, les accords conclus avant la réforme restent applicables dans l'entreprise, tant qu'ils n'ont pas été dénoncés.
Comment fonctionne l'annualisation du temps de travail ?
Un cycle de travail annuel
Pour rappel : la durée légale de travail effectif des salariés à temps complet est fixée à 35 heures par semaine (2). Sauf accord d'aménagement du temps de travail ou décision unilatérale de l'employeur, le cas échant, toute heure accomplie au-delà de la durée légale hebdomadaire ou de la durée considérée comme équivalente (durée conventionnelle) est une heure supplémentaire.
Dans le cadre de l'annualisation, le salarié peut travailler plus que la durée légale ou conventionnelle sur une ou plusieurs semaines déterminée(s), sans que l'employeur ne soit tenu de lui rémunérer les heures accomplies au-delà de 35 heures. En contrepartie, le salarié travaille moins, d'autres semaines.
✅ L'objectif ? En une année, le salarié doit avoir accompli la durée légale annuelle du travail, soit 1.607 heures (3).
Attention ! Si le salarié peut dépasser la durée légale du travail (35 heures), il ne peut pas travailler plus que la durée maximale journalière et hebdomadaire de travail (se reporter au dossier complet pour plus de détails).
Décompte des heures supplémentaires
Lorsqu'est mis en place un dispositif d'aménagement du temps de travail sur une période de référence supérieure à la semaine, les heures supplémentaires sont décomptées à l'issue de cette période de référence (3).
Lorsque la période de référence est annuelle, les heures effectuées au delà de 1.607 heures constituent des heures supplémentaires.
Bon à savoir :
L'accord peut prévoir une limite annuelle inférieure à 1.607 heures pour le décompte des heures supplémentaires (4).
À noter : lorsque la durée annuelle du travail dépasse largement les 1.607 heures annuelles correspondant aux 35 heures légales, l'employeur peut envisager de mettre en place - pour les salariés déterminés par la loi - un contrat au forfait jours, ne basant plus la rémunération sur le nombre d'heures réalisées mais sur le nombre de jours effectivement travaillés.
📈 Selon les derniers chiffres publiés par la Dares*, les cadres à temps complet déclarent une durée annuelle effective de travail de 1.798 heures en 2023, soit environ 129 heures de plus que la moyenne nationale.
Gestion et organisation : des jours de repos, des jours fériés, des RTT, des congés payés
En cas d'absence rémunérée, le temps non travaillé n'est pas récupérable et est valorisé sur la base du temps qui aurait été travaillé si le salarié avait été présent, heures supplémentaires comprises.
Le plafond d'heures annuel est défini en considération du nombre "théorique" d'absence des salariés :
- jours de repos hebdomadaires (5) ;
- jours fériés ;
- chômés ;
- RTT ;
- congés payés ;
- etc.
Exemple :
Pour un salarié qui évolue sur un contrat de 35 heures, la base annuelle est de 1586,55 heures selon un calcul en jours ouvrables de 272 jours, dont on soustrait 52 jours de repos, 11 jours fériés et 30 jours de congés payés.
Qui peut bénéficier de l'annualisation du temps de travail ?
L'annualisation du temps de travail concerne tous les salariés d'une entreprise, quel que soit leur statut professionnel.
En effet, ce dispositif s'applique également au personnel soumis à une durée légale de travail de 35 heures, sans pour autant qu'ils ne soient cadres (salariés, techniciens et agents de maîtrise, etc.).
En définitive, toute entreprise, quelle que soit sa taille ou son secteur d'activité, peut donc avoir recours à l'annualisation du temps de travail pour ajuster le volume d'heures travaillées par ses salariés en fonction de ses besoins.
Bon à savoir :
Il n'est pas possible d'annualiser des salariés au cas par cas. Ce dispositif s'applique soit à tous les employés de l’établissement, soit à l’ensemble du personnel d’un même service, ou d’une même équipe (qu'ils soient en CDI ou en CDD).
Le salarié peut-il refuser la mise en place de l'annualisation ?
Accord du salarié non requis
Un employeur n'a pas besoin de recueillir l'accord de son salarié lorsqu'il aménage le temps de travail suite à la négociation d'un accord collectif (6).
La mise en place d'un dispositif d'aménagement du temps de travail sur une période supérieure à la semaine par accord collectif ne constitue pas une modification du contrat de travail pour les salariés à temps complet (7).
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... sauf dans le cas particulier des salariés à temps partiel
Un salarié qui travaille à temps partiel peut être annualisé. Cependant, ce type d’annualisation présente une spécificité : sa mise en place ne peut pas lui être imposée à ce salarié. Contrairement aux salariés à temps plein, les salariés à temps partiel doivent donner leur accord pour passer en annualisation.
Attention ! Si la durée légale hebdomadaire est atteinte, le contrat de travail risque d'être requalifié à temps complet.
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Comment mettre en place l'annualisation du temps de travail dans une entreprise et quelles sont les étapes nécessaires ?
Accord ou convention
La mise en place d'un aménagement du temps de travail consistant à organiser la répartition de la durée du travail sur une période annualisée ne peut se faire sur décision unilatérale de l'employeur.
Le temps de travail annualisé suppose de négocier un accord collectif - ou d'établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche - pouvant définir les modalités d'aménagement du temps de travail.
Contenu de l'accord
Cet accord doit contenir des éléments obligatoires (8) :
- la période de référence, qui ne peut excéder 1 an ou, si un accord de branche l'autorise, 3 ans ;
- les conditions ainsi que les délais de prévenance des changements de durée ou d'horaires de travail ;
- es conditions de prise en compte, pour la rémunération des salariés, des absences ainsi que des arrivées et des départs en cours de période de référence ;
- éventuellement, une limite annuelle inférieure à 1.607 heures pour le décompte des heures supplémentaires.
À savoir : pour les salariés à temps partiel
Lorsque l'accord s'applique aux salariés à temps partiel, il doit prévoir :
- les modalités de communication ;
- et les modalités de modification de la répartition de la durée et des horaires de travail.
Quels sont les obligations de l'employeur en matière de délais de prévenance pour les changements d'horaires en cas d'annualisation du temps de travail ?
Dans les entreprises ayant mis en place un dispositif d'aménagement du temps de travail sur une période de référence supérieure à la semaine, les salariés doivent être informés dans un délai raisonnable de tout changement dans la répartition de leur durée de travail.
Selon ce principe qui est d’ordre public, il appartient à l'employeur de prévoir les conditions et délais de prévenance des changements de durée ou d'horaires de travail (comme vu précédemment).
À défaut cependant de stipulations dans l'accord, le délai de prévenance des salariés en cas de changement de durée ou d'horaires de travail est fixé à 7 jours.
Quels outils peuvent aider à gérer l'annualisation du temps de travail ?
Une fois l’annualisation du temps de travail préparé, il vous faut ensuite la manager efficacement et suivre les décomptes quotidiennement pour arriver à l’objectif du temps travaillé préalablement défini.
En tant qu'employeur, vous aurez plus facilement accès au volume d'heures travaillées par vos salariés et équipes en générale grâce :
- à l'établissement d'un tableau ;
- au recours à un ou plusieurs logiciels de gestion.
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Rémunération : comment calculer un salaire annualisé ?
Heures effectives ou harmonisation
Dans le cas de l'annualisation, les modalités de rémunération sont automatiquement précisées dans le contrat de travail.
Ainsi, l'employeur peut payer le salaire selon les heures effectivement réalisées. Dans ce cas, la rémunération diffère d'un mois à l'autre.
Au contraire, l'accord peut prévoir que la fixation du salaire mensuel des salariés est indépendante de l'horaire réel (lissage du salaire) (9). Dans ce cas, l'employeur doit déterminer les conditions dans lesquelles cette rémunération est calculée.
Dans la majorité des cas, la rémunération est lissée sur l'année : une régularisation en fin de période de référence s'impose pour vérifier le nombre d'heures effectivement réalisées par le salarié.
Jurisprudence : pas de récupération du trop-perçu en cas d'insuffisances dans la planification
👨⚖️ Sur ce point, la Cour de cassation est venue préciser qu'en cas du versement par erreur d'un trop-perçu à un salarié soumis à des horaires modulés avec rémunération lissée, le récupérer n'est pas toujours permis pour l'employeur, notamment lorsque le déficit d’heures travaillées relève d’une insuffisance de planification de sa part (10).
Heures supplémentaires
Principe
Lorsque la période de référence est annuelle, constituent des heures supplémentaires, toutes celles effectuées au-delà de 1.607 heures (9), ou moins si l'accord le prévoit. En cas de dépassement du plafond par un salarié, ces dernières doivent être payées au taux de majoration prévu par la loi ou la convention collective.
Exemple :
L'accord collectif peut prévoir un plafond annuel à 1590 heures. Dans ce cas, toute heure effectuée au-delà de cette limite devra être payée comme une heure supplémentaire.
Bon à savoir :
Un accord collectif qui fixerait une durée annuelle de travail supérieure au plafond légal serait inopposable au salarié.
Faculté entrant dans le champ de la négociation
Lorsque la période de référence est égale à 1 an, l'accord peut prévoir une limite hebdomadaire, supérieure à 35 heures, au-delà de laquelle les heures de travail effectuées au cours d'une même semaine constituent, en tout état de cause, des heures supplémentaires dont la rémunération est payée avec le salaire du mois considéré.
Ainsi, les heures supplémentaires résultant de cette application n'entrent pas dans le décompte des heures travaillées qui est opéré à la fin de la période de référence.
Quels sont les intérêts de l'annualisation du temps de travail pour les employeurs ?
L'annualisation du temps de travail peut présenter quelques inconvénients pour une entreprise (complexité dans la gestion quotidienne, impact sur la motivation des employés, gestion des congés et absence complexe, risque juridique lié au respect du temps de travail et de repos). Ce type d'aménagement présente toutefois de nombreux intérêts, le plus souvent marqués par une amélioration de la productivité, notamment lorsque l'entreprise présente des fluctuations de l'intensité de l'activité.
Ce type d’aménagement du temps de travail permet une flexibilité accrue, avec des variations d’heures travaillées d’un mois à l’autre, tout en respectant le nombre d’heures annuelles à accomplir.
Elle offre donc aux entreprises la possibilité de s’adapter aux fluctuations saisonnières ainsi qu'aux besoins changeants, tout en permettant aux employés de mieux concilier travail et vie personnelle.
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L'annualisation du temps de travail est particulièrement adaptées pour :
- les entreprises cycliques ou saisonnières ;
- les entreprises qui connaissent des difficultés d’embauche temporaire ;
- les situations exceptionnelles, comme une pandémie.
Infographie : Conditions et règles applicables de l'annualisation du temps de travail
(1) Loi n°2008-789 du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail
(2) Article L3121-27 du Code du travail
(3) Article L3121-41 du Code du travail
(4) Article L3121-44 du Code du travail
(5) Article D3121-19 du Code du travail
(6) Article L3121-46 du Code du travail (7) Article L3121-43 du Code du travail
(8) Article L3121-44 du Code du travail
(9) Article D3121-28 du Code du travail
(10) Cass. Soc, 2 oct. 2024, n°22-21422
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