Dans l’affaire du licenciement par la Société de production Sony Pictures Télévision Production France, aux droits de laquelle venait la société Satisfy, de l’animateur Tex qui a présenté une émission de divertissement conjugal sur France 2 pendant 17 ans, la cour de cassation a considéré que la rupture du contrat de travail n’était pas disproportionnée et ne portait pas une atteinte excessive à la liberté d’expression du salarié.
Pour rappel, le présentateur participant à l’émission « C’est que de la télé ! » sur la chaîne C8, avait, en novembre 2017, tenu les propos suivants : « Les gars vous savez c’qu’on dit à une femme qui a déjà les deux yeux au beurre noir ? On lui dit plus rien, on vient déjà de lui expliquer deux fois ! ».
C’est dans un contexte médiatique tourné vers la libéralisation de la parole de la femme avec notamment les hashtags « #metoo » et « #balancetonporc » ou encore l’annonce par le Président de la République des mesures visant à lutter contre les violences sexistes et sexuelles, que la cour de cassation a eu à se prononcer sur une affaire mêlant liberté d’expression et atteinte à la dignité des femmes.
Rappelons que la liberté d’expression est prévue à l’article 10 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, qui dispose que chacun a droit à la liberté d’expression. L’article poursuit en énonçant que
« ce droit comprend la liberté d’opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu’il puisse y avoir ingérence d’autorités publiques et sans considération de frontière ».
En ce sens, la liberté d’expression constitue l’une des libertés les plus importantes d’une société démocratique au sein de laquelle chacun doit pouvoir s’exprimer sans crainte de représailles. Ainsi, la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 dispose en son article 11 que
« la libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’Homme : tout Citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement ».
Cependant, comme le rappelle l’article 10 précité, aux fins de conserver la sécurité, la sureté ou encore la défense de l’ordre, la liberté d’expression peut faire l’objet de certaines restrictions.
De manière constante, si la chambre sociale de la cour de cassation énonce que le salarié jouit, dans l’entreprise et en dehors de celle-ci, de sa liberté d’expression, il y a toutefois abus de cette liberté lorsque les propos sont injurieux, diffamatoires ou excessifs.
Ainsi, dans un arrêt rendu le 20 avril 2022, la cour de cassation a rappelé la possibilité d’une ingérence à l’exercice de la liberté d’expression dès lors qu’elle est nécessaire au regard du but poursuivi, adéquate et proportionnée à cet objectif.
Dans cet arrêt du 20 avril 2022, le salarié, l’humoriste Tex, avait tenu des propos jugés déplacés et injurieux par les juges et avait donc fait l’objet d’un licenciement pour faute grave.
Dans les faits, le salarié était soumis à plusieurs obligations en vertu de son contrat de travail, le respect des droits de la personne étant une des caractéristiques majeures de l’esprit devant animer les programmes des chaînes publiques de télévision. Le contrat de travail précisait que toute atteinte à ce principe constitue une faute grave permettant à l’employeur de rompre le contrat de travail immédiatement.
De surcroit, la cour a relevé le comportement du salarié licencié qui, après s’être vanté d’avoir « fait son petit buzz », a réitéré ses attitudes déplacées en questionnant une candidate sur la fréquence de ses relations sexuelles avec son compagnon alors même qu’il s’était engagé quelques jours auparavant auprès de son employeur à cesser ce comportement avec les femmes.
En conclusion, le fait de licencier un salarié en raison des propos qu’il a tenu constitue une ingérence de la part de son employeur dans l’exercice de sa liberté d’expression, cependant il appartient aux juges d’établir si cette ingérence est nécessaire et d’apprécier la nécessité de la mesure au regard du but poursuivi, son adéquation ainsi que son caractère proportionné.
Or, la tenue de propos misogynes, déplacés et injurieux permet de retenir que le salarié a abusé de sa liberté et qu’il s’est affranchi de la clause éthique à laquelle il avait contractuellement souscrit. Le licenciement est donc justifié.
Cass. soc., 20 avr. 2022, n° 20-10852.
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