Accords d'intéressement : les obligations issues de la loi "partage de la valeur"

1. Les entreprises de 11 à 49 salariés doivent mettre en place au moins un dispositif de partage de la valeur

Depuis le 1er janvier 2025, à titre expérimental pour une période de cinq ans, les entreprises employant entre 11 et 49 salariés, qui ont réalisé pendant 3 exercices consécutifs un bénéfice net fiscal au moins égal à 1% du chiffre d'affaires, sont désormais dans l'obligation de mettre en place un dispositif de partage de la valeur (1) :

Cette obligation résulte de la loi du 29 novembre 2023 portant transposition de l’accord national interprofessionnel (ANI) relatif au partage de la valeur au sein de l’entreprise. Il s'agit d'une expérimentation d’une durée de 5 ans à compter de la promulgation de la loi. Elle prendra donc fin le 29 novembre 2028

Si l'entreprise est déjà couverte par un accord d’intéressement ou de participation, elle n'est pas soumise à cette obligation expérimentale. 

illustration

Obtenez notre guide complet sur l'intéressement et la participation

Mise en place de l’accord d'intéressement et de participation, information des salariés, répartition entre les salariés, modalités de calcul, obligations de l'employeur et dates de versement : notre guide complet vous aide à bien gérer.

Inclus : 1 modèle d'accord d'intéressement, 1 modèle d'accord de participation, 1 modèle de fiche pour informer le salarié du montant de sa prime d'intéressement, 1 fiche explicative et des questions réponses.

2. Obligation d'avoir négocié sur un partage des bénéfices exceptionnels de l'entreprise avant le 30 juin 2024

Les entreprises dotées d'un effectif de 50 salariés et plus, et comptant au moins un délégué syndical, sont désormais tenues de négocier sur les bénéfices exceptionnels.

Ainsi, lorsqu'elles ouvrent une négociation sur un dispositif de participation ou d’intéressement, la prise en compte des bénéfices pourra conduire à un supplément d'intéressement ou de participation ou à une nouvelle discussion sur un dispositif de partage (2).

Les entreprises déjà couvertes par un accord d'intéressement ou de participation, au moment de la publication de la loi, devaient engager une négociation au plus tard le 30 juin 2024 sur la définition de leurs bénéfices exceptionnels et comment ceux-ci seront partagés avec les salariés.

Cette augmentation exceptionnelle du bénéfice dispose d’une définition légale. Elle doit prendre en compte des critères tels que (2) :

  • la taille de l’entreprise ;
  • le secteur d’activité ;
  • la survenance d’une ou plusieurs opérations de rachat d’actions de l’entreprise.

💡 Ces documents peuvent également vous intéresser : Modèle d'accord de participation et Modèle d'affichage pour informer les salariés de l'accord de participation

Qu'est-ce que l'intéressement ? Définition, prime d'intéressement...

Il s'agit d'associer collectivement vos salariés aux résultats ou aux performances de l'entreprise (3). L'intéressement est un dispositif d'épargne salariale qui permet d'encourager vos salariés à réaliser les objectifs de l'entreprise, en leur versant une prime d'intéressement en fonction des résultats réalisés.

Quand mettre en place l'intéressement dans votre entreprise ?

Par principe, quand vous le voulez !

L'intéressement est un dispositif facultatif (3) que vous n'êtes donc pas obligé de mettre en place. C'est en cela qu'il se distingue du dispositif de participation, qui est obligatoire dans les entreprises d'au moins 50 salariés. 

illustration

Découvrez nos solutions dédiées aux entreprises

- Accédez à l'ensemble de notre base documentaire en illimitée (dossiers, modèles, actualités...) pour gérer votre activité
- Contactez un juriste du lundi au vendredi de 9h à 18h
- Accédez à votre convention collective à jour des derniers accords

Qu'est-ce qu'un accord d'intéressement ? Quelle procédure pour le mettre en place ?

Comment négocier et conclure un accord d'intéressement ?

Pour mettre en place l'intéressement dans votre entreprise, vous devez négocier un accord appelé "accord d'intéressement". Il est possible de conclure un tel accord (4) :

  • par convention ou accord collectif de travail ;
  • par accord entre l'employeur et les organisations syndicales représentatives dans l'entreprise ;
  • par accord conclu entre l'employeur et le Comité social et économique (CSE) ;
  • par accord entre l'employeur et les salariés de l'entreprise. Dans ce cas, vous devez proposer un projet d'accord, qui doit ensuite être ratifié par la majorité des deux tiers du personnel. Lorsqu'il existe dans l'entreprise une ou plusieurs organisations syndicales représentatives ou un CSE, la ratification est demandée conjointement par l'employeur et une ou plusieurs de ces organisations ou ce comité.

Il n'y a aucune obligation de consulter le CSE avant de signer un accord d'intéressement, cette obligation existe uniquement concernant certaines décisions unilatérales de l'employeur (voir partie suivante de l'article).

illustration

Modèle d'accord d'intéressement à compléter

Vous avez besoin d'aide pour rédiger un accord d'intéressement ? Découvrez notre modèle prêt à l'emploi conçu par nos juristes expert de Juritravail. 

Mettre en place un régime d'intéressement par décision unilatérale, comment faire ?

L'employeur d'une entreprise de moins de 50 salariés (sans délégué syndical ou CSE ou si, au terme de négociations, aucun accord n'a été conclu), peut aussi mettre en place un régime d'intéressement, par décision unilatérale, pour une durée de 1 à 5 ans. Dans ce cas, l'entreprise ne doit pas être couverte par un accord de branche agréé (4).

Dans le cas d'une entreprise de moins de 50 salariés sans délégué syndical, ni comité social et économique, l'employeur qui instaure un dispositif d'intéressement par décision unilatérale doit en informer les salariés par tous moyens.

Dans le cas d'une entreprise de moins de 50 salariés où il y a eu des négociations qui n'ont mené à aucun accord d'intéressement, l'employeur peut mettre en place l'intéressement par décision unilatérale, s'il respecte les étapes suivantes :

  • il doit établir un procès-verbal de désaccord pour les négociations qui n'ont pas abouti. Ce procès-verbal (PV) doit contenir les propositions respectives qui ont été faites par les parties en dernier lieu ;
  • il doit consulter le CSE sur le projet de régime d'intéressement, au moins 15 jours avant son dépôt auprès de l'autorité administrative (Dreets).

La décision unilatérale qui respecte les étapes indiquées ci-dessus, vaut accord d'intéressement.

Comment se déroule le dépôt d'un accord d'intéressement ?

L'accord, ou la décision unilatérale, doit être déposé à la Dreets (Directions régionales de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités, anciennement appelée DIRECCTE) du lieu où il a été conclu, dans les 15 jours suivant sa date limite de conclusion (date limite pour bénéficier des exonérations fiscales, soit le 1er jour de la 2ème moitié de la période de calcul suivant la date de prise d'effet de l'accord).

Un récépissé de dépôt est délivré. Lorsqu'un avenant à l'accord ou la décision d’intéressement est pris, il doit aussi être déposé pour ne pas perdre les avantages liés aux exonérations de cotisations. L’accord d’intéressement non déposé fait perdre le droit aux avantages fiscaux et sociaux attachés aux primes d’intéressement. 

Il doit être déposé par la partie la plus diligente (souvent, il s'agira de vous, l'employeur) (5).

En pratique, vous pouvez procéder à un dépôt par voie dématérialisée, sur la plateforme de téléprocédure du ministère du travail appelée TéléAccords.

Une fois l'accord déposé, l'URSSAF dispose d'un délai de 5 mois (découpé en 3 mois et 2 mois) pour demander le retrait ou la modification des clauses contraires aux dispositions légales et règlementaires. Au-delà de ce délai, les exonérations sociales sont garanties.

Contenu de l'accord d'intéressement, quels critères ?

L'accord doit se présenter de la manière suivante (6) :

  • identité des parties (de votre entreprise et de l'autre partie signataire) ;
  • préambule rappelant les motifs de l'accord (pourquoi vous l'avez mis en place), la raison du choix du calcul et des critères de répartition du résultat ;
  • période pour laquelle l'accord est conclu ;
  • établissements concernés et bénéficiaires de l'intéressement (les salariés qui pourront en bénéficier) ;
  • modalités d'intéressement retenues ;
  • modalités de calcul (détaillez le calcul, les éléments pris en compte, les plafonds) et les critères de répartition de la prime (répartition selon le temps de présence des salariés, selon le salaire, selon plusieurs critères différents ou répartition uniforme entre tous les salariés) ;
  • dates de versements de la prime d'intéressement ;
  • conditions dans lesquelles le CSE ou une de ses commissions spécialisées (commission intéressement, si elle existe) sera informé sur les conditions d'application de l'accord (quels éléments lui seront communiqués et quand ?) pour lui permettre de suivre la bonne application de l'accord ;
  • procédures choisies pour régler les éventuels différends issus de l'application de l'accord ou de sa révision (par exemple : règlement amiable, personne nommée parmi les membres des délégués du personnel au CSE pour concilier les avis divergents, litige porté devant les juridictions compétentes, etc) ;
  • modalités d'information des bénéficiaires de la prime d'intéressement.
illustration

Une question ?

Vous avez une question sur l'intéressement, la participation, la prime de partage de la valeur, l'épargne salariale ? Ou sur tout autre sujet juridique intéressant votre entreprise ? Posez votre première question gratuitement ! Un juriste expert vous répond en 24 heures !

Comment est calculée la prime d'intéressement prévue dans l'accord ?

L’intéressement varie en fonction des résultats de l’entreprise. Le montant est calculé sur la base d’une formule fixée dans l’accord d’entreprise.

Cependant, il existe un double plafond :

  • le total des primes d’intéressement versées à l’ensemble des salariés bénéficiaires ne peut pas excéder 20% du total des salaires bruts versés,
  • la somme perçue, par un salarié et par an, au titre de l’intéressement ne peut pas dépasser 75% du plafond annuel de la Sécurité sociale.

Quelle est la durée d'un accord d'intéressement ?

1 à 5 ansDurée d'un accord d'intéressement

Les accords d'intéressement sont conclus pour une durée comprise entre 1 et 5 ans. L'accord est automatiquement reconduit (reconduction tacite), si cela est prévu dans l'accord, lors de sa mise en place (4).

L'accord peut faire l'objet d'une renégociation dans les 3 mois qui précèdent la date d'échéance de l'accord, s'il l'autorise.

Avant le 18 août 2022, la durée des accords d'intéressement était comprise entre 1 et 3 ans (et non 5 ans).

Comment informer les salariés de la mise en place de l'intéressement ?

Vous devez remettre une note d'information à tout le personnel de l'entreprise susceptible de bénéficier de l'intéressement (7).

Dans le cadre d'une décision unilatérale dans une entreprise de moins de 50 salariés sans délégué syndical ou CSE, l'employeur doit informer les salariés par tous moyens (4).

Lors du versement de la prime d'intéressement, vous devez remettre à chaque salarié bénéficiaire, une fiche d'information sur le montant de la prime d'intéressement, distincte du bulletin de paie, l'informant notamment des sommes qui lui sont attribuées (8).

illustration

Modèle de fiche d’information du salarié sur montant de la prime d'intéressement

Simplifiez-vous la tâche avec notre modèle de lettre d’information du salarié du montant de la prime d'intéressement, conçu par nos juristes experts chez Juritravail. Gagnez du temps et assurez la conformité juridique de votre notification.

Pourquoi mettre en place un accord d'intéressement ? Avantages ? Imposable ou non ?

Les primes d'intéressement sont exonérées de cotisations de sécurité sociale (9) mais, selon les effectifs de l'entreprise, elles peuvent être soumises au forfait social (10) :

  • les entreprises de moins de 250 salariés ne sont pas soumises au forfait de 20% ;
  • les entreprises de 250 salariés et plus sont soumises au forfait social. 

La prime d'intéressement permet donc d'échapper ou de minimiser la charge que représente la contribution sociale généralisée (CSG).

Vous pouvez déduire les sommes versées au titre de l'intéressement, des bases de calcul de votre impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés (11).

Les sommes que vous verserez dans le cadre de l'intéressement n'étant pas considérées comme des éléments de salaires (12), elles seront également exclues de la base de certaines taxes, telles que la taxe d'apprentissage, sur la participation à la formation continue, sur la participation construction.

Pour le salarié qui décide de la reverser sur un plan d’épargne, elle peut être également exonérée d’impôt sur le revenu en respectant certaines conditions. 

En outre, l'existence d'un intéressement peut vous permettre d'attirer de nouveaux talents au sein de votre entreprise. 

Prime de partage de la valeur (PPV) : obligation de mise en place de l'intéressement pour pouvoir la verser ?

Non, le paiement de la prime de partage de la valeur, (PPV, prime exceptionnelle de pouvoir d'achat, anciennement nommée "Prime Macron") n'est pas conditionnée par l'existence ou non d'un accord d'intéressement. En revanche, le montant maximum versé aux salariés et qui peut être exonéré de cotisations, est plus élevé si un accord d'intéressement existe dans l'entreprise.

En effet, il existe un double-plafond. Pour les entreprises qui ont signé un accord d'intéressement, le plafond d'exonération de la prime de partage de la valeur est plus élevé (il est de 6.000 euros au lieu de 3.000 euros pour les entreprises qui n'ont pas d'accord d'intéressement) (13)

Pourquoi et comment attribuer des primes à vos salariés ? L'essentiel en vidéo

illustration

Découvrez aussi : 

Dossiers et modèles à télécharger par les professionnels :
Primes et avantages : respecter les conditions de versement aux salariés
Compte Épargne-Temps (CET) dans l'entreprise : fonctionnement et mise en place
Plan d'épargne retraite : versements, déblocages anticipés, fiscalité
Calcul des cotisations sociales : tout savoir pour bien gérer

Dossiers pour les particuliers : 
Épargne salariale : tout comprendre pour bien en profiter
Compte épargne temps (CET) : avantages, capitalisation, utilisation...
Primes, avantages en nature, primes exceptionnelles : comment négocier ?

Articles :
Primes, épargne salariale, avantages : quelles sont les conditions de versement pour les dirigeants (gérants, présidents, TNS...) ?
Prime inflation de 100 euros : sera-t-elle versée en 2025 ?
Comment fixer la rémunération de votre salarié : paiement, salaire minimum, SMIC, primes...
- Prélèvement à la source : tout savoir sur l'impôt retenu sur le salaire
Compte épargne-temps : définition, avantages et inconvénients
Guide pratique pour la mise en place du compte épargne-temps (CET)
Mettre en place des primes pour ses salariés : types, montants, exonérations...
Calendrier RH 2025 : planifiez votre année & respectez vos échéances
Rémunération des salariés 2025 : définition et réglementation
Plan d'épargne retraite : définition, mise en place et avantages
Accord de performance collective : définition et mise en place
Quelles sont les obligations des entreprises selon les effectifs : moins de 10, de 50 ou plus de 50 salariés ?

Références :

(1) Article 5 Loi n°2023-1107 du 29 novembre 2023 portant transposition de l'accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l'entreprise
(2) Article L3346-1 du Code du travail et loi n°2023-1107 du 29 novembre 2023 portant transposition de l'accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l'entreprise

(3) Article L3312-1 du Code du travail
(4) Article L3312-5 du Code du travail
(5) Article D3313-1 du Code du travail
(6) Articles L3313-1 et L3313-2 du Code du travail
(7) Article D3313-8 et du Code du travail
(8) Article D3313-9 du Code du travail
(9) Article L3312-4 du Code du travail et article L242-1 du Code de la sécurité sociale
(10) Article L137-15 du Code de la sécurité sociale 
(11) Article L3315-1 du Code du travail et Article 237 ter A du Code général des impôts
(12) Article L3312-4 du Code du travail
(13) 
Loi n°2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat