Le licenciement pour inaptitude au travail d'un salarié en CDI ouvre-t-il droit à une prime de licenciement ?
L'inaptitude au travail ouvre droit à une indemnité de licenciement pour inaptitude.
Pour la calculer, il convient, dans un premier temps, de définir si l'inaptitude est d'origine professionnelle (suite à un accident du travail ou une maladie professionnelle) ou non professionnelle (suite à un accident de la vie courante ou une maladie non professionnelle). En effet, selon l'origine de l'inaptitude, le calcul de l'indemnité ne sera pas le même.
À noter : la reconnaissance de l'inaptitude d'un salarié suppose le respect d'une procédure et d'obligations pour l'employeur. Ne pas les respecter comporte des risques.
➡ À lire en ce sens : Les pièges du licenciement pour inaptitude professionnelle : comment les éviter ?
Quel est le montant des indemnités en cas de licenciement pour inaptitude non professionnelle ?
En cas de licenciement pour inaptitude non professionnelle, le salarié a droit à une indemnité dont le montant est égal à l'indemnité légale de licenciement. Si l'origine de l'inaptitude est professionnelle, le montant de cette indemnité est doublé.
Indemnité légale de licenciement : base de calcul, salaire de référence, brut ou net ?
8 mois d'ancienneté
Le licenciement pour inaptitude d'origine non professionnelle ouvre droit à l'indemnité légale de licenciement (1). Pour en bénéficier, le salarié doit justifier d'au moins 8 mois d'ancienneté.
➡ Vous êtes salarié ? Cet article devrait vous intéresser : Indemnité de licenciement : comment calculer combien vous toucherez en fonction de l'ancienneté ?
Les modalités de calcul de cette indemnité sont basées sur la rémunération brute que le salarié percevait avant la rupture de son contrat de travail (ou avant l'arrêt maladie, en cas d'arrêt) (1).
Le salaire de référence pris en compte pour calculer le montant de la prime de licenciement pour inaptitude non professionnelle est déterminé en prenant en compte, selon la formule la plus avantageuse pour le salarié :
- soit la moyenne mensuelle des 12 derniers mois précédant le licenciement (ou précédant l'arrêt de travail) ;
- soit la moyenne mensuelle des 3 derniers mois : les primes et gratifications exceptionnelles ou annuelles sont alors prises en compte proportionnellement au temps de travail effectué. Lorsqu'une prime annuelle a été versée au salarié, il faut ajouter 1/12ème du montant de la prime à chacun des 3 derniers mois de référence.
💡 Toutefois, le salaire de référence à prendre en compte quand le salarié a été en arrêt de travail pour maladie au cours des derniers mois, est celui des 12 ou 3 derniers mois précédant l'arrêt maladie (et non précédant la date de licenciement). La formule la plus avantageuse pour le salarié sera retenue. Les arrêts maladie ont donc un impact sur le calcul des indemnités de licenciement pour inaptitude.
La convention collective peut prévoir une indemnité conventionnelle de licenciement plus favorable.
Indemnité compensatrice de congés payés et absence d'indemnité compensatrice de préavis
Par ailleurs, le salarié peut également toucher une indemnité compensatrice de congés payés, s'il n'a pas liquidé la totalité de ses congés payés acquis, avant son départ de l'entreprise.
En revanche, le salarié licencié pour inaptitude non professionnelle ne peut pas prétendre à une indemnité compensatrice de préavis (3) (sauf disposition conventionnelle contraire). En effet, dans le cadre de l'inaptitude, le salarié n'est plus apte à occuper l'emploi qu'il exerçait et donc, il ne peut pas exécuter son préavis.
💡 Le préavis est pris en compte pour le calcul de l'indemnité de licenciement. En effet, la durée du préavis entre dans le calcul de l'ancienneté nécessaire, en ce qui concerne le calcul de l'indemnité de licenciement pour inaptitude. Exemple : si le salarié a travaillé 2 ans et que son préavis devait être de 2 mois : même s'il n'est pas exécuté, l'indemnité de préavis sera calculée pour une ancienneté de 2 ans et 2 mois. |
Quel est le montant des indemnités en cas de licenciement pour inaptitude professionnelle ?
Indemnité spéciale de licenciement : quelle indemnité en cas de licenciement pour inaptitude d'origine professionnelle ?
L'indemnité de licenciement en cas d'inaptitude d'origine professionnelle est une indemnité spéciale de licenciement, d'un montant au moins égal au double de l'indemnité légale de licenciement (4). Pour en savoir plus sur le mode de calcul et le salaire de référence, référez-vous à la partie précédente de cet article, sur l'indemnité légale de licenciement.
L'indemnité spéciale de licenciement pour inaptitude professionnelle est égale au double de l'indemnité légale de licenciement.
L'indemnité spéciale de licenciement est versée sans conditions d'ancienneté.
Mais, là encore, la convention collective peut prévoir une indemnité conventionnelle plus favorable au salarié (donc plus élevée).
Comme pour le licenciement pour inaptitude non professionnelle, le préavis est pris en compte pour le calcul de l'ancienneté, pour calculer l'indemnité de licenciement (voir la partie précédente de cet article).
Indemnité compensatrice de congés payés et indemnité égale à l'indemnité compensatrice de préavis
Le salarié licencié pour inaptitude professionnelle peut également bénéficier de l'indemnité compensatrice de congés payés.
Au contraire de l'inaptitude non professionnelle, la rupture du contrat pour inaptitude professionnelle donne droit au salarié à une indemnité d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis. Ce n'est pas une indemnité compensatrice de préavis, mais une indemnité d'un montant égal.
Comment calculer la prime de licenciement en cas d'inaptitude professionnelle ou non professionnelle ? Exemples pratiques
Exemple de calcul de l'indemnité légale de licenciement pour inaptitude non professionnelle selon l'ancienneté
- 👩 Samia a 9 ans d'ancienneté et perçoit 2.000 euros brut par mois
➞ Le calcul est le suivant : (2.000€ x 1/4) x 9 = 4.500€.
Le montant de l'indemnité légale de licenciement pour inaptitude non professionnelle de Marine est de 4.500 euros.
- 👨 Jean a 12 ans d'ancienneté et perçoit 2.500 euros brut par mois
➞ Le calcul est le suivant : [(2.500€ x 1/4) x 10] + [(2.500€ x 1/3) x 2] = 7.916,67€.
Le montant de l'indemnité légale de licenciement pour inaptitude non professionnelle de David est de 7.916,67 euros.
- 👩 Louise a 4 ans et 5 mois d'ancienneté et perçoit 2.000 euros brut par mois
➞ Le calcul est le suivant : [(2.000€ x 1/4) x 4] + [(2.000€ x 1/4) x 5/12] = 2.208,33€.
Le montant de l'indemnité légale de licenciement pour inaptitude non professionnelle est de 2.208,33 euros.
Exemple de calcul de l'indemnité de licenciement pour inaptitude suite à accident du travail ou maladie professionnelle selon l'ancienneté
- 👩 Pauline a 9 ans d'ancienneté et perçoit 2.000 euros brut par mois
➞ Le calcul est le suivant : [(2.000€ x 1/4) x 9] x 2 = 9.000€.
Le montant de l'indemnité spéciale de licenciement pour inaptitude professionnelle est de 9.000 euros.
- 👨 Tom a 12 ans d'ancienneté et perçoit 2.500 euros brut par mois
➞ Le calcul est le suivant : [(2.500€ x 1/4 x 10) + (2.500€ x 1/3 x 2)] x 2 = 15.833,33€.
Le montant de l'indemnité spéciale est de 15.833,34 euros.
- 👨 Mathis a 4 ans et 5 mois d'ancienneté et perçoit 2.000 euros brut par mois
➞ Le calcul est le suivant : [(2.000€ x 1/4 x 4) + (2.000€ x 1/4 x 5/12)] x 2 = 4.416,67€.
Le montant de l'indemnité spéciale est de 4.416,67 euros.
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Pour cela, vous devez uniquement renseigner quelques informations :
- le motif de fin de contrat (en l'occurrence, licenciement pour inaptitude professionnelle, non professionnelle, économique, personnelle, rupture conventionnelle ou mise à la retraite) ;
- l'ancienneté du salarié dans l'entreprise ;
- la rémunération brute mensuelle et la rémunération brute des 3 ou 12 derniers mois.
Puis le simulateur calcule pour vous ! Vous obtiendrez le montant minimum prévu par la loi, à verser à votre salarié.
Indemnité de rupture anticipée du CDD en cas de licenciement
La rupture du contrat pour inaptitude peut également impacter les contrats de travail à durée déterminée (CDD) (5). On parle alors d'une rupture anticipée du CDD pour inaptitude professionnelle ou non professionnelle.
➞ En cas de rupture anticipée du CDD pour inaptitude non professionnelle, l'employeur doit verser (6) :
- une indemnité de rupture au moins égale à l'indemnité légale de licenciement (ou disposition conventionnelle plus favorable) ;
- une prime de précarité (10% de la rémunération totale brute versée au salarié), sauf si le type de CDD rompu n'ouvre pas droit à cette indemnité (pour en savoir plus : Versement de la prime de précarité du CDD : les cas où elle n'est pas versée).
➞ En cas de rupture anticipée du CDD pour inaptitude professionnelle, l'employeur doit verser (7) :
- une indemnité au moins égale au double de l'indemnité légale de licenciement ;
- une prime de précarité (10% de la rémunération totale brute versée au salarié), sauf si le type de CDD rompu n'ouvre pas droit à cette indemnité.
Reconnaissance de l'inaptitude et visite médicale de reprise
Le salarié doit passer une visite médicale de reprise auprès de la médecine du travail (8) :
- après une absence d'au moins 30 jours pour cause de maladie, d'accident du travail ou d'accident non professionnel ;
- ou après une absence pour cause de maladie professionnelle (peu importe la durée de l'absence).
Il est possible qu'à l'issue de cet examen de reprise, le salarié soit déclaré inapte, par la médecine du travail, à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment (9). L'inaptitude peut être physique ou non.
Quelles sont les obligations de l'employeur et quelle est la procédure de licenciement pour inaptitude ?
⚠ L'employeur a une obligation de reclassement à l'égard du salarié inapte (sauf exceptions, voir ci-dessous) (10). L'obligation de reclassement implique que l'employeur propose un autre emploi ou une mesure d'aménagement approprié aux capacités et à l'état de santé du salarié.
À noter : l'employeur doit consulter le comité social et économique (CSE) en cas d'inaptitude, lorsqu'un tel comité existe dans l'entreprise, avant de proposer un poste de reclassement au salarié.
Cependant, le contrat de travail peut être rompu (licenciement pour inaptitude) lorsque le reclassement n'est pas possible dans l'une des situations suivantes (11) :
- lorsque l'employeur justifie de son impossibilité de proposer un emploi aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé par le salarié, et tenant compte de l'avis et des indications du médecin du travail ;
- lorsque le salarié refuse l'emploi proposé par l'employeur ;
- lorsque l'avis du médecin du travail dispense l'employeur de son obligation de reclassement, en mentionnant expressément que tout maintien dans un emploi serait gravement préjudiciable à la santé ou que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi (12).
➡ Pour aller plus loin : Un salarié protégé peut-il être licencié pour inaptitude professionnelle ?
En cas de rupture du contrat de travail pour inaptitude, l'employeur doit remettre au salarié des documents de fin de contrat : l'attestation employeur destinée à France Travail, un certificat de travail ainsi qu'un reçu pour solde de tout compte.
1 mois à compter de la date de reprise
Si l'employeur ne procède pas au reclassement du salarié ou à son licenciement dans le délai d'1 mois à compter de la date de la visite médicale de reprise, il doit reprendre le versement du salaire correspondant à l'emploi occupé avant la suspension du contrat (13).
💡 Pour connaître la procédure complète et détaillée de licenciement pour inaptitude, et éviter les erreurs, nous vous recommandons d'obtenir notre dossier complet, avec ses fiches explicatives, ses questions/réponses et ses modèles de documents : Procédure licenciement pour inaptitude professionnelle ou non professionnelle
Quelles démarches le salarié doit-il entreprendre après un licenciement pour inaptitude et quels sont ses droits en matière d'allocations chômage ?
Un salarié peut-il bénéficier du chômage après un licenciement pour inaptitude ?
Après avoir été licencié pour inaptitude, le salarié peut trouver un autre emploi adapté à sas capacités. Mais il peut également être en recherche d'emploi. Pour cela, il peut s'inscrire auprès de France Travail (ex-Pôle emploi), comme demandeur d'emploi, pour toucher le chômage.
Le salarié licencié pour inaptitude peut être éligible à l'assurance chômage sous réserve de remplir les conditions requises.
Le salarié licencié pour inaptitude peut tout à fait bénéficier des allocations chômage, s'il remplit les conditions d'attribution et est en recherche d'emploi. Pour en savoir plus, consultez notre article dédié : Allocations chômage : les conditions pour en bénéficier.
Comment s'inscrire à France Travail (ex-Pôle emploi) après un licenciement pour inaptitude ?
L'employeur transmet, à la fin du contrat, l'attestation employeur à France Travail et au salarié. Cette attestation permet au salarié de faire valoir ses droits aux allocations chômage. Pour s'inscrire en tant que demandeur d'emploi, le salarié doit se rendre sur le site de France Travail et suivre la procédure indiquée.
Le salarié doit cependant être apte au travail, pour pouvoir être inscrit comme demandeur d'emploi. Il doit se rapprocher de France travail pour que sa situation soit étudiée.
Y a-t-il des spécificités concernant les différés d'indemnisation ou délais d'attente pour les allocations chômage après un licenciement pour inaptitude ?
Il n'existe pas de spécificité concernant les différés d'indemnisation, en cas de licenciement pour inaptitude. Les règles sont les mêmes que pour les autres types de licenciement.
Il existe ainsi un délai de carence de 7 jours, un différé d'indemnisation "congés payés" et un différé d'indemnisation spécifique (en cas d'indemnité supérieure à ce que prévoit la loi). Pour en savoir plus, consultez notre article dédié : Délai de carence chômage : comment calculer le nombre de jours ?
📌 A noter : l'indemnité spéciale de licenciement pour inaptitude professionnelle n'augmente pas le différé d'indemnisation spécifique (si le montant est bien égal au double de l'indemnité légale de licenciement).
Références :
(1) Article L1234-9 du Code du travail
(2) Article R1234-2 du Code du travail
(3) Article L1226-4 du Code du travail
(4) Article L1226-14 du Code du travail
(5) Article L1243-1 du Code du travail
(6) Article L1226-4-3 du Code du travail
(7) Article L1226-20 du Code du travail
(8) Article R4624-31 du Code du travail
(9) Article L4624-4 du Code du travail
(10) Articles L1226-2 et L1226-10 du Code du travail
(11) Articles L1226-2-1 et L1226-12 du Code du travail
(12) Cass. Soc., 8 février 2023, n°21-19232
Rapport complet et bien expliqué. En tant que CSE et DS, je ne regrette pas mon abonnement