Avec l’explosion de la diffusion de contenus en ligne, de nombreuses personnes subissent des préjudices liés à des contenus illicites. C’est dans ce contexte que le Cabinet Ziegler & Associés a remporté une affaire dont l’élément déclencheur était une vidéo diffusée sur YouTube diffamatoire et portant atteinte à la vie privée de la cliente. Après l’envoi infructueux d’une mise en demeure à Google France, le Cabinet a obtenu le retrait de la vidéo devant le Tribunal dans le cadre d’une procédure de référé en faisant valoir le caractère illicite de la vidéo et la responsabilité de l’hébergeur.
I. Pour engager sa responsabilité, il faut démontrer que l’hébergeur avait connaissance de la présence des contenus visés et n’a pas alors réagi promptement pour les éliminer
L’engagement de la responsabilité d’un hébergeur de contenu illicite n’est en principe pas engagée obéit à un cadre légal strict.
Ainsi, comme le disposent la directive 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2000 et sa transposition dans la loi nationale, les paragraphes 2 et 3 de l'article 6-I de la loi du 21 juin 2004, cette responsabilité est engagée à condition que l’hébergeur « n'ait pas effectivement connaissance de l'activité ou de l'information illicites et, en ce qui concerne une demande en dommages et intérêts, n'ait pas connaissance de faits ou de circonstances selon lesquels l'activité ou l'information illicite est apparente » et que, « dès le moment où il a de telles connaissances, agisse promptement pour retirer les informations ou rendre l'accès à celles-ci impossible. »
Pour intenter quelque action contre un hébergeur de contenu illicite, il convient donc d’examiner s’il avait sa connaissance de la présence du contenu concerné ainsi que sa rapidité à le retirer.
II. Deux exemples de précédents
L’importance de ces deux conditions dans la responsabilité d’un hébergeur de contenu illicite est illustrée par de nombreuses décisions jurisprudentielles, au nombre desquelles compte le jugement du 20 février 2008 rendu par huitième chambre du Tribunal de commerce de Paris.
En effet, par celle-ci, le demandeur, la société de production FLACH FILM, a obtenu un dédommagement de 120 000 euros de l’hébergeur www.video.google.fr qui accueillait illicitement l’un de ses films. Le défendeur n’ayant pas rapidement retiré les liens visés et ce malgré les sollicitations répétées de FLACH FILM, le Tribunal a retenu sa responsabilité.
Un autre jugement met aussi en lumière le poids de ces conditions, mais d’une manière inverse, puisque dans ce cas-ci l’hébergeur concerné n’a pas manqué à ses obligations et n’a donc pas été sanctionné : dans sa décision du 18 mai 2018, Tribunal de grande instance de Paris a estimé que le demandeur, « annuaire.laposte.fr », qui abritait des numéros surtaxés faussement attribués à l’entreprise du demandeur n’engageait pas sa responsabilité. En effet, même si le demandeur avait envoyé une notification à laquelle le site n’a pas réagi, elle ne comportait pas les mentions prévues par la loi du 21 juin 2004. Aussi, l’hébergeur n’ayant pas été avisé correctement, le Tribunal ne l’a pas condamné. Cette décision montre aussi que le respect de la forme de la notification d’un hébergeur est essentiel pour attester de sa mauvaise foi dans son refus de retirer un contenu illicite.
III. Les préjudices d’un contenu illicite
Les préjudices sont surtout d’ordres financier et moral. D’ordre financier, lorsque les contenus illicites sur internet constituent une violation de propriété intellectuelle – films ou photos téléchargeables gratuitement sans l’accord des auteurs, vidéos volées… D’ordre moral, quand ils lèsent une personne – physique ou morale – en étant publiés sans son consentement ou en la diffamant.
De quelque ordre qu’ils soient, les préjudices seront le plus souvent compensés, si la partie requérante d’une action en justice obtient des dommages et intérêts, par les publicateurs de ce contenu et, si sa responsabilité est engagée, par l’hébergeur.
IV. Comment procéder pour mener à bien une action ?
La procédure à suivre est la suivante : il faut tenter un retrait amiable auprès de l’auteur du contenu illicite. Si cette tentative reste lettre morte, il convient de lui envoyer une mise en demeure pour pouvoir attester de sa mauvaise foi s’il persiste dans son inexécution. Si, encore une fois, votre démarche est infructueuse, il convient dans ce cas de saisir le Tribunal compétent par le biais d’une action en référé (procédure urgente) dite « référé presse ». Cette action en justice vous permettra d’obtenir le retrait sous astreinte du contenu litigieux et, le cas échéant, l’obtention de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi.
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