Être déclaré inapte au travail : récapitulatif de vos possibilités concernant vos revenus
Si vous avez fait l'objet d'un avis d'inaptitude au travail, par le médecin du travail à l'issue de l'examen médical de reprise et ne pouvez pas reprendre le travail, des solutions existent pour vous permettre de défendre vos revenus :
- obtenez une indemnité temporaire d'inaptitude (ITI) dans certains cas ;
- exigez la reprise du paiement de vos salaires à l'issue du délai d'un mois à compter de la date de la constatation de l'inaptitude si vous n'avez été ni reclassé, ni licencié par votre employeur ;
- négociez vos indemnités de licenciement, si vous êtes licencié pour inaptitude au travail ;
- obtenez des dommages-intérêts après votre licenciement ;
- faites une demande d'allocation d'aide au retour à l'emploi (ARE) (= allocations chômage) si vous êtes licencié pour inaptitude ;
- bénéficiez d'une pension d'invalidité ou d’une aide en cas d’incapacité permanente, dans certains cas ;
- bénéficiez des aides de l'Agefiph dans certains cas ;
- suivez une formation pendant votre arrêt de travail ;
- demandez votre retraite à taux plein pour inaptitude.
1. Obtenez une indemnité temporaire d’inaptitude (ITI)
Certains salariés inaptes peuvent bénéficier d'une indemnité temporaire d'inaptitude (ITI) pendant une durée d'1 mois maximum, à compter de la date de délivrance de l'avis d'inaptitude.
À noter : en cas d’inaptitude, l’employeur a 1 mois pour proposer un poste de reclassement ou licencier le salarié. Après écoulement de ce mois, si l’employeur n’a pas reclassé ou licencié le salarié, il doit reprendre le versement du salaire.
Ainsi, certains salariés déclarés inaptes peuvent percevoir, pendant le mois qui suit l’avis d’inaptitude, une indemnité temporaire d'inaptitude (ITI), versée par la Sécurité sociale (la CPAM).
Ceci concerne uniquement les inaptitudes d’origine professionnelle.
L’indemnité est versée sans délai de carence, à partir du lendemain de l’avis d’inaptitude.
2. Exigez la reprise du paiement des salaires
Quelles sont les conséquences pour l'employeur s'il ne licencie pas un salarié inapte ?
Lorsque, à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la date de la visite médicale de reprise du travail, le salarié déclaré inapte n'a pas été reclassé dans l'entreprise ou s’il n’a pas été licencié dans ce même délai, l'employeur a l'obligation de reprendre le versement du salaire correspondant à l'emploi qu'il occupait avant la suspension du contrat de travail (1).
Ainsi, le salarié peut exiger la reprise du paiement des salaires au bout d’un mois, s’il n’a pas été reclassé ou licencié.
Reprise de salaire après avoir été reconnu inapte : interdiction de réduction de salaire
Selon la Cour de cassation, en l'absence d'une disposition expresse, il ne peut être opéré aucune réduction sur le montant des sommes que l'employeur doit verser au salarié, fixé forfaitairement au montant du salaire correspondant à l'emploi que celui-ci occupait avant la suspension du contrat de travail (2).
Il n'a ainsi pas le droit de réduire votre salaire sous prétexte que vous touchez d'autres prestations telles que celles versées par une institution de prévoyance en raison de votre état de santé (2).
3. Comment être indemnisé dans le cadre d'un licenciement pour inaptitude ?
Si vous êtes finalement licencié pour inaptitude au travail, vous pouvez négocier le montant de vos indemnités de rupture.
Il est important de rappeler que l'inaptitude peut avoir une origine non-professionnelle ou professionnelle.
Quel est le montant des indemnités de licenciement pour inaptitude d'origine non-professionnelle ?
Si vous êtes licencié pour inaptitude d'origine non-professionnelle, vous percevrez une indemnité dont le montant ne peut être inférieur à celui de l'indemnité légale de licenciement ou de l'indemnité conventionnelle de licenciement si celle-ci est plus favorable (3).
👓 Cet article peut vous intéresser : Indemnité de licenciement pour inaptitude : comment la calculer ?
En cas de licenciement pour inaptitude non professionnelle, le préavis n'est pas exécuté et le contrat de travail est rompu à la date de notification du licenciement. Ainsi, votre employeur n'est en principe pas tenu de vous verser une indemnité compensatrice de préavis (4).
Néanmoins, quelques exceptions à ce principe existent, notamment :
- votre convention collective peut prévoir le paiement du préavis en cas de licenciement pour inaptitude non-professionnelle ;
- la Cour de cassation a eu l'occasion de préciser que si l'employeur a manqué à son obligation de reclassement, le licenciement prononcé est sans cause réelle et sérieuse et l'indemnité de préavis est alors due au salarié (5) ;
- lorsque l'employeur n'a pas repris le paiement du salaire ni licencié ou reclassé le salarié dans le délai d'un mois à compter de la visite médicale de reprise, il a commis divers manquements qui justifient la résiliation judiciaire du contrat de travail et le versement de l'indemnité de préavis (6).
Vous pouvez également bénéficier d’une indemnité compensatrice de congés payés, pour les congés payés acquis, mais non pris.
Quel est le montant des indemnités de licenciement pour inaptitude d'origine professionnelle ?
En cas d'inaptitude d'origine professionnelle, c'est-à-dire, faisant suite à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, vous devez percevoir une indemnité spéciale de licenciement qui est égale au double de l'indemnité légale, sauf dispositions conventionnelles plus favorables (7).
Vous avez également droit à une indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis.
Vous pouvez aussi prétendre à une indemnisation supplémentaire si votre inaptitude résulte d'une faute inexcusable de l'employeur.
Vous pouvez bénéficier d’une indemnité compensatrice de congés payés, pour les congés payés acquis, mais non pris.
4. Un salarié inapte peut-il demander des dommages-intérêts après son licenciement ?
Si le licenciement pour inaptitude est contesté devant le conseil de prud'hommes, le salarié peut obtenir une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (dommages-intérêts pour licenciement abusif, encadrés par le barème Macron).
🔍 Par exemple, lorsque le licenciement pour inaptitude est consécutif à un manquement de l’employeur, et que le constat d’inaptitude fait suite à une faute inexcusable, le licenciement peut être considéré comme sans cause réelle et sérieuse.
5. Dans quel délai toucher le chômage après un licenciement pour inaptitude ? Quelle allocation ?
Si vous êtes licencié pour inaptitude (professionnelle ou non) au travail, vous êtes considéré comme étant involontairement privé d'emploi.
Dès lors, vous avez la possibilité de vous inscrire comme demandeur d'emploi afin de toucher le chômage (toucher les allocations d’assurance chômage).
En effet, si vous remplissez les conditions nécessaires pour bénéficier du chômage, vous pouvez prétendre à une prise en charge par France Travail (ex-Pôle emploi) dès le lendemain de la notification du licenciement, sous réserve du délai de carence chômage et des différés d'indemnisation applicables.
6. Un salarié inapte peut-il bénéficier de l'allocation d'invalidité, d’une aide en cas d’incapacité permanente ?
Le salarié inapte, suite à maladie ou accident non professionnels, peut demander à bénéficier d’une pension d’invalidité :
- s’il voit sa capacité de travail ou de revenus réduite de 66% ou plus (perte d’au moins 2/3 de sa capacité) ;
- s’il est affilié à l’Assurance Maladie depuis au moins 12 mois à la date de la demande de pension ;
- et s’il a travaillé au moins 600 heures (ou cotisé sur un salaire au moins égal à 2.030 fois le Smic horaire) au cours des 12 mois qui précèdent l’arrêt du travail (ou le constat de l’invalidité).
Mais attention, tous les salariés inaptes ne peuvent pas prétendre à une pension d’invalidité, et toute personne touchant une pension d’invalidité n’est pas forcément inapte. Il s’agit de deux notions différentes, qui ne relèvent pas des mêmes régimes.
👓 Pour en savoir plus, consultez notre article : Invalidité : définition, pension, démarches... tout savoir !
Le salarié inapte, suite à maladie professionnelle ou accident du travail, peut recevoir des aides en fonction de son taux d’incapacité permanente. Il s’agit d’une indemnité ou d’une rente. Tout comme pour l’invalidité, la notion d’incapacité n’est pas à confondre avec la notion d’inaptitude, qui ne relèvent pas des mêmes régimes.
👓 Pour en savoir plus sur la notion d’incapacité de travail, consultez cet article : Maladie professionnelle hors tableau : les infos à connaître.
7. Un salarié inapte peut-il bénéficier des aides de l'Agefiph ?
Un salarié inapte peut bénéficier des aides Agefiph, s’il en remplit les conditions.
Les aides de l’Agefiph ont pour but de sécuriser les parcours professionnels des personnes en situation de handicap.
Ainsi, si la personne déclarée inapte remplit les conditions pour bénéficier d’une des aides de l’Agefiph, il pourra y prétendre. Ces aides sont liées à la situation de handicap, et non à la situation d’inaptitude.
🔍 Ce dossier complet peut vous intéresser : Travailleur handicapé : droits, priorité, salaire, avantages
8. Un salarié inapte peut-il suivre une formation pendant son arrêt de travail ?
Oui, un salarié inapte peut suivre une formation pendant son arrêt de travail.
En effet, comme le précise le site de l’assurance maladie, le salarié peut accéder à différents dispositifs d'aide au retour à l'emploi durant son arrêt de travail, sous réserve :
- de l’avis de son médecin traitant/prescripteur de l’arrêt de travail ;
- de l’accord du service médical ;
- de l’accord de la CPAM.
Pendant un arrêt de travail, pour lutter contre la désinsertion professionnelle et permettre le maintien dans l’emploi, le salarié peut réaliser :
- un bilan de compétences ;
- une formation diplômante facilitant l'accès à un nouvel emploi ;
- une validation d'acquis d’expérience (VAE)...
En cas de visite de préreprise, le médecin du travail peut également préconiser de suivre une formation pour faciliter la reconversion ou la réorientation professionnelle du salarié inapte.
👓 A lire également : Bilan et compétences, reconversion professionnelle : les points essentiels
9. Un salarié inapte peut-il demander sa retraite à taux plein ? (retraite pour inaptitude au travail)
Oui, un salarié peut demander sa retraite à taux plein, peu importe son nombre de trimestres d'assurance retraite, à partir de 62 ans, s’il est reconnu inapte.
En effet, les salariés reconnus inaptes au travail, n’ont pas besoin de totaliser une durée minimum de carrière pour obtenir leurs retraites de base et complémentaire, à taux plein.
La retraite pour inaptitude est autorisée dans certains cas de façon automatique (personnes bénéficiant d’une pension d’invalidité par exemple), ou alors, dans d’autres cas, après appréciation du médecin-conseil de la caisse de retraite (Carsat).
👓 Cet article peut vous intéresser : Réforme des retraites : quelles mesures ont un impact pour les entreprises ?
Inaptitude au travail : quelques rappels (avis d'inaptitude, procédure, médecine du travail)
On parle "d'inaptitude" lorsque l'état de santé d'un salarié est incompatible avec son poste de travail, et qu'aucune mesure d'aménagement ou d'adaptation de celui-ci n'est possible.
L’inaptitude pour être d’origine professionnelle (issue d’une maladie professionnelle ou d’un accident du travail) ou non professionnelle (accident ou maladie non professionnel(le)).
La procédure de déclaration d'inaptitude au travail est particulièrement rigoureuse.
En effet, seul le médecin du travail a le pouvoir de rendre un avis d'inaptitude au travail (8), et il ne peut rendre cet avis qu'après (9) :
- avoir réalisé au moins un examen médical du salarié ;
- avoir procédé ou fait procéder à une étude de poste ;
- avoir réalisé ou fait réaliser une étude des conditions de travail dans l'établissement ;
- et après avoir échangé avec l'employeur.
L'avis d'inaptitude fait suite au constat, par le médecin du travail, qu'aucune mesure d'aménagement, d'adaptation ou de transformation du poste de travail occupé n'est possible et que l'état de santé du salarié justifie un changement de poste.
Un salarié inapte peut-il refuser un poste de reclassement proposé par l'employeur ?
Oui, le salarié inapte peut refuser un poste de reclassement proposé par l’employeur.
Dans ce cas, l’employeur pourra le licencier, en raison du refus de l'emploi proposé par l’employeur, dans le cadre de son obligation de reclassement.
Références :
(1) Articles L1226-4 et L1226-11 du Code du travail
(2) Cass. Soc., 22 octobre 1996, n°94-43691 (inaptitude d'origine professionnelle) et Cass. Soc., 16 février 2005, n°02-43792 (inaptitude d'origine non professionnelle)
(3) Cass. Soc., 24 avril 2001, n°97-44104 et articles L1234-9 et R1234-1 et s. du Code du travail
(4) Article L1226-4 du Code du travail
(5) Cass. Soc., 6 mai 2015, n°13-17229
(6) Cass. Soc., 30 mai 2012, n°10-20106
(7) Article L1226-14 du Code du travail
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