Le 4 janvier 2023, le Tribunal Administratif de Versailles a enjoint le préfet de l’Essonne de délivrer au requérant une convocation pour un rendez-vous en préfecture afin de déposer une demande de titre de séjour au titre de l’admission exceptionnelle au séjour (AES).
En l’espèce, le requérant, un ressortissant tunisien âgé de 37 ans était présent de façon continue en France depuis 2011.
Plombier de profession, il avait sollicité le 17 novembre 2021 la régularisation de sa situation par l’intermédiaire de la plateforme en ligne « démarches-simplifiées », au titre de l’admission exceptionnelle au séjour via le motif « salarié ». En l’absence de proposition de rendez-vous, il avait réitéré les 17 juin et 26 octobre 2022 sa demande par des courriels et un courrier le 8 septembre 2022.
Par la suite, aucun rendez-vous ne lui avait été proposé par le site, pendant une période d’un an. L’administration soutenait alors que les délais de moyens de traitement associés à une telle demande étaient d’environ 10 mois.
Sur le fondement de l’article L. 521-3 du Code de Justice Administrative, le juge administratif enjoint le préfet de l’Essonne de délivrer au requérant une convocation pour un rendez-vous en préfecture afin qu’il dépose sa demande de titre de séjour. Ce faisant, il fait l’examen concret des conditions de traitement d’une demande de rendez-vous à la préfecture, sous le prisme des règles de droit du référé dit « mesures utiles ».
I. La condition d’urgence satisfaite par les conséquences du dysfonctionnement sur la situation du requérant
Persistant pendant plus d’un an, l’impossibilité pour le requérant d’enregistrer la demande de titre de séjour le maintenait dans une position gravement précaire : en effet, cette situation administrative exposait le requérant à une mesure d’éloignement et à la perte de son emploi.
Selon le juge des référés, la condition d’urgence est ici considérée comme satisfaite dès lors que des circonstances particulières caractérisent la nécessité pour le requérant d’obtenir rapidement un rendez-vous à la préfecture.
En l’espèce, ces circonstances particulières peuvent ainsi résulter d’un dysfonctionnement constaté à l’occasion de plusieurs tentatives de prise de rendez-vous n’ayant pas été effectuées la même semaine.
Malgré les justifications du préfet mentionnant notamment la durée de traitement d’environ dix mois, le juge administratif considère que cette situation constitue une urgence au sens de l’article L. 521-3 du code de justice administrative. Visant notamment le droit à se maintenir sur le territoire, il estime que pour un étranger en France, les conséquences d’une impossibilité de prendre rendez-vous aux fins d’obtenir un titre de séjour sont suffisamment graves pour que cette situation soit caractérisée comme une urgence.
II. La condition d’utilité constatée au titre de l’absence d’autres voies de recours
Le requérant avait tenté par tout moyen de contacter la préfecture, autant par l’intermédiaire de courriels que par un courrier. La préfecture, quant à elle, ne s’était pas formellement prononcée sur la demande de rendez-vous du requérant mais l’avait simplement ignoré à chaque nouvelle sollicitation.
Selon le juge des référés, cette situation de blocage maintenait le requérant dans une position d’attente, celui-ci ne pouvant obtenir de rendez-vous que via la plateforme numérique administrée par la préfecture, la dite plateforme réduise totalement ses recours et voies de sorties, le requérant ne disposait que de la voie contentieuse pour obtenir son rendez-vous et, par suite, sa régularisation.
En conséquence, le juge administratif estime que la condition d’utilité du référé est satisfaite car, d’une part, le requérant ne disposait d’aucune autre voie de recours afin d’accéder à sa demande et d’autre part, il estime que la mesure d’injonction ne fait obstacle à l’exécution d’aucune décision administrative, caractérisant à nouveau l’utilité de celle-ci au regard de l’article L. 521-3.
Par Me Fayçal Megherbi, avocat
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