Un salarié protégé peut-il conclure une rupture conventionnelle ? 

Oui : tout salarié, salariés protégés compris, peut conclure une rupture conventionnelle (RC) de son CDI afin de mettre un terme à son contrat de travail s'il trouve un terrain d'entente avec son employeur. Il s'agit d'une rupture amiable du contrat de travail.

🔍 Pour rappel, certains salariés bénéficient, du fait de leur statut et de leurs fonctions particulières au sein de l'entreprise, d'une protection particulière, destinée à empêcher l'employeur d'adopter une attitude discriminante à leur égard. 

À ce titre, sont par exemple considérés commes des salariés protégés (1)

  • les délégués syndicaux ;
  • les membres élus à la délégation du personnel du comité social et économique (CSE) ;
  • les représentant syndicaux au CSE ;
  • les représentants de proximité ;
  • etc.

Attention néanmoins ! Si la possibilité de conclure une rupture conventionnelle est ouverte au salarié protégé, les étapes à respecter ne sont pas totalement les mêmes que pour celle d'un salarié non protégé.

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Demande, délais, procédure... Notre dossier revient en détail sur toutes les étapes de la procédure afin de l'appréhender sereinement en tant que salarié protégé !
Inclus : 21 questions-réponses, 1 fiche explicative et 4 modèles de documents 

Quelles différences entre la procédure de rupture conventionnelle de droit commun et celle relative au contrat de travail d'un salarié protégé ? Des garanties supplémentaires sont-elles prévues ?

La procédure de rupture conventionnelle avec un salarié protégé est globalement identique à celle applicable à un salarié ordinaire.

Néanmoins, plusieurs paramètres particuliers sont propres à ce type de procédure, notamment :

  • d'abord, il peut être nécessaire, dans certains cas, que l'avis du CSE sur le projet de rupture conventionnelle soit recueilli au préalable ;
  • ensuite, il est obligatoire d'obtenir l'autorisation de l'inspecteur du travail, qui a 2 mois pour se prononcer (et non 15 jours comme la Dreets sollicitée pour homologuer une convention de rupture conventionnelle classique).

Quelles sont les étapes et les règles spécifiques applicables en matière de rupture conventionnelle du contrat de travail d'un salarié protégé ?

1. Négocier le principe de la rupture conventionnelle et ses conditions (indemnité, date de départ)

Attention au libre consentement des parties

Comme tout salarié lambda, les salariés protégés doivent librement consentir à rompre leur contrat de travail par le biais d'une rupture conventionnelle (2).

Si elle paraît simple, cette condition relative à un consentement libre et éclairé des partis est néanmoins indispensable, et sera vérifiée par l'inspecteur du travail pour autoriser ou au contraire refuser la rupture conventionnelle du contrat de travail du salarié protégé.

De fait, l'employeur ne peut pas faire pression sur le salarié (protégé ou non) afin de le faire signer une rupture conventionnelle. 

L'organisation d'un ou plusieurs entretien(s) de négociation (assistance possible du salarié)

Puisqu'elle est le fruit d'une négociation, la rupture conventionnelle du salarié protégé doit faire l'objet d'un ou de plusieurs entretiens préalables avec l'employeur dans le but d'en fixer les termes et les modalités (3)

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Un entretien au minimum est donc requis pour que la procédure soit valide. En revanche, les parties sont libres de se rencontrer plus souvent si besoin est.

Comme pour la procédure classique, le salarié protégé peut se faire assister pendant ces entretiens :

  • soit par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise (salarié titulaire d'un mandat syndical, membre d'une institution représentative du personnel (IRP), ou tout autre salarié) ;
  • ou, s'il n'y a pas d'IRP au sein de l'entreprise, par un conseiller du salarié choisi sur une liste dressée par l'autorité administrative compétente.

🔍 Si le salarié est assisté, l'employeur peut faire le choix de recourir également à une assistance.

Quelle indemnité doit être versée au salarié protégé qui signe une rupture conventionnelle ?

Le salarié protégé ne bénéficie pas d'une indemnité de rupture conventionnelle différente du fait de son statut.

De façon classique, son montant est donc négociable, mais ne peut pas être inférieur à celui de l'indemnité légale de licenciement (4).

💡 En pratique, les parties vont généralement négocier ce montant en fonction de l'ancienneté du salarié, de sa contribution à l'entreprise, etc.

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2. Dans certains cas, consultation obligatoire du CSE pour avis avant la signature de la RC

Il s'agit ici d'une des différences avec la procédure classique : une fois que les parties ont négocié, elles ne signent pas la convention de rupture mais doivent d'abord obtenir, dans certains cas seulement, l'avis préalable du CSE sur le projet.

En effet, conformément à ce qui est prévu pour le licenciement d'un salarié protégé, le CSE doit obligatoirement être consulté avant toute prise de décision définitive dès lors que la rupture conventionnelle concerne certains salariés protégés, à savoir (5)

  • les membres élus à la délégation du personnel du CSE (titulaires ou suppléants) ;
  • les représentants syndicaux au CSE ;
  • les représentant de proximité.

NB : le Conseil d'Etat a apporté une précision de taille sur cette consultation obligatoire, dont le détail est apporté dans notre dossier spécial !

Il est à noter que les parties ne sont pas obligées de suivre l'avis du CSE. En revanche, l'inspecteur du travail pourra être amené à effectuer des recherches plus poussées s'il s'avère que le CSE est défavorable au projet de rupture conventionnelle.

💡 Nous recommandons aux parties de se mettre d'accord entre elles avant de soumettre le projet de rupture conventionnelle au CSE. En effet, le comité sera plus enclin à donner un avis favorable si le projet est réfléchi et abouti.

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Modèle de lettre : convocation du CSE pour avis sur la RC d’un salarié protégé

Employeurs, découvrez notre modèle prêt-à-l'emploi de convocation du CSE pour avis sur le projet de rupture conventionnelle d'un salarié protégé !

3. Demande d'autorisation de la rupture conventionnelle du CDI du salarié protégé à l'inspecteur du travail 

La rupture conventionnelle d'un salarié protégé est soumise à l'autorisation de l'inspecteur du travail (6)."

Article L1237-15 du Code du travail

Homologation ou autorisation d'une RC : quelles différences ?

Autre différence avec la procédure classique de rupture conventionnelle d'un salarié non protégé, les parties doivent demander l'autorisation de la rupture conventionnelle à l'inspection du travail.

De façon synthétique, l'homologation requise dans le cadre d'une rupture conventionnelle classique consiste en une simple vérification du respect de la procédure, tandis que l'autorisation requise dans le cas de la rupture conventionnelle du contrat de travail d'un salarié protégé désigne un examen plus poussé de la part de l'inspecteur du travail (contrôle des informations relatives aux parties, de l'ancienneté du salarié, des éléments de rémunération pris en compte dans le cadre du calcul de l'indemnité spécifique de rupture conventionnelle, de la tenue d'entretiens préparatoires, etc.). 

🔍 Découvrez notre article dédié : Comment demander l'homologation d'une rupture conventionnelle ?

Comment formuler la demande d'autorisation à l'inspecteur du travail ? Peut-on faire la demande en ligne ? Où envoyer le formulaire CERFA adéquat ?

Après consultation éventuelle du CSE, employeur et salarié peuvent signer le formulaire Cerfa de rupture conventionnelle salarié protégé (Cerfa n°14599*01).

Ce formulaire, spécifique aux salariés protégés, comporte les données suivantes :

  • informations relatives à l'entreprise et au salarié ;
  • informations sur le déroulement de la procédure (les dates d'entretiens, assistance des parties) ;
  • date éventuelle de consultation du CSE, qu'il ne faut pas oublier de remplir, ainsi que le sens de l'avis qui a été rendu (favorable, défavorable, abstention par exemple). Cette mention n'existe pas pour la procédure de rupture conventionnelle d'un salarié non protégé. De plus, cette mention n'a pas à être rempli si la consultation du CSE n'est pas requise ;
  • convention de rupture (avec précisions sur l'indemnité de rupture conventionnelle et la date de fin/rupture du contrat de travail) ;
  • date et la signature des parties ;
  • date de fin du délai de rétractation ;
  • mention de la nécessité d'obtenir l'autorisation de l'inspecteur du travail (cette mention apparaît uniquement pour la rupture conventionnelle d'un salarié protégé).

💡 Une fois le délai de rétractation de la rupture conventionnelle de 15 jours calendaires suivant la signature de la convention écoulé, si aucune partie ne s'est rétractée, celles-ci peuvent envoyer le Cerfa (formulaire n°14599*01) de demande d'autorisation à l'Inspecteur du travail dont dépend l'établissement dans lequel le salarié est employé (7).

NB : la demande doit également être accompagnée du PV de la réunion du CSE.

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Attention !

Contrairement à la procédure d'homologation de la rupture conventionnelle pour un salarié ordinaire, il n'est pas possible de faire la demande d'autorisation de rupture conventionnelle du contrat de travail d'un salarié protégé sur le site internet TéléRC (téléservice). La demande se fait donc via le formulaire papier

Que vérifie l'inspecteur du travail dans le cadre de l'octroi de son autorisation ?

Lors de son examen, l'inspecteur du travail procède à une enquête contradictoire, et donne  la possibilité au salarié de présenter ses observations écrites et orales s'il le souhaite (8).

L'inspecteur s'assure du libre consentement de chaque partie et l'absence de lien entre la rupture conventionnelle et le mandat représentatif du salarié.

🔍 Exemple sur la liberté de consentement : le Conseil d'État a par exemple jugé que "l’existence de faits de harcèlement moral ou de discrimination syndicale n'est pas de nature, par elle-même, à faire obstacle à ce que l'inspection du travail autorise une rupture conventionnelle, sauf à ce que ces faits aient, en l'espèce, vicié le consentement du salarié" (9).

Calendrier : un délai de 2 mois pour que l'inspection du travail rende son avis

L'inspecteur dispose de 2 mois, à compter de la réception de votre demande d'autorisation, pour rendre sa décision (8).

À défaut de réponse dans le délai de 2 mois, la demande d'autorisation est considérée comme rejetée.

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Quelles conséquences lorsque la procédure de rupture conventionnelle propre au salarié protégé n'est pas respectée ? Est-il possible, a posteriori, de contester la décision de l'inspection du travail ?

💡Lorsque la rupture conventionnelle est autorisée par l'inspecteur du travail, la rupture du contrat de travail ne peut intervenir, au plus tôt, que le lendemain du jour de l'autorisation administrative.

En revanche, si l'inspection du travail considère que le consentement du salarié protégé n'a pas été libre, ou que le CSE n'a pas été convoqué pour rendre un avis, il peut ne pas autoriser la rupture conventionnelle pour non-respect de la procédure applicable.

Quelle que soit la situation, salarié comme employeur peuvent exercer un recours afin de contester sa décision (10) :

  • soit devant le ministre du Travail (recours hiérarchique) ;
  • soit devant le tribunal administratif (recours contentieux).

🔍 Dans le cas où la rupture conventionnelle a été autorisée par l'autorité administrative, mais que l'une des parties souhaite finalement contester cette rupture (par exemple, le salarié protégé considère qu'il a fait l'objet d'un harcèlement moral pour signer cette convention), alors celle-ci doit s'adresser au juge administratif.

En raison de la séparation des pouvoirs, le juge judiciaire est en effet incompétent en la matière, même si le litige porte sur le consentement du salarié (11).

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Références :

(1) Articles L2411-1 et L2411-2 du Code du travail
(2) Article L1237-11 du Code du travail
(3) Article L1237-12 du Code du travail
(4) Article L1237-13 du Code du travail
(5) Article L2421-3 du Code du travail
(6) Article L1237-15 du Code du travail
(7) Articles R2421-1 et suivants du Code du travail
(8) Articles R2421-19, R2421-22, R2421-11 et R2421-4 du Code du travail (enquête contradictoire et délai de 2 mois)
(9) CE, 13 avril 2023, n°459213
(10) Article R2422-1 du Code du travail et Circulaire DGT n° 07/2012 du 30 juillet 2012 relative aux décisions administratives en matière de rupture ou de transfert du contrat de travail des salariés protégés
(11) Cass. Soc. 20 décembre 2017, n°16-14880