L’appréhension du harcèlement sexuel au travail a été introduite pour la première fois dans le Code du travail en 1992. Elle ne concernait que les abus d’autorité exercés par les supérieurs hiérarchiques. Depuis, la définition du harcèlement sexuel a été élargie à plusieurs reprises. Plus récemment, la Loi du 2 août 2021 (L. n° 2021-1018) renforcent la prévention en santé au travail qui entrera en vigueur le 31 mars 2022.
Le harcèlement sexuel est un délit (article 222-33 du Code pénal) puni pénalement. Le Code du travail prévoit également des dispositifs de protection spécifiques des salariés, des agents publics, stagiaires ou personnes en formation, sans distinction.
L’article L1153-1 du Code du travail définit le harcèlement sexuel au travail comme « des propos ou comportements à connotation sexuelle ou sexiste répétés qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ». Le terme « sexiste » a été ajouté par la Loi de 2021 précitée, ainsi que trois alinéas relatifs à la pluralité d’auteurs de harcèlement sexuel. Cette réforme vise à aligner la définition du harcèlement sexuel au travail avec le harcèlement sexuel au sens de l’article 222-33 du Code pénal.
Elles s’inscrivent dans le mouvement de la lutte contre les violences sexuelles et sexistes faites aux femmes. Le mouvement #metoo et la lutte pour l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes s’inscrivent dans la même mouvance. Néanmoins, ces évolutions justifiées par leur importance sociologique et symbolique, ne modifient que peu leur portée en Droit social.
Ajout du sexisme au sein de la définition du harcèlement sexuel
Jusqu’alors, le sexisme était un comportement « discriminatoire » condamné sous une forme de harcèlement moral (Crim., 11 juill. 2017, n°16-85.214). La Loi du 2 août 2021 prévoit désormais que le sexisme entre dans le champ du harcèlement sexuel. Cette réforme vise notamment à sanctionner les « outrages sexistes » au travail.
Cependant, la portée en droit social est relative car les harcèlements sexuel, et moral, connaissent des régimes juridiques similaires :
– La prévention du harcèlement sexuel
L’employeur est soumis à une obligation de sécurité, il doit donc empêcher la survenance d’agissements de harcèlement sexuel ou moral, y mettre un terme et les sanctionner. Ce qui signifie qu’en cas d’agissements de harcèlement avérés, il peut être poursuivi et devoir réparer tous les préjudices subis par la victime ( soc. 17-5-2017 n° 15-19.300). Quelques mesures spécifiques d’informations sont prévues pour le harcèlement sexuel.
– La preuve du harcèlement sexuel au travail
La charge de la preuve devant le juge prud’homal est allégée en ce que le demandeur doit seulement établir des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement. Cependant, le harcèlement sexuel peut être reconnu à partir d’un fait unique (Soc. 17 mai 2017, n°15-19.300) contrairement au harcèlement moral nécessitant une répétition.
– Les sanctions
Pénalement les harcèlements sexuel et moral sont des délits punis de 2 ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende mais il existe des circonstances aggravantes pour le harcèlement sexuel pouvant porter la répression à 3 ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende. En droit du travail, les sanctions disciplinaires pouvant être prononcées à l’encontre du salarié auteur du harcèlement moral ou sexuel sont les mêmes.
Ajout de la possible pluralité d’auteurs de harcèlement sexuel au travail
Le nouveau texte reprend les règles de l’article 222-33 du Code pénal concernant les divers auteurs de harcèlement sexuel au travail dans le but de condamner « le harcèlement de rue » ou le « raid numérique ». Le harcèlement sexuel, selon le Code du travail, peut désormais être constitué par différents auteurs, avec ou sans concertation, mais ayant conscience que leurs propos ou comportements caractérisent une répétition ou lorsque l’un deux est l’instigateur.
En réalité, la pluralité d’auteurs, les complices ou coauteurs, pouvaient déjà être reconnus et sanctionnés par le juge prud’homal puisque la définition du harcèlement sexuel n’identifie pas l’auteur de celui-ci. Cette possibilité est déjà admise, également pour le harcèlement moral, notamment en cas de harcèlement dit « managérial » lié aux méthodes de gestion utilisées par l’employeur (Soc., 10 nov. 2009, n°07-45.321) pour lequel, l’auteur ou les auteurs ne doivent pas nécessairement être en contact direct avec le salarié victime.
Néanmoins, cette réforme permet de clarifier les situations pouvant donner lieu à harcèlement sexuel au travail. Elle permet une cohérence entre le droit pénal et le droit du travail et sert d’orientation aux acteurs du droit du travail, tels que les employeurs, les salariés, les instances de représentation du personnel ou encore les juges prud’homaux.
Dossier très complet et informatif