La délicate question des certificats médicaux liés au syndrome anxiodépressif au travail
Il faut savoir que jusqu'alors nombre de médecins ont fait l'objet de poursuites disciplinaires pour avoir oser - ou avoir eu le courage - d'attester par certificat médical qu'il suivaient leurs patients pour syndrome anxiodépressif liés à des difficultés au travail ou un conflit avec leur employeur.
En effet, l'article R 4127-28 du Code de la santé publique dispose que la délivrance d'un rapport tendancieux ou d'un certificat de complaisance est interdite.
Le Conseil national de l’ordre des médecins avait ainsi pris le soin de rappeler dans un rapport intitulé « Les certificats médicaux, règles générales d’établissement » que « la rédaction d’un certificat demande attention et rigueur car il constitue un mode de preuve qui entre dans la catégorie juridique des témoignages écrits. Il fait foi jusqu’à preuve contraire. L’établissement et la délivrance d’un certificat médical exposent le médecin à une responsabilité particulière dont la sévérité est la contrepartie de l’importance revêtue, en droit comme en fait, par ce document ».
Il est vrai, comme le note le Conseil d'état dans sa décision, que ces professionnels de santé ne disposent pas toujours (et même rarement) de "l'analyse des conditions de travail du salarié émanant notamment du médecin du travail". Pour autant, leur diagnostic n'en est pas moins précieux et reste fondé sur leur expertise, la connaissance du dossier médical et l'état de santé de leur patient (qu'ils connaissent parfois depuis plusieurs années).
Vers une reconnaissance accrue du rôle du médecin traitant dans la prise en charge des risques psychosociaux
Ce diagnostic peut également être complété par l'avis du médecin du travail, lequel est seul compétent pour juger de l'aptitude médicale du salarié à se maintenir dans ses fonctions, en lien avec l'employeur. Cependant, même si les services de santé au travail (médecin du travail, infirmière, psychologue...) sont les seuls a avoir une connaissance précise de l'environnement de travail et peuvent effectuer une étude de poste, ou formuler par exemple des préconisations à l'intention de l'employeur en vue d'aménager le poste, l'arrêt du 28 mai 2024 redonne au médecin traitant sa place dans le parcours de soin du salarié (car il ne faut pas oublier qu'il est souvent le premier à constater les symptomes lors de la délivrance du premier arrêt de travail...).
Dès lors, il semble juste et souhaitable que les poursuites qui étaient initiées à l'encontre de ces médecins au motif de prétendus manquements déontologiques (sur le fondement de l'article R. 4127-28 du code de la santé publique) prennent aujourdhui fin, à la faveur de cette nouvelle jurisprudence qui facilitera l'administration de la preuve et l'office du juge en matière de contentieux liés aux risques psychosociaux.
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