Par arrêté du 1er mars 2022 a été nommé vice-président de la Commission supérieure de codification M. Bernard STIRN, président de section honoraire du Conseil d’Etat, membre de l’Institut, en remplacement de M. Daniel LABETOULLE.

 

Rappelons que la Commission supérieure de codification dont l’installation en 1989 a signé et permis le renouveau de la codification est une institution probablement unique en France. Sous la présidence du Premier ministre, s’appuyant sur le secrétariat général du Gouvernement, elle réunit parlementaires, grands universitaires, représentants des plus hautes juridictions françaises, Conseil d’Etat, Cour de Cassation, Cour des Comptes et grandes administrations centrales de l’Etat.

Tous les projets de codes nouveaux doivent recueillir obligatoirement son avis délivré à l’issue  de séances plénières où aidée par le travail de rapporteurs spécialement désignés qui ont ½uvré avec les administrations support, elle examine le plan, les textes codifiés qui seront de ce fait abrogés, le projet de texte, mot à mot, y compris dans ses dispositions ultramarines, et  donne des avis autorisés  sur les difficultés juridiques de toute nature que la rédaction du projet soulève, sur la répartition délicate des dispositions  entre codes existants et futur  code, et  vérifie l’application qui est faite du principe de la hiérarchie des normes dans le projet.

Sur le fondement d’une loi d’habilitation fixant des délais impératifs, le projet d’ordonnance ainsi préparé, avec les avis de la Commission, est transmis par le secrétariat général du gouvernement à la section administrative compétente du Conseil d’Etat, avant qu’il soit examiné par l’assemblée générale et publié par ordonnance du Président de la République après examen en Conseil des ministres. La Commission recommande que la partie réglementaire du code soumis à son même examen soit publiée par décrets en même temps, ou si cela n’est pas possible, dans les délais les plus rapprochés de la partie législative.

Naturellement, le rôle du Vice-président de la Commission est essentiel. C’est sous son autorité que le programme de codification est préparé, c’est lui qui joue l’interface entre le Secrétariat général du gouvernement, les ministres et le Conseil d’Etat ; c’est lui qui soutient les efforts des administrations centrales dans leur rédaction des projets. C’est lui qui fait que les rapporteurs particuliers, les administrations représentées et tous les membres de la Commission qui l’entourent ont conscience de vivre, lors de séances plénières, des moments exceptionnels de leur vie professionnelle. Le vice -président est aidé dans sa tâche en premier lieu par un rapporteur général.

La Commission réalise ainsi un travail unique d’impulsion, de coordination et d’expertise qui est tout à fait public et auquel tous ceux qui s’interrogent sur la fabrique du droit écrit peuvent se référer ; les rapports annuels de la Commission, avec notamment ses avis, sont publiés et accessibles à tous gratuitement sur le site legifrance/codification/ Rapports de la Commission supérieure de codification où l’on trouve à ce jour en libre accès tous les rapports de 2006 à 2020.

Les travaux de la Commission supérieure de codification, sous les quatre mandats de la vice-présidence de Daniel LABETOULLE, sont considérables. Le président et son rapporteur général ont constitué un duo exceptionnel. Il est vrai que les fonctions de Rapporteur général ont été assurées par l’étincelant Mathias GUYOMAR, président depuis 2016 de la 10° chambre de la section du contentieux du Conseil d’Etat, élu juge à la Cour européenne des droits de l’homme au titre de la France par l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe le 28 janvier 2020 et depuis remplacé par une autre personnalité éminente du Conseil d’Etat, Madame Anne COURREGES. Ces travaux ont permis la publication de codes entièrement nouveaux qui sont devenus aussitôt des ouvrages de référence quotidiens pour tous. Citons en quelques-uns parmi beaucoup d’autres. S’adressant au public le plus large, le code des relations entre le public et l’administration, code qui d’emblée a montré que la doctrine de la codification n’était pas repliée sur elle-même enfermée dans une répétition du même, mais savait innover profondément lorsque la matière l’exigeait ; la numérotation des articles législatifs et des articles réglementaires est continue pour faciliter l’appropriation des dispositions par le lecteur. Examiné en 2019 et publié en 2021, le code de justice pénale des mineurs a marqué les esprits par la codification d’un texte vénérable, l’ordonnance de 1945, mais si souvent remanié qu’il devenait impraticable. Le dernier code créé, examiné par la Commission dans les conditions si particulières qu’imposait la pandémie, était attendu depuis 25 ans ; il est déjà un code essentiel pour des millions de personnes, puisqu’il ne s’agit de rien de moins que le code général de la fonction publique entré, pour sa parte législative, en vigueur le 1er mars 2022.

Le Président LABETOULLE n’a pas souhaité être reconduit dans ses fonctions pour un cinquième mandat.  Homme éminent, d’une grande simplicité, il considère sans nostalgie avoir accompli ce qu’il devait, clôturant un cycle de seize années d’un travail considérable. Sans doute est-il conforté par la nomination à la vice présidence de la Commission du Président Bernard STIRN, autre monstre sacré du Conseil d’Etat, qui rappelle qu’il fut le premier rapporteur général pendant les deux premières années de la Commission en 1989 et 1990. La continuité de l’action publique est ainsi assurée par ces grands serviteurs de l’Etat.

La codification doit ainsi à ses deux anciens présidents, Guy BRAIBANT et Daniel LABETOULLE, hommes exceptionnels par leur hauteur de vue, leur intelligence hors du commun et leur autorité naturelle, d’être devenue incontournable au service d’une grande ambition. Quoi de plus exaltant en effet que de travailler à rendre le droit plus accessible à tous ?