I. Une clarification de la distinction des travailleurs
La réforme est avant tout venue clarifier la distinction entre travailleurs étrangers concernés par la nécessité d’obtenir une autorisation de travail et ceux qui en sont dispensés. Ainsi, les nouveaux articles R 5221-2 et R 5221-3 du Code du travail distinguent trois documents et titres de séjour :
- Ceux qui permettent d’exercer une activité professionnelle sans solliciter d’autorisation de travail. Le nouvel article R 5221-2 liste 20 catégories d’étrangers dispensés de solliciter une autorisation de travail. On retrouve notamment dans celles-ci les ressortissants de l’Union européenne et leur famille, les salariés détachés, les titulaires d’une carte de séjour « vie privée et familiale », les titulaires d’une carte de séjour pluriannuelles « passeport talent », « salarié détaché ICT », « bénéficiaires de la protection subsidiaire », du statut d’apatride et les membres de leur famille, les titulaires d’une autorisation provisoire de séjour portant la mention « autorise son titulaire à travailler »
- Ceux qui permettent de travailler mais doivent faire l’objet d’une demande d’autorisation de travail préalable. Le nouvel article R 5221-3 énumère les étrangers concernés : les titulaires d’une carte de séjour temporaire « travailleur temporaire », de la carte de séjour temporaire ou pluriannuelle « salarié », de la carte de séjour temporaire « salarié » ou « travailleur temporaire » délivrée à l’étranger titulaire de la carte de résident de longue durée-UE accordée dans un autre Etat membre, du récépissé de renouvellement de titre de séjour qui autorise son titulaire à travailler, de la carte de séjour pluriannuelle « travailleur saisonnier »
- Ceux qui doivent être accompagnés d’une autorisation de travail. L’article R 5221-3 du Code du travail dispose que sont concernés les titulaires d’une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle « étudiant » ou « étudiant-programme de mobilité » lorsqu’ils exercent une activité salariée d’une durée supérieure à 60% de la durée annuelle du travail ainsi que les demandeurs d’asile.
II. La définition de réelles conditions de délivrance des autorisations de travail
La réforme vient également poser des critères de délivrance de l’autorisation de travail beaucoup plus clairs que les précédents : elle vient substituer aux anciens critères d’appréciation de réelles conditions de délivrance de l’autorisation.
Dorénavant l’emploi en question doit être un emploi en tension au sens de la liste établie par l’arrêté du 1 avril 2021 ou ne pas avoir été satisfait par une candidature pendant un délai de publication de trois semaines.
De nouveaux critères concernant l’employeur sont également posés : ce dernier doit remplir ses obligations déclaratives sociales, ne pas avoir été pénalement condamné pour travail illégal ou méconnaissance des règles de santé et de sécurité ni avoir fait l’objet de sanctions administratives pour travail illégal ou détachement.
Le salarié étranger doit bénéficier d’une rémunération au minimum égale au Smic ou à la rémunération minimale prévue par la convention collective.
Enfin l’activité doit respecter la réglementation dont elle fait l’objet.
On peut noter que la réforme vient supprimer deux anciens critères : celui qui exigeait l’adéquation entre la qualification de l’emploi et la formation du salarié (il reste cependant maintenu pour les étudiants) et celui qui exigeait la comparabilité des conditions d’emploi et de rémunération avec celles proposées à l’étranger.
III. Une actualisation de la procédure
La réforme vient réformer la procédure d’obtention d’une autorisation de travail en l’actualisant et la précisant.
1. Une demande en principe formulée par l’employeur
L’article R 5221-1 du Code du travail pose le principe selon lequel c’est à l’employeur de formuler la demande d’autorisation de travail. Il admet cependant deux exceptions. Tout d’abord lorsque le salarié d’une entreprise étrangère vient en France en détachement temporaire : c’est alors le donneur d’ordre établi en France ou l’entreprise utilisatrice qui formule la demande. L’article ajoute que la demande peut être déposée non pas directement par l’employeur mais par un mandataire.
2. Une généralisation des plateformes numériques
L’article R 5221-15 du Code du travail dispose que c’est uniquement au moyen d’un téléservice que l’employeur peut solliciter le préfet afin d’obtenir une autorisation de travail. Il y aura désormais six plateformes interrégionales qui instruiront les demandes ainsi qu’une septième plateforme consacrée à l’instruction des demandes des travailleurs saisonniers.
3. Une demande à renouveler à chaque nouveau contrat de travail
L’article R 5221-1 pose le principe selon lequel c’est à chaque nouveau contrat de travail que l’employeur doit demander une autorisation de travail.
4. Une liste des pièces à fournir
L’arrêté du 1 avril 2021 pose la liste des pièces que l’employeur doit fournir au préfet afin de voir sa demande examinée. Cette liste varie selon la situation de l’étranger.
5. La fixation d’un délai de renouvellement
La réforme vient poser un délai précis durant lequel l’employeur doit déposer sa demande de renouvellement de l’autorisation de travail: l’article R 5221-32 précise que c’est dans le courant du deuxième mois précédant l’expiration que la demande doit être faite, et non plus dans le courant des deux mois comme avant la réforme.
Par Maître Fayçal Megherbi, avocat au Barreau de Paris
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