Définition du statut juridique de l'artisan
Le statut d'artisan n'est pas forcément connu de tous et il ne concerne pas qu'un seul type d'activité. Comment peut-on donc le définir ?
Selon l'Insee, l'artisanat regroupe les personnes physiques ou morales qui n'emploient pas plus de 10 salariés et qui exercent, à titre principal ou secondaire, une activité professionnelle indépendante de production, de transformation, de réparation ou de prestation de services relevant de l'artisanat et figurant sur une liste établie par décret en Conseil d'État (1).
Ceci implique donc une variété d'activités, qui, suivant leurs caractéristiques, nécessitent une forme juridique adaptée à leurs besoins. Forme juridique inscrite sur les statuts sociaux et optionnellement dans le préambule aux statuts.
Vous souhaitez exercer seul dans votre entreprise artisanale : quel statut social peut être choisi ?
La suppression du statut juridique de l'EIRL
Pour lancer votre activité artisanale, vous pouviez initialement opter pour le statut juridique de l'entreprise individuelle à responsabilité limitée (l'EIRL) qui permettait de limiter votre responsabilité à un patrimoine d'affectation établi par vos soins. En pratique, ce statut était peu adopté. C'est pourquoi il a été supprimé au profit de la création d'un nouveau statut unique d'entreprise individuelle le 15 mai 2022 (2).
Il est important de préciser que les règles applicables avant cette date demeurent pour les EIRL déjà existantes. En effet, les EIRL continueront d'exister mais de nouvelles ne pourront plus être créées. Les nouveautés apportées par le statut unique de l'entreprise individuelle s'appliqueront aussi à ces EIRL, mais seulement pour les créances nées après cette date du 15 mai 2022.
La création du statut unique d'entreprise individuelle
Vous pouvez choisir de ne pas créer de société et exercer en qualité de personne physique. Dans ce cas, vous êtes en entreprise individuelle (EI). Cette forme juridique est peu contraignante pour l'artisan. En plus de cela, les évolutions récemment apportées visent à une facilitation des démarches pour l'entrepreneur individuel.
Dès la création, il n'y a pas d'obligation de constituer un capital social. De ce fait, l'artisan n'a pas l'obligation d'ouvrir un compte bancaire professionnel.
De plus, ce statut d'entrepreneur individuel est avantageux en votre qualité d'artisan, tout particulièrement du fait de la responsabilité limitée à l'ensemble des biens utiles pour l'activité professionnelle.
Initialement, la Loi "pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques" du 6 août 2015 avait rendu insaisissable de droit la résidence principale de l'entrepreneur individuel (EI). Cette dernière ne pouvait donc pas faire l'objet d'une saisie immobilière par ses créanciers au titre de ses dettes professionnelles nées à compter du 7 août 2015.
Par une déclaration d'insaisissabilité, vos autres biens fonciers, bâtis ou non bâtis, faisant partie de votre patrimoine personnel pouvaient également être protégés des saisies au titre de dettes professionnelles, à condition :
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que le bien foncier ne soit pas affecté à un usage professionnel ;
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d'effectuer au préalable une déclaration d'insaisissabilité établie par notaire, publiée au service de publicité foncière et mentionnée dans un registre de publicité légale à caractère professionnel ou dans le journal d'annonces légales.
Depuis la loi du 14 février 2022, une simplification est opérée (3), à savoir une distinction entre le patrimoine professionnel et personnel de l'entrepreneur. Le patrimoine personnel est, de principe, insaisissable. En cas de faillite, seuls les biens affectés à l'usage professionnel auront donc la possibilité d'être saisis. Il est toutefois possible de renoncer à cette insaisissabilité, dans le but de combler une dette commerciale par exemple, mais ceci à la demande de l'entrepreneur.
La création de ce statut unique vise à une simplification des démarches et reste adapté au lancement d'une activité artisanale. Un autre statut existe cependant dans le cas d'une activité artisanale de faible envergure.
Auto-entrepreneur et le statut d'artisan : faire le choix de la micro-entreprise
Avoir une micro-entreprise, c'est être considéré comme un auto-entrepreneur, terme plus souvent utilisé dans le langage courant. Jusqu'en 2016, les deux termes désignaient des régimes spécifiques propres à l'entreprise individuelle, ils ne font désormais plus qu'un.
Comme vu précédemment, le statut de l'entreprise individuelle a été simplifié, pour le rendre plus accessible et faciliter les démarches des professionnels. La création du statut unique d'entreprise individuelle n'empêche pas pour autant d'opter pour la micro-entreprise.
Il existe des conditions pour pouvoir créer sa micro-entreprise. Certaines activités ne sont pas compatibles avec le statut d'auto-entrepreneur, bien heureusement les prestations de services comme les activités artisanales n'entrent pas dans ce cadre-là. Elles sont même compatibles avec la création d'une activité de E-commerce !
Il est important de préciser que le statut d'auto-entrepreneur est adapté aux activités ne dégageant pas un gros chiffre d'affaires, du fait qu'il existe un seuil à ne pas dépasser. Cette limite n'est pas forcément problématique en fonction de l'activité de l'artisan. En cas de dépassement, l'auto-entrepreneur basculera directement dans le statut de l'entreprise individuelle.
Vous souhaitez vous associer, quels sont les statuts juridiques applicables ?
La SARL et l'EURL, formes juridiques encadrées
Il est tout à fait possible de s'associer en étant artisan, l'activité n'a pas forcément pour vocation d'être exercée seul. La société à responsabilité limitée (SARL) présente des avantages, c'est une société dans laquelle chacun des associés n'est, en principe, responsable des dettes de la société qu'à hauteur de ses apports personnels. L'effet de ce principe peut toutefois être mis à mal si les associés se portent caution sur leurs biens personnels. Aucun capital minimum n'est requis (5).
La SARL n'empêchera pas non plus une volonté d'extension de la part des associés, elle peut être constituée d'un maximum de 100 associés, ce qui est largement suffisant pour l'exercice d'une activité artisanale. Pour finir, il existe une meilleure protection sociale du gérant comparativement à ce qui peut se faire pour d'autres formes sociétaires.
De l'autre côté, la SARL souffre d'un manque de flexibilité dans le fonctionnement du fait d'un encadrement total par les textes de loi. Cela peut être préjudiciable selon vos envies dans la manière de gérer votre entreprise. De plus, en cas de défaut de gestion, la responsabilité du gérant peut être engagée.
L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) est une SARL à associé unique et un seul gérant (6). Elle offre aussi l'avantage fiscal de l'imposition au bénéfice réel, c'est-à-dire calculé après déduction des charges. Dans l'hypothèse d'une cession de parts sociales ou d'entrée dans le capital d'un nouvel associé, l'EURL sera transformée en SARL.
La SAS et la SASU, dans une volonté d'investissement
La société par actions simplifiée (SAS) est une société dans laquelle les associés sont responsables des dettes de la société à hauteur de leurs apports personnels (7). Tout comme la SARL, ce statut juridique est protecteur envers l'artisan associé. De plus, aucun capital minimum n'est requis, ce qui est intéressant au démarrage de l'activité.
Contrairement à la SARL, il y a une grande liberté pour la rédaction des statuts. Cela peut être considéré comme un avantage ou inconvénient suivant qui est associé au sein de la société et leur capacité de gestion. Enfin, vous pouvez avoir le statut de salarié que vous soyez associé minoritaire, égalitaire ou majoritaire.
Cette forme juridique présente des avantages si vous avez besoin d'actionnaires pour faire des investissements importants ou des avances de fonds afin de financer des chantiers. En réalité, pour la plupart des artisans, ce type de forme sociétaire n'apparaît comme idéal car ne correspond pas totalement aux besoins de l'activité.
La société par actions simplifiée unipersonnelle (SASU) est une SAS avec un seul actionnaire. Elle permet à son président d'être assimilé à un salarié et donc d'avoir une meilleure couverture sociale. Une transformation en SAS s'effectuera en cas de cession d'actions ou d'augmentation de capital par l'entrée d'un nouvel associé. Toutefois, comme pour la SAS, cette forme sociétaire ne revêtira un intérêt qu'en cas de volonté d'investissement de la part de l'artisan.
La SNC, société des associés commerçants
La société en nom collectif (SNC) est une société dans laquelle les associés ont la qualité de commerçant. Un capital social doit être constitué mais il n'est pas prévu de montant minimum, ce qui peut être avantageux dans le processus de création de l'activité artisanale. En plus de cela, les associés bénéficient d'une grande stabilité, la révocation d'un des associés ne peut se faire qu'à l'unanimité de l'ensemble du reste.
Les associés artisans sont ici responsables solidairement et de manière indéfinie sur les dettes de la SNC. Ainsi, les créanciers peuvent se retourner pour la totalité de la créance contre un des seuls associés solvables (8) et ceci sur l'entièreté de leurs biens personnels. Ce statut juridique n'apparaît donc pas comme protecteur.
Pour aller plus loin : rappel des documents indispensables à la création d’une société
Références :
(1) Décret n° 98-247 du 2 avril 1998 relatif à la qualification artisanale et au secteur des métiers et de l'artisanat
(2 ) LOI n°2022-172 du 14 février 2022 en faveur de l'activité professionnelle indépendante
(3) Article L526-22 du Code de commerce
(4) LOI n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat et LOI n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023
(5) Article L223-2 du Code de commerce
(6) Article L223-1 du Code de commerce
(7) Article L227-1 du Code de commerce
(8) Article L221-1 du Code de commerce
Dossier très complet et informatif