Définition du harcèlement moral en entreprise

Des agissements portant atteinte aux conditions de travail

📄 Le harcèlement moral se traduit, selon le Code du travail, par des agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail du salarié susceptible (1) :

  • de porter atteinte à ses droits et à sa dignité ;
  • d'altérer sa santé physique ou mentale ;
  • ou de compromettre son avenir professionnel.

... qui peuvent se manifester sous différentes formes

Il peut s'agir :

  • de harcèlement vertical descendant : d'un manager vers un subordonné. Il s'agit d'un abus de pouvoir hiérarchique (harcèlement managérial) ;
  • de harcèlement horizontal : d'un salarié à l'égard d'un autre salarié ;
  • de harcèlement vertical ascendant : d'un collaborateur vers un supérieur hiérarchique ;
  • de harcèlement latéral : le harcèlement est exercé par une personne tierce (un client, un fournisseur...) sur un collaborateur de l'entreprise.

Le harcèlement moral peut être le fait d'un ou plusieurs collaborateurs (d'une équipe contre un seul salarié de cette équipe ou d'une équipe sur leur manager).

 Pour en savoir plus : Mobbing ou harcèlement moral collectif au travail : qu'est-ce que c'est ?

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Inclus : 31 questions/réponses fondées en droit, 2 fiches explicatives et 6 modèles de courriers.

Comment savoir si je suis victime de harcèlement moral en entreprise ?

Les signes constitutifs de harcèlement moral en entreprise

Pour être certain que les faits qui vous sont infligés sont bien susceptibles d'être qualifiés de faits de harcèlement moral, vous pouvez vous poser les questions suivantes :

  • les faits que vous subissez sont-ils répétés ou s'agit-il d'un fait isolé ?
  • ces faits ont-ils pour conséquence une dégradation de vos conditions de travail ?
    => si oui :
    • portent-ils atteinte à vos droits et à votre dignité ?
    • ont-ils un impact négatif sur votre santé physique ou mentale (trouble du sommeil, angoisse, dépression, dépendance à l'alcool ou à la drogue, burn-out...) ?
    • risquent-ils à terme de compromettre votre avenir professionnel (rétrogradation, licenciement abusif...) ?

➡️  Si vous cochez toutes les cases, il se peut en effet que vous soyez victime de harcèlement au travail

Exemples de faits constituant une forme de harcèlement moral en entreprise

Les exemples de harcèlement moral sont très nombreux, et peuvent notamment avoir trait à :

  • des dénigrements et brimades ;
  • des critiques injustifiées ;
  • des humiliations publiques ;
  • des mises au placard ;
  • des avertissements infondés ;
  • des pressions disciplinaires ;
  • des mises à l'écart ;
  • des propos agressifs ;
  • des changements de poste à répétition.

 À lire aussi : Harcèlement sexuel au travail : 10 exemples pour réagir

Harcèlement moral et discrimination :  quel lien ?

Le 8 décembre 2023, le Défenseur des droits et l'Organisation Internationale du Travail (OIT) ont publié le 16ᵉ baromètre sur les discriminations dans l'emploi (2)

Selon celui-ci, 1 personne sur 6 atteintes de maladie chronique a été confrontée, dans la sphère professionnelle, à une discrimination ou un harcèlement discriminatoire en raison de son état de santé ou de son statut de sa qualité de travailleur handicapé

➡ À lire aussi : Arrêt maladie longue durée : gérer l'absence du salarié

📊 En outre, 55 % des personnes malades déclarent avoir vécu une situation de harcèlement moral dans l'emploi. 

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Comment prouver que vous êtes harcelé moralement ?

Rassembler des éléments de fait

Lorsqu'un litige relatif à des agissements de harcèlement moral survient, vous devez, en tant que salarié, présenter tous les éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement (3).

Exemples : des témoignages, des SMS et/ou mails, des courriers ou encore des certificats médicaux.

Vous pouvez, pour constituer votre dossier, être accompagné d'un avocat.

... qui peuvent être contestés par le collaborateur mis en cause

Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse (le présumé "harceleur") de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement.

Le juge peut ordonner toutes mesures d'instructions qu'il estime utile avant de former sa conviction.

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Que faire en cas de harcèlement moral au travail ? Qui contacter et comment réagir ?

Une fois les éléments de preuves laissant supposer l'existence d'un harcèlement moral au travail rassemblés, vous disposez de plusieurs moyens d'action pour faire cesser cette situation.

1. Alerter votre employeur

Une première démarche

La première chose à faire, en cas de harcèlement, est d'alerter votre employeur à condition, bien évidemment, qu'il ne s'agisse pas de harcèlement vertical descendant.

Pour garder une trace écrite de cette alerte et vous constituer un élément de preuve supplémentaire, il est recommandé d'informer votre employeur par lettre recommandée avec accusé de réception (LRAR).

... qui protège le salarié victime

Pour rappel, le salarié qui relate des faits de harcèlement moral ne peut faire l'objet d'un licenciement pour ce motif, sauf mauvaise foi. Celle-ci ne peut résulter que de la connaissance, par le salarié, de la fausseté des faits qu'il dénonce.

À savoir : le salarié qui relate des faits de harcèlement moral ne peut être licencié pour ce motif, sauf mauvaise foi. Celle-ci ne peut résulter que de la connaissance, par le salarié, de la fausseté des faits qu'il dénonce.

Jurisprudence :

👨‍⚖️ Initialement, la Cour de cassation avait jugé que le salarié ne pouvait bénéficier de cette protection que s'il avait lui-même qualifié les faits qu'il dénonçait de harcèlement moral (4).

Le juge a récemment revu sa position, en estimant récemment que cette protection était acquise au salarié, même si celui-ci n'avait pas explicitement qualifié les faits qu'il dénonçait de harcèlement moral, dès lors que l'employeur ne pouvait légitimement ignorer que les faits dénoncés relevaient de cette qualification  (5).

Dans un tel cas de figure, il appartient, à la partie défenderesse, c'est-à-dire à l'auteur des faits, de prouver que ceux-ci ne sont pas constitutifs des faits de harcèlement.

2. Alerter le CSE et/ou saisir le Conseil de prud'hommes (CPH)

Information de l'employeur et enquête

Vous pouvez également prévenir le Comité social et économique (CSE), s'il en existe un dans l'entreprise.

En effet, si un membre du CSE constate, notamment par l'intermédiaire d'un travailleur, qu'il existe une atteinte aux droits des personnes, à leur santé physique et mentale ou aux libertés individuelles dans l'entreprise, il doit en saisir immédiatement l'employeur (6). C'est ce qu'on appelle le "droit d'alerte" du CSE.

L'employeur doit alors procéder, sans délai, à une enquête pour harcèlement moral ou sexuel au travail avec le membre du CSE en question et prendre les dispositions nécessaires pour remédier à cette situation.

 À lire : CSE & harcèlement moral et sexuel au travail : quel est votre rôle ?

Saisine du CPH

S'il ne fait rien ou s'il n'est pas d'accord concernant la réalité de l'atteinte et si aucune solution n'est trouvée, vous pouvez, en tant que salarié, saisir le bureau de jugement du Conseil de prud'hommes (CPH). Les juges statuent alors selon la procédure accélérée au fond.

À savoir : le membre de la délégation du personnel du CSE peut aussi saisir le Conseil de Prud'hommes s'il vous avertit écrit et que vous ne vous y opposez pas.

3. Engager une procédure de médiation

Vous pouvez aussi engager une procédure de médiation avec l'auteur des faits. Le médiateur tentera alors de concilier les parties afin que vous et l'auteur des faits parveniez à un accord visant à faire cesser toute situation de harcèlement moral. 

4. Alerter l'inspection du travail

Vous avez aussi la possibilité d'alerter l'inspection du travail qui, si elle constate un cas de harcèlement, peut transmettre le dossier à la justice.

5. Alerter la médecine du travail

Vous pouvez alerter la médecine du travail pour qu'elle prenne les mesures nécessaires pour protéger votre santé.

6. Saisir le Conseil des prud'hommes à l'encontre de votre employeur

Vous pouvez saisir le Conseil de prud'hommes à l'encontre de votre employeur si vous estimez que celui-ci, dûment informé de la situation, n'a pas pris les mesures nécessaires pour faire cesser le harcèlement dont vous avez été victime. 

7. Déposer plainte à l'encontre du salarié fautif

Vous pouvez déposer plainte contre l'auteur des faits de harcèlement afin que celui-ci fasse l'objet d'une sanction pénale. 

 À lire aussi : L'employeur peut-il sanctionner le salarié après une plainte classée sans suite ?

Témoin : peut-il intervenir et que risque-t-il ?

Selon une étude Ipsos réalisée en septembre 2022 réalisée sur 2.000 actifs travaillant dans une structure privée ou publique d’au moins 5 personnes, constituant un échantillon national représentatif de cette population, 40% des travaileurs interrogés ont au moins une expérience du harcèlement au travail en tant que témoin*.

Protection contre toute discrimination

Le Code du travail que les salariés ayant, de bonne foi, témoigné de faits de harcèlement sexuel ou relaté de tels faits ne peuvent pas faire l'objet des mesures de discrimination, directe ou indirecte.

Protection relative aux lanceurs d'alerte 

Les témoins de harcèlement moral bénéficient de la protection applicable aux lanceurs d'alerte ; protection qui doit être rappelée dans le règlement intérieur de l'entreprise.

Exemples :

  • ils ne peuvent pas être écartés d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise ; 
  • ils peuvent saisir le conseil de prud'hommes si leur contrat de travail est rompu consécutivement à leur signalement.
    Dans ce cas, ils peuvent voir leur compte personnel de formation (CPF) abondé jusqu'au plafond, sur décision du conseil des prud'hommes à l'encontre de l'employeur.

Obligations de l'employeur : prévenir, enquêter, protéger et sanctionner 

L'employeur a une obligation de sécurité : il est tenu de protéger votre santé physique et mentale.

Obligation de prévention

L'employeur est tenu de prendre toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral.

Le règlement intérieur doit être rédigé de manière à ceque soient rappelées les dispositions pénales relatives aux harcèlements moral et sexuel et aux agissements et comportements sexistes.

L'employeur doit également informer les salariés desdites dispositions par tout moyen. Exemple : par voie d'affichage, par un affichage dans les lieux de travail.

➡ À lire sur ce point : Affichage obligatoire harcèlement sexuel : focus sur les obligations de l'employeur pour la prévention du harcèlement

Il existe d'autres moyens, pour l'employeur, de prévenir le harcèlement au sein de l'entreprise (se reporter au dossier complet).

Obligation d'enquête et de protection

Lorsque l'employeur est informé de potentiels faits de harcèlement dans l'entreprise, il doit :

  • procéder sans délai à une enquête pour harcèlement avec le membre de la délégation du personnel du CSE ;
  • et prendre les dispositions nécessaires pour remédier à cette situation.

À noter : 👨‍⚖️ La Cour de cassation a cependant considéré qu'un employeur n'avait pas failli à son obligation de sécurité, nobstant le fait qu'il n'avait pas diligenté d'enquête interne, dans la mesure où il avait pris les mesures nécessaires de nature à préserver la santé et la sécurité du salarié victime (7).

Obligation de sanction

Tout salarié ayant procédé à des agissements de harcèlement moral est passible d'une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu'au licenciement.

➡ À lire sur ce point : Harcèlement moral : quelles sont les sanctions encourues ?

Si un salarié a commis des faits relevant harcèlement sexuel, l'employeur est tenu d'y mettre un terme et de sanctionner le salarié fautif.

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Références :

* Étude Ipsos - Baromètre sur le harcèlement au travail, édition septembre 2022
(1) Article L1152-1 du Code du travail 
(2) 16ème baromètre sur les disciminations dans l'emploi - 14 décembre 2023
(3) Article L1154-1 du Code du travail et Cass. Soc., 20 juin 2018, n°17-14305
(4) Cass. Soc., 13 septembre 2017, n°15-23045
(5) Cass. Soc., 19 avril 2023, n°21-21053 
(6) Article L2312-59 du Code du travail
(7) Cass. Soc., 12 juin 2024, n°23-13975