Que dit la loi sur l'installation de caméras de surveillance au travail ?

Vous pouvez équiper votre entreprise de caméras de vidéosurveillance pour assurer la sécurité des locaux, des biens et des personnes. Vous pouvez également le faire dans le cadre d'un contrôle de l'activité des salariés, mais dans des conditions très strictes (1).

Vous devez avoir un motif valable

Vous devez pouvoir justifier d'un intérêt légitime à la mise en place d'un dispositif de vidéosurveillance. L'objet de la surveillance de vos salariés doit être licite. Le dispositif doit être proportionné à la finalité poursuivie et ne doit pas être excessif au vu de la liberté des salariés. Le but ne doit pas être d'espionner les salariés.

Vous devez respecter la vie privée des salariés

Sur le lieu de travail, vos salariés ont droit au respect de leur vie privée et de leurs libertés individuelles (2). C'est pourquoi ils ne doivent pas être sous surveillance générale, constante et permanente.

Pour illustrer cela, un exemple : votre salarié manipule de l'argent. La caméra peut filmer son activité pour des raisons de sécurité, mais elle doit filmer la caisse plutôt que le salarié lui-même. Il ne faut pas que le salarié soit sous surveillance permanente. 

Ainsi, vous ne pouvez installer des caméras pour filmer l'accès aux vestiaires, aux sanitaires, salles de pauses. Ceci est assimilé à une atteinte à la vie privée des salariés et n'est pas justifié par un impératif de sécurité.

Il est donc très important de bien choisir les emplacements des caméras de vidéosurveillance et de ne pas s'en servir pour espionner vos salariés.

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Tout savoir sur la vidéosurveillance en entreprise !

Notre dossier vous explique toutes les règles à respecter et les formalités à accomplir pour être en conformité et éviter les sanctions.

Inclus : 22 questions/réponses, 2 modèles de lettres et 2 fiches récapitulatives.

Quelles sont les obligations d'informations de l'employeur en matière de télésurveillance des salariés ?

Information et consultation des représentants du personnel

Si l'avis du CSE ne vous empêche pas de mettre en place la vidéosurveillance dans votre entreprise, sachez que l'absence de consultation est constitutive d'un délit d'entrave.

Les membres du Comité social et économique (CSE) doivent être informés et consultés avant la mise en place d'un dispositif de vidéosurveillance (3).

En effet, tous moyens ou techniques permettant le contrôle de l'activité des salariés doivent faire l'objet d'une information et consultation du CSE. Le CSE rendra un avis sur la mise en place du dispositif. Cet avis ne vous lie pas, c'est-à-dire que même s'il est négatif, vous pourrez mettre en place le dispositif.

Doit-on déclarer une caméra de surveillance ? Déclaration à la Commission Nationale de l'Informatique et des Libertés (CNIL) ?

Caméras installées dans un lieu non ouvert au public :

Vous n'avez pas à faire de déclaration à la CNIL. En effet, cette obligation a été supprimée depuis le 25 mai 2018 avec l'entrée en application du RGPD (Règlement Général sur la Protection des Données).

En revanche, vous avez quelques formalités à respecter :

  • si vous avez désigné un délégué à la protection des données (DPO), vous devez l'associer à la mise en place des caméras et lui demander conseil ;
  • vous devez vérifier si vous êtes dans l'obligation de réaliser une analyse d'impact sur la protection des données (auquel cas, vous devrez également y associer votre DPO) ;
  • vous devez inscrire le dispositif dans votre registre de traitement des données (4).

Caméras installées dans un lieu ouvert au public :

Vous ne pouvez mettre en place un dispositif de vidéosurveillance qu'après avoir obtenu l'accord de la préfecture de votre département.

Comment informer les salariés qu'ils sont filmés ?

Pour que le dispositif de vidéosurveillance soit licite (et ainsi que vous puissiez vous en servir comme moyen de preuve), vous devez impérativement en avoir informé les salariés concernés.

Information par voie d'affichage :

Vous devez informer les salariés par voie d'affichage dans les locaux soumis à vidéosurveillance.

Information individuelle :

Vous devez en outre informer individuellement chaque salarié concerné. L'information peut être faite de diverses manières. Pour en savoir plus, reportez-vous à notre dossier.

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Pendant combien de temps pouvez-vous conserver les images ?

C'est à vous d'estimer la durée de conservation des images (sans dépasser 1 mois) selon l'objectif poursuivi par la mise en place de la vidéosurveillance. Vous devez impérativement respecter le délai que vous avez annoncé aux salariés.

En principe, quelques jours ou semaines suffisent. En cas d'incident, vous visionnerez et extrairez rapidement les images. Vous pourrez alors engager les procédures de sanction disciplinaire si nécessaire.

Qui peut visionner les images de vidéosurveillance en entreprise ?

C'est à vous de décider qui pourra avoir accès aux images. Il peut donc s'agir uniquement de vous, employeur, mais aussi de toute personne que vous habiliterez. L'accès aux images doit être sécurisé.

À retenir : vous pouvez installer des caméras de surveillance pour contrôler vos salariés, mais il est indispensable de les informer préalablement

Quelle utilisation des preuves récoltées via la vidéosurveillance ?

Si vous soupçonnez des comportements ayant un impact dommageable sur l'entreprise, les vidéos issues d'un système de vidéoprotection peuvent confirmer ou infirmer vos soupçons.

Exemple : si vous constatez des anomalies dans vos stocks de marchandises et soupçonnez des vols de la part de vos salariés, la vidéosurveillance peut intervenir pour prouver l'existence de fautes professionnelles susceptibles de sanctions.

En effet, la jurisprudence de la Cour de cassation juge recevables ces éléments tant que "la production des données personnelles issues du système de vidéosurveillance était indispensable à l'exercice du droit à la preuve de l'employeur" (7). 

Attention : le recours à ce mode de preuve pour justifier un licenciement doit nécessairement mettre en balance le droit du salarié au respect de sa vie privée et le droit de son employeur au bon fonctionnement de l'entreprise. Le but poursuivi doit en outre être légitime.

Pour en savoir plus : Litige devant le Conseil des prud'hommes (CPH) : pouvez-vous utiliser un élément de preuve déloyal ?

Références :

(1) Cass. Soc. 07 juin 2006 : n°04-43866
(2) Article L1121-1 du Code du travail et Article 9 du Code civil
(3) Article L2312-38 du Code du travail
(4) Article 30 du RGPD
(5) Article L1222-4 du Code du travail
(6) Cass. Soc. 4 juillet 2012, n°11-30266
(7) Cass. soc. 14 février 2024, n° 22-23.073