1. Lieu et moment déterminant la nature de l'accident : les définitions du Code du travail
Le lieu de l'accident et le moment auquel il se produit permettent de distinguer l'accident de travail de l'accident de trajet.
Accident de travail
L'accident de travail est celui qui se produit sur le lieu de travail.
Rappel : le lieu de travail s'entend du lieu où le salarié exerce habituellement sa prestation de travail. Il ne se réduit donc pas seulement à l'enceinte de l'entreprise.
Est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu (1) :
- par le fait ou à l'occasion du travail ;
- à toute personne salariée ou travaillant, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise ;
- à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit.
À noter : l'accident survenu en télétravail pendant le temps de travail ou le temps de pause méridienne bénéficie donc d'une présomption d'imputabilité. La jurisprudence a toutefois récemment précisé les contours de cette présomption (se reporter au dossier complet pour connaître les apports de la jurisprudence).
Définition de l'accident de trajet
L'accident de trajet est celui qui survient pendant le trajet d'aller et de retour, entre (2) :
- votre lieu de résidence principale et votre lieu du travail ;
- votre lieu du travail et le restaurant, la cantine ou, d'une manière plus générale, le lieu où vous prenez habituellement vos repas.
À noter : la victime ou ses ayants droit doivent apporter la preuve que l'ensemble des conditions permettant d'établir le lien de causalité entre le dommage et le travail sont remplies ou lorsque l'enquête permet à la caisse de disposer sur ce point de présomptions suffisantes.
2. La reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur
Pour rappel, votre employeur est tenu à une obligation de sécurité à votre égard : il doit prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.
Faute inexcusable : possible en cas d'accident du travail
Les conditions de sa qualification en cas d'accident du travail
En cas d'accident du travail, le manquement à cette obligation de sécurité constitue, de la part de votre employeur, une faute inexcusable, dès lors, notamment (3) :
- qu'il avait conscience (ou aurait dû avoir conscience), en raison de son expérience et de ses connaissances techniques, du danger auquel il vous exposait ;
- et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour vous en préserver.
➡ À lire également : Pénibilité au travail & exposition aux risques professionnels : le rôle du C2P
Quelles sont les conséquences d'une reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur ?
Le Code de la sécurité sociale prévoit que la reconnaissance de la faute inexcusable de la part de l'employeur permet de bénéficier notamment :
- d'une majoration de rente ou de capital (4) ;
- de l'indemnisation des éventuels préjudices subis (préjudice causé par les souffrances physiques et morales endurées, préjudices esthétiques et d'agrément, préjudice résultant de la perte ou de la diminution de vos possibilités de promotion professionnelle, etc.) (5) ;
- de l'indemnisation des éventuels autres préjudices subis et non réparés par le régime d'indemnisation forfaitaire (préjudices sexuels, frais liés à l'aménagement du véhicule et du logement, etc.) (6).
À noter : en cas d'accident suivi de mort, les ayants droit de la victime, ainsi que les ascendants et descendants qui n'ont pas droit à une rente, peuvent demander à l'employeur réparation du préjudice moral.
➡ À lire aussi : Mort au travail : le rôle de l'employeur pour éviter les risques
👨⚖️ Jurisprudence :
La Cour de cassation a récemment opéré un revirement de jurisprudence dans la manière dont la rente d’incapacité permanente partielle (IPP) est perçue par la victime d'un accident du travail en présence d'une faute inexcusable (7).
Alors qu'elle couvrait à la fois les pertes de gains professionnels et le déficit fonctionnel permanent (DFP) (poste de préjudice visant à indemniser l'invalidité permanente à vie de la victime), la Cour considère finalement qu'elle n'a pas vocation à indemniser le DFP :
"La rente versée à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle ne répare pas le déficit fonctionnel permanent. Dès lors, la victime d'une faute inexcusable de l'employeur peut obtenir une réparation distincte du préjudice causé par les souffrances physiques et morales par elle endurées".
La Cour a réaffirmé sa position en février 2024 (8), favorisant ainsi une meilleure indemnisation plus complète des préjudices de la victime.
Faute inexcusable : exclue en cas d'accident de trajet
En revanche, la qualification d'accident de trajet exclut d'office l'existence d'une faute inexcusable de l'employeur (9).
3. Accident de travail/trajet : quelle indemnisation/prise en charge de la part de l'employeur ?
Point commun
Lorsque vous êtes en arrêt pour accident du travail ou accident de trajet, votre employeur est tenu de vous verser une indemnité complémentaire qui s'ajoute aux indemnités journalières versées par la Sécurité sociale, à condition (10) :
- que vous justifiiez d'au moins 1 année d'ancienneté dans l'entreprise ;
- que vous ayez justifié votre absence auprès de votre employeur dans les 48 heures ;
- que vous soyez pris en charge par la Sécurité sociale ;
- que vous soyez soigné sur le territoire français ou sur l'un des États membres de l'Espace économique européen (EEE) ;
- que vous ne soyez pas travailleur à domicile, salarié saisonnier, salarié intermittent ou salarié temporaire.
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Accident du travail : une indemnisation dès l'accident (salaire de l'employeur puis IJSS de la CPAM)
🗒 En cas d’accident du travail, le jour où se produit l'accident est intégralement payé par l'employeur.
Les indemnités journalières de la Sécurité sociale (IJSS) vous sont ensuite versées par la caisse à partir du 1er jour qui suit l'arrêt du travail.
Accident de trajet : une carence de 7 jours
🗒 En revanche, dans le cadre d'un accident de trajet, l'indemnisation complémentaire de l'employeur commence après un délai de carence de 7 jours, soit à compter du 8e jour d'absence (11).
➡ À lire aussi : Arrêt maladie, délai et jours de carence : vos droits et la procédure
4. Protection contre le licenciement
Accident du travail : une protection renforcée
Le contrat de travail du salarié victime d'un accident du travail, autre qu'un accident de trajet, ou d'une maladie professionnelle est suspendu pendant la durée de l'arrêt de travail provoqué par l'accident ou la maladie (12).
📂 Sur le sort du contrat pendant le délai d'attente, la durée du stage de réadaptation, de rééducation ou de formation professionnelle : se reporter au dossier complet.
Les salariés dont le contrat de travail est consécutif à un accident de travail bénéficient d'une protection renforcée contre le licenciement.
En effet, au cours des périodes de suspension du contrat de travail, l'employeur ne peut rompre ce dernier que dans les cas suivants (13) :
- il justifie soit d'une faute grave de l'intéressé (licenciement pour faute ou licenciement pour faute lourde) ;
- il justifie de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l'accident.
Accident de trajet : une protection relative
En revanche, les salariés en arrêt suite à un accident de trajet bénéficient quant à eux de la protection contre le licenciement applicable en cas d'arrêt pour maladie non professionnelle (14).
Ainsi, votre employeur est en droit de vous licencier dès lors qu'il est en mesure d'invoquer une cause réelle et
sérieuse de licenciement.
Exemple : nécessité de vous remplacer définitivement en raison des perturbations que votre absence prolongée entraine sur le fonctionnement de l'entreprise.
À noter : le licenciement ne peut être fondé sur la maladie du salarié, auquel cas, il s'appuierait sur un motif découlant d'une discrimination.
Références:
(1) Article L411-1 du Code de la sécurité sociale
(2) Article L411-2 du Code de la sécurité sociale
(3) Cass. Soc., 11 avril 2002, n°00-16535
(4) Article L452-2 du Code de la sécurité sociale
(5) Article L452-3 du Code de la sécurité sociale
(6) Cass. Soc., 4 avril 2012, n°11-15393
(7) Cass. Plén., 20 janvier 2023, n°20-2367
(8) Cass., civ. 2, 1 février 2024, n°22-11448
(9) Cass. Soc., 8 juillet 2010, n°09-16180 et Cass. civ. 2, 9 juillet 2015, n°14–20679
(10) Article L1226-1 du Code du travail
(11) Article D1226-3 du Code du travail
(12) Article L1226-7 du Code du travail
(13) Article L1226-9 du Code du travail
(14) Cass. Soc., 3 mars 1993, n°88-45546
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