Le projet de loi sur le pouvoir d'achat a été adopté définitivement par le Parlement le mercredi 3 août 2022, après des débats houleux (1). Le texte a été validé par le Conseil Constitutionnel le vendredi 12 août 2022. Dans ce contexte de hausse des prix, certaines mesures prises dans le cadre de cette loi sont prolongées pour l'année 2023.
Comment définir le pouvoir d'achat ?
Le pouvoir d'achat correspond à la quantité de biens et de services qu'un revenu permet d'acheter.
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Le pouvoir d'achat dépend de deux éléments :
- du niveau de revenus du ménage : il s'agit des revenus d'activité (revenus du travail, revenus de la propriété, etc.), augmentés des prestations sociales éventuellement perçues et diminués des impôts versés ;
- et du niveau des prix.
Ainsi, le pouvoir d'achat d'un ménage correspond à la différence entre l'évolution de ses revenus et l'évolution des prix.
Concrètement, si la hausse des revenus d'un ménage est supérieure à la hausse des prix, le pouvoir d'achat de celui-ci augmente. À l'inverse, si les revenus du ménage augmentent moins que les prix, dans ce cas, le ménage subit une baisse de son pouvoir d'achat.
Pour calculer l'évolution du pouvoir d'achat des ménages, l'Insee utilise la méthode des unités de consommation (UC). Chaque ménage est composé d'un certain nombre d'unités de consommation.
Comment augmenter le pouvoir d'achat des ménages ? Quelles conséquences de la loi Pouvoir d'achat pour 2022/2023/2024 ?
1. Création d'une prime exceptionnelle d'inflation : prime exceptionnelle de rentrée de 100 euros
À la rentrée de septembre 2022, une aide alimentaire exceptionnelle a été versée aux ménages les plus modestes et aux étudiants.
Environ 11 millions de Français étaient concernés par cette prime exceptionnelle. Cette aide alimentaire exceptionnelle était d'un montant de 100 euros par foyer, auxquels s'ajoutent 50 euros par enfant à charge.
Les allocataires percevant les minima sociaux, l'aide au logement, l'AAH et les étudiants boursiers en bénéficiaient automatiquement s'ils étaient éligibles à l'aide alimentaire exceptionnelle.
Cette prime inflation a été versée à partir du 15 septembre 2022 aux français bénéficiaires.
Pour les parents, il s'agissait d'une aide supplémentaire ! Bien qu'il existe également la prime de rentrée scolaire ou ARS. Les personnes qui percevaient la prime d'activité, ont reçu l'aide exceptionnelle au mois de novembre.
2. Trimestre anti-inflation dans les supermarchés jusqu'en juin 2023 et chèque alimentaire
Le Gouvernement a trouvé un accord avec les représentants de la grande distribution le 6 mars 2023 pour mettre en place un "trimestre anti-inflation".
L’objectif de cette mesure étant de proposer des produits de consommation à tarifs préférentiels qui seront mis en avant par un logo tricolore. Bruno Le Maire, ministre de l'Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, a annoncé que cette mesure, initialement prévue pour 3 mois, allait être prolongée jusqu’à la fin de l’année 2023.
Il a également annoncé la possibilité d'un chèque alimentaire, à destination des foyers les plus modestes.
Ces annonces ne font pas partie de la loi Pouvoir d'achat, mais visent tout de même à réduire l'impact de l'inflation sur le budget des ménages.
3. Bouclier tarifaire sur les prix de l'énergie prolongé
Face à l'envolée des prix de l'énergie (électricité, gaz), le Gouvernement a mis en place, il y a maintenant plusieurs mois, un bouclier tarifaire. À ce titre, la hausse des factures d'électricité était plafonnée à 4% et les prix du gaz gelés à leur niveau d'octobre 2021.
Cependant, le budget de 2024 confirme l'arrêt de ce bouclier tarifaire. Ce qui signifie que le tarif réglementé de l'électricité devrait augmenter en février 2024.
Un chèque énergie a été mis en place, et envoyé en avril 2023. Ce dernier sera valable jusqu'au 31 mars 2024. Son montant varie de 48 à 277 euros en fonction du revenu fiscal de référence et de la consommation d'énergie.
4. Augmentation des retraites et d'invalidité de base
9 septembre 2022Versement des retraites revalorisées.
Pour répondre à la baisse du pouvoir d'achat des seniors et des personnes en invalidité qui subissent également l'inflation, les députés avaient aussi validé la revalorisation de 4% des pensions de retraite et d'invalidité de base, applicable rétroactivement au 1er juillet 2022.
Là encore, cette revalorisation anticipait les revalorisations de droit commun qui devaient intervenir d'octobre 2022 à avril 2023 avec les conséquences que cela entraîne sur les taux des futures revalorisations.
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5. Revalorisation des minimas sociaux (prime d'activité, RSA, AAH, APL...). Quel impact en 2024 ?
Le RSA, qui avait été revalorisé de 1,6% au 1er avril 2023, le sera de nouveau au 1er avril 2024. Il augmentera d'au moins 28 euros par mois. D'autres minima sociaux seront également revalorisés à hauteur de 4,6% (ASS, ARA, ASA, AAH...)
Le Parlement avait validé la revalorisation de certaines prestations sociales et familiales. Elles ont été revalorisées rétroactivement au 1er juillet 2022.
Les allocations familiales, le RSA, l'allocation de solidarité aux personnes âgées ont fait l'objet d'une hausse de 4% dès le 1er juillet 2022.
Cette revalorisation exceptionnelle des prestations sociales n'a fait qu'anticiper celles de droit commun qui devaient intervenir d'octobre 2022 à avril 2023. Par conséquent, ces dernières ont tenu compte du taux appliqué en juillet 2022, pour la détermination de leurs différents taux de revalorisation.
Les députés ont voté la déconjugalisation de l'AAH. Cette mesure était attendue depuis longtemps par les bénéficiaires de l'AAH. Au plus tard le 1er octobre 2023, l'aide sera calculée en fonction des revenus du bénéficiaire, sans tenir compte des ressources de son conjoint.
Enfin, l'aide personnalisée au logement (APL) a, quant à elle, été revalorisée de 3,5% le 1er octobre 2023.
6. Baisse du carburant annoncée par le Gouvernement
La Première ministre Elisabeth Borne annonçait le 16 septembre, un projet de loi prévoyant la suspension de la "vente à perte" pendant plusieurs mois afin de permettre aux ménages de faire face à l'inflation des prix. La "vente à perte" signifie que les distributeurs auront donc la possibilité de vendre leur carburant à un prix inférieur au prix auquel ils l'ont acheté. Le 27 septembre 2023, cette proposition a été le sujet de débats en Conseil des ministres. Lors de son allocution du 24 septembre 2023, Emmanuel Macron a annoncé que, suite aux refus des distributeurs, ce projet de loi ne sera pas dans les mesures anti-inflation.
Contexte : le 1er avril 2022, le Gouvernement avait mis en place une remise carburant d'un montant de 18 centimes par litre afin d'alléger la note à la pompe pour tous les français.
Puis, il a mis en place une remise plus élevée. Le montant de l'aide carburant était (2) :
- France continentale : 30 centimes (toutes taxes comprises TTC) par litre de carburant du 1er septembre au 31 octobre 2022. Elle a ensuite été ramenée à 10 centimes TTC par litre en novembre et en décembre 2022 ;
- Corse : 28,25 centimes d'euros TTC par litre. Elle a ensuite été de 9,42 centimes par litre en novembre et décembre 2022 ;
- Martinique, Guadeloupe, Guyane, La Réunion, Mayotte : 25 centimes d'euros TTC par litre de carburant du 1er septembre au 31 octobre 2022. Elle a ensuite été ramenée à 8,33 centimes TTC par litre en novembre et en décembre 2022).
Cette mesure a pris fin le 31 décembre 2022 et a été remplacée par une indemnité carburant utilisable jusqu'au 31 mars 2023 (3).
7. Contrôle de la hausse des loyers : prolongation du "bouclier loyer"
La loi du 7 juillet 2023 prolonge le contrôle de la hausse des loyers jusqu'au 31 mars 2024.
Ainsi, l'augmentation de l'indice de référence des loyers d'habitation sera plafonnée à 3,5% en métropole, 2,5% dans les Outre-Mer et suivant un taux particulier fixé par le Préfet pour la Corse.
L'indice de référence des loyers commerciaux concernant l'usage d'un bail commercial sera également plafonné selon les mêmes taux.
8. Suppression de la redevance audiovisuelle
Le Parlement a voté la suppression de la redevance audiovisuelle.
Elle est donc supprimée depuis l'automne 2022 et représente une économie de 138 euros pour les ménages français qui vivent sur le territoire métropolitain (88 euros pour les ménages qui vivent en Outre-Mer).
9. Prime Macron/prime de partage de la valeur, reconduite
La prime de partage de la valeur (PPV) (anciennement appelée prime Macron ou prime exceptionnelle de pouvoir d'achat) a été reconduite et renforcée, validée par le Parlement au début du mois d'août 2022. Le Gouvernement avait prévu la possibilité, pour les entreprises, de tripler le montant de la prime versée.
Elle peut ainsi s'élever à 3.000 euros, voire 6.000 euros pour les entreprises qui ont signé un accord d'intéressement.
Lorsque la prime est versée aux salariés dont la rémunération perçue au cours des 12 mois précédant son versement est inférieure à 3 fois la valeur annuelle du SMIC en vigueur, elle est exonérée de cotisations et d'impôts. Pour cela, cette prime doit être versée aux salariés concernés, entre le 1er août 2022 et le 31 décembre 2023. À partir de 2024, elle sera exonérée seulement des cotisations sociales et donc soumises à l'impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux (CSG et CRDS).
Les entreprises ne peuvent pas la verser en plus de 4 versements afin d'éviter qu'elle ne remplace les augmentations salariales.
A noter : un accord national interprofessionnel (ANI) prévoit qu'à partir du 1er janvier 2025, les entreprises de moins de 50 salariés (et de plus de 11 salariés) devront mettre en place un dispositif de partage de la valeur (PPV, intéressement, participation...).
10. Dégel du point d'indice pour les agents publics et revalorisation des salaires
Le point d'indice des agents publics a été revalorisé rétroactivement au 1er juillet 2022, à hauteur de 3,5%. La valeur mensuelle du point d'indice est donc de 4,85003 euros, depuis le 1er juillet 2022 (4).
La plus forte augmentation depuis 1985 !
Avec cette hausse, 700.000 agents publics, qui étaient jusque-là rémunérés au SMIC, ont été augmentés.
Ce point d'indice a été revalorisé à hauteur de 1,5% dès le 1er juillet 2023.
11. Facilitation de la résiliation des contrats d'assurance et des abonnements
Depuis le 1er juin 2023, les consommateurs peuvent résilier facilement les abonnements (gaz, électricité, magazine, internet et téléphonie, etc.) ou les assurances souscrites sur internet ou via une application mobile.
L'objectif est de laisser la possibilité aux consommateurs de se tourner vers des offres moins chères.
Les prestataires doivent donc prévoir la possibilité, pour les consommateurs, de résilier leurs abonnements et leurs assurances, directement en ligne via une fonctionnalité prévue à cet effet. Un décret du 16 mars 2023 est notamment venu préciser les modalités de résiliation en ligne (5).
12. Revalorisation des bourses pour les étudiants
Le montant des bourses est augmenté de 37 euros par mois pour tous les échelons depuis la rentrée 2023. Les étudiants d'Outre-Mer bénéficient d'un complément de 30 euros qui s'ajoute à cette revalorisation (6).
Par ailleurs, le dispositif "repas à 1 euro", déjà mis en place par le Centre régional des œuvres universitaires et scolaires (Crous) pour l'année universitaire 2022-2023, est reconduit pour l'année universitaire 2023-2024 afin de soutenir les étudiants qui subissent, eux aussi, une baisse de leur pouvoir d'achat en raison de l'inflation.
13. Une évolution dans les conditions d'utilisation des titres restaurant
Le plafond journalier des titres-restaurant, qui avait été augmenté pendant la crise sanitaire, était repassé à 19 euros depuis le 1er juillet 2022.
Depuis le 1er octobre 2022, le plafond journalier a été de nouveau augmenté à 25 euros.
14. Déblocage anticipé de l'épargne salariale exonéré de cotisations
Autre modification apportée par les sénateurs : la possibilité pour les salariés de demander le déblocage anticipé des sommes placées sur des plans d'épargne salariale au titre de la participation et de l'intéressement (8).
Les salariés pouvaient réaliser une demande de déblocage de ces fonds jusqu'au 31 décembre 2022, dans la limite de 10.000 euros (hors plan d'épargne retraite collectif).
Les fonds débloqués ont été exonérés d'impôts sur le revenu et de cotisations sociales.
15. Lutte contre les pratiques commerciales illicites
Jusqu'à la "Loi Pouvoir d'achat", les sanctions en cas de pratiques commerciales trompeuses étaient de 2 ans d'emprisonnement et de 300.000 euros d'amende.
Avec l'entrée en vigueur de ladite loi, les sanctions sont dorénavant plus sévères.
En effet, si les pratiques commerciales trompeuses sont suivies de la conclusion d'un contrat, la peine d'emprisonnement est de 3 ans (contre 2 ans précédemment). Et si ces pratiques sont commises en bande organisée, la peine est portée à 7 ans de prison (9).
(2) Décret n°2022-1168 du 22 août 2022 modifiant le décret du 25 mars 2022 relatif à l'aide exceptionnelle à l'acquisition de carburants
(3) Décret n°2023-158 du 6 mars 2023 modifiant le décret n°2023-2 du 2 janvier 2023 relatif à la création, aux conditions et aux modalités de versement d'une indemnité carburant pour les travailleurs
(4) Décret n°2022-994 du 7 juillet 2022 portant majoration de la rémunération des personnels civils et militaires de l'Etat, des personnels des collectivités territoriales et des établissements publics d'hospitalisation
(5) Décret n°2023-182 du 16 Mars 2023 relatif aux modalités techniques de résiliation des contrats par voie électronique
(6) Arrêté du 13 avril 2023 fixant les plafonds de ressources relatifs aux bourses d'enseignement supérieur du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche pour l'année universitaire 2023-2024
(7) Loi n°2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat, article 6
(8) Loi n°2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat, article 5
(9) Articles L132-2, L132-2-1 et L132-2-2 du Code de la consommation
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