Peut-on licencier une femme enceinte ou en congé maternité ?
Quelle protection légale si l'employeur souhaite vous licencier ?
Que ce soit avant votre congé maternité, pendant ou après celui-ci, votre employeur ne peut pas rompre votre contrat de travail si vous êtes en état de grossesse médicalement constaté, et pendant l'intégralité des périodes de suspension du contrat de travail auxquelles vous avez droit (1), à savoir :
- au titre du congé de maternité, que vous usiez ou non de ce droit ;
- au titre des congés payés pris immédiatement après le congé de maternité ;
- ainsi que pendant les 10 semaines suivants l'expiration de ces périodes.
10 semainespériode de protection contre le licenciement
Il existe 2 niveaux de protection (1) :
- le niveau de protection très fort, qui s'applique pendant le congé maternité et les congés payés accolés à celui-ci, car le licenciement est impossible même en cas de faute grave ou si le contrat est dans l'impossibilité d'être maintenu ;
- le niveau de protection moindre durant la période précédant le congé maternité, puis durant 10 semaines à l'issue de celui-ci (ou des congés payés qui y font suite) en raison de la possibilité de licencier en cas de faute grave notamment.
Si votre employeur vous a licenciée alors qu'il ne vous savait pas enceinte, vous disposez d'un délai de 15 jours pour lui envoyer votre certificat médical et demander l'annulation du licenciement (2).
Le cas échéant, vous devez envoyer votre certificat médical par lettre recommandée avec avis de réception (3).
Cette interdiction est fondée sur le fait que ce licenciement serait discriminatoire (4).
Notez que le congé d'adoption suspend également le contrat de travail. Ainsi, la salariée concernée bénéficie de la même protection contre le licenciement que celle en congé maternité. Néanmoins, cette protection ne fait pas obstacle à l'échéance du contrat de travail à durée déterminée (CDD) (5).
Attention, le non-renouvellement d'un CDD ne peut pas être motivé par votre état de grossesse, toujours en raison de son caractère discriminatoire.
Un allongement de la durée de protection légale est-il envisageable ?
Par principe, la durée légale de protection ne peut pas perdurer au-delà de 10 semaines à compter de la fin du congé maternité ou du terme de la période de congés payés suivant immédiatement le congé maternité.
L'état de grossesse pathologique (soit une grossesse à risque nécessitant une mise au repos supplémentaire avant ou après l'accouchement) rallonge néanmoins le congé maternité, et donc votre durée de protection (6).
D'autres cas d'allongement sont possibles, notamment en cas de grossesse multiple (7) (comme la naissance de jumeaux). Enfin, d'autres événements peuvent impacter la durée du congé, comme par exemple le décès d'un enfant.
Tel n'est en revanche pas le cas de l'allaitement, du point de vue de la loi. Des congés dits d'allaitement peuvent néanmoins être créés par votre convention collective, à laquelle il est nécessaire de vous reporter.
Est-il possible de licencier une salariée en raison d'un arrêt maladie durant la grossesse ou pendant le congé maternité ?
Le licenciement d'une salariée enceinte en raison d'un arrêt maladie durant sa grossesse est impossible en soi car il serait lié à son état de santé (4).
L'enjeu est de déterminer si cet arrêt est de nature pathologique :
- en cas d'arrêt de travail pathologique (6) : la période de protection est prolongée d'autant dans la limite de 2 semaines ;
- en cas d'arrêt de travail non pathologique (8) : la période de protection de 10 semaines n'est pas impactée.
Existe-t-il des exceptions ? Quand peut-on licencier une femme enceinte pour faute grave ou licenciement économique ?
Il existe 2 exceptions à cette règle. Votre employeur peut en effet rompre votre contrat de travail s'il justifie (1) :
- d'une faute grave de votre part, non liée à l'état de grossesse ;
- ou de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à la grossesse ou à l'accouchement, ou à l'arrivée de l'enfant.
Dans les deux cas, la rupture du contrat de travail ne peut prendre effet ou être notifiée pendant les périodes de suspension du contrat de travail au titre du congé maternité (et des congés payés éventuellement accolés).
En dehors de ces 2 cas, votre employeur ne peut pas vous licencier et vous sortir de l'effectif de l'entreprise. S'il méconnaît cette règle, la procédure de licenciement est nulle. Vous pouvez alors saisir le Conseil de prud'hommes.
En cas de licenciement nul, vous pouvez demander à être réintégrée au sein de l'entreprise (9). En outre, vous pouvez réclamer une indemnité correspondant à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre votre licenciement et votre réintégration, dans la limite du montant des salaires dont vous avez été privé.
Pour aller plus loin, consultez notre article : Licenciement pour faute grave : tout savoir sur la procédure
S'agissant du licenciement économique, il est également concerné par le plus fort niveau de protection évoqué ci-dessus (10). La protection est alors dite absolue, puis elle devient relative par application du deuxième niveau de protection.
Peut-on signer une rupture conventionnelle pendant un congé maternité ?
Il est possible de solliciter ou de signer une rupture conventionnelle pendant un congé maternité, sauf en cas de fraude ou de vice du consentement (par exemple en cas de violence) (12).
Ce type de rupture peut en effet être valablement conclue au cours des périodes de suspension du contrat de travail liées au congé de maternité, ainsi que pendant les quatre semaines suivant l'expiration de ces périodes.
Références :
(1) Articles L1225-4 et L1225-4-1 du Code du travail
(2) Article L1225-5 du Code du travail
(3) Article R1225-2 du Code du travail
(4) Articles L1132-1 et L1132-4 du Code du travail
(5) Article L1225-38 du Code du travail
(6) Article L1225-21 du Code du travail
(7) Article L1225-18 du Code du travail
(8) Cass. Soc., 8 juillet 2015, n°14-15979
(9) Cass. Soc., 17 février 2010, n°08-45640
(10) Cass. Soc., 1er février 2017, n°15-26250
(11) Cass. Soc., 27 septembre 2023, n°21-22937
(12) Cass. Soc., 25 mars 2015, n°14-10149
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