Quels sont les faits ?
Par deux requêtes et des mémoires, enregistrés sous les numéros 2316076 et 2316081, les 26 octobre, 21 novembre et 1er décembre 2023 et le 19 janvier 2024, M. JN et Mme BN, ont demandé au tribunal administratif de Nantes d’annuler la décision du 19 septembre 2023 par laquelle le sous-directeur des visas a rejeté le recours administratif préalable obligatoire formé contre la décision du 13 juin 2023 de l’autorité consulaire française à Alger (Algérie) refusant de leur délivrer un visa de court séjour pour visite familiale, ainsi que cette décision consulaire et d’enjoindre au ministre de l’intérieur et des outre-mer de faire délivrer ce visa, à défaut, de réexaminer sa demande.
Les arguments des deux demandeurs des visas
Ils soutiennent que les décisions attaquées ne sont pas motivées, le motif opposé par la décision consulaire tiré de ce qu’il existe des doutes raisonnables quant à la fiabilité, l’authenticité des documents présentés ou la véracité de leur contenu est erroné et la décision du sous-directeur des visas est entachée d’une erreur manifeste d’appréciation, dès lors qu’il n’existe aucun risque de détournement de l’objet du visa sollicité à des fins migratoires.
Il est porté atteinte à leur droit de mener une vie privée et familiale au sens de l’article 8 de la convention européenne des droits de l’homme, de l’article 12 de la déclaration universelle des droits de l’homme et de l’article 9 du code civil.
Par un mémoire en défense, enregistré le 25 novembre 2024, le ministre de l’intérieur conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens soulevés par M. JN et Mme BN ne sont pas fondés.
La demande d'annulation du rejet des visas
M. JN et Mme BN, ressortissants algériens nés en 1960 et 16 juin 1961, ont sollicité des visas de court séjour, pour visite familiale, auprès de l’autorité consulaire française à Alger (Algérie), laquelle a rejeté leurs demandes le 13 juin 2023. Par une décision du 19 septembre 2023, dont M. JN et Mme BN, demandent l’annulation, le sous-directeur des visas a rejeté le recours formé contre ces décisions consulaires.
Aux termes de l’article 21 du règlement (CE) du 13 juillet 2009 du Parlement européen et du Conseil établissant un code communautaire des visas : « 1. Lors de l’examen d’une demande de visa uniforme, (…) une attention particulière est accordée à l’évaluation du risque d’immigration illégale (…) que présenterait le demandeur ainsi qu’à sa volonté de quitter le territoire des États membres avant la date d’expiration du visa demandé ». Aux N° 2316076, 2316081 4 termes de l’article 32 du même règlement : « 1. (…) le visa est refusé : (…) b) s’il existe des doutes raisonnables sur (…) la fiabilité des déclarations effectuées par le demandeur ou sur sa volonté de quitter le territoire des États membres avant l’expiration du visa demandé (…) ».
Une situation stable et des attaches matérielles en Algérie
Il ressort des pièces du dossier que M. JN dirige une entreprise d’import-export depuis l’année 2015, que Mme BN gère une société destinée au transport de marchandises depuis l’année 2005 et qu’elle est propriétaire de nombreux biens mobiliers et immobiliers en Algérie. Dès lors, ils justifient disposer d’attaches matérielles dans leur pays d’origine. Par ailleurs, ils établissent avoir bénéficié de plusieurs visas « multicirculation » entre les années 2015 et 2022. S’il n’est pas contesté par Mme BN qu’elle n’a pas respecté les délais de retour de son dernier visa en janvier 2022, il ressort des pièces du dossier qu’elle a été contaminée par le virus de la covid-19, ainsi que l’a fait apparaître le test effectué le 24 décembre 2021, soit trois jours avant le vol qu’elle avait prévu de prendre pour retourner en Algérie avec son époux et qu’elle n’a pu quitter le territoire français que le 7 mars 2022. Cette circonstance, exceptionnelle, qui présente un caractère isolé, est sans incidence sur l’appréciation de l’intention de M. JN et Mme BN de détourner l’objet des visas sollicités à des fins migratoires.
Les erreurs d'appréciation du sous-directeur des visas
Dans ces conditions, le sous-directeur des visas a entaché sa décision d’une erreur manifeste d’appréciation, en rejetant, pour ce motif, les recours formés par M. JN et Mme BN contre le refus de visa qui leur a été opposé.
Le tribunal a estimé qu’ « il résulte de ce qui précède, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête, que M. ‘JN’ et Mme ‘BN’ sont fondés à demander l’annulation de la décision attaquée. »
Le réexamen donne raison aux demandeurs des visas
Eu égard au motif d’annulation retenu, l’exécution du présent jugement implique nécessairement que des visas de court séjour soient délivrés à M. JN et à Mme BN.
Par suite, il y a lieu d’enjoindre au ministre d’Etat, ministre de l’intérieur, de faire délivrer les visas sollicités dans un délai de deux mois suivant sa notification.
Par Me Fayçal Megherbi, avocat à la Cour
Références :
Jugements numéros 2316076 et 2316081 en date du 10 février 2025 de la 9ème Chambre du tribunal administratif de Nantes
Intéressant