La loi n° 66-500 du 11 juillet 1966 portant réforme de l'adoption a institué deux formes d’adoption : l'adoption plénière et l'adoption simple.
Depuis l'entrée en vigueur de ce texte, tout adopté appartient obligatoirement à l'une de ces deux catégories même si l'adoption a été prononcée sous le régime antérieur : c'est ainsi que l'adoption antérieurement prononcée emporte les mêmes effets que l'adoption simple, alors que la légitimation adoptive emporte les mêmes effets que l'adoption plénière.
La différence entre ces deux types d'adoption s'établit avant tout en fonction du degré d'intégration dans la famille adoptante, les effets de la première étant plus étendus que ceux de la seconde, d'où des conditions plus strictes.
Le consentement à l'adoption implique que le parent qui le donne renonce à élever son enfant. En conséquence, n'est pas valable comme antinomique le consentement à l'adoption donné par la mère au profit de sa partenaire pacsée lorsqu'elle veut continuer à élever son enfant (Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 19 décembre 2007, 06-21.369).
Les parents doivent donner leur consentement devant un notaire français ou étranger, ou devant des agents diplomatiques ou consulaires français. La forme authentique du consentement est écartée quand les parents l'expriment en remettant l'enfant au service de l'Aide sociale à l'enfance (ASE) (Code civil, article 348-3). Parce que l'adoption est irrévocable, les adoptants ne peuvent pas consentir à l'adoption de l'enfant qu'ils ont préalablement adopté.
Le consentement donné à l'adoption des enfants de moins de deux ans n'est valable que si l'enfant a été préalablement et valablement remis au service de l'ASE ou à un OAA (Code civil, article 348-5). Cette disposition tend à protéger au maximum les enfants très jeunes contre toute forme de trafic en imposant un intermédiaire institutionnel. Cette exigence, malheureusement, ne s'applique qu'à l'adoption interne.
La réserve héréditaire est la part des biens et droits successoraux dont la loi assure la dévolution libre de charges à certains héritiers dits réservataires (Code civil, article 912). Cette réserve ne correspond dans aucune situation à la totalité des biens, de sorte qu'il subsiste toujours un excédent dont la personne peut disposer par des libéralités : cet excédent s'appelle la quotité disponible.
La réserve ne profite qu'aux héritiers les plus proches, appelés héritiers réservataires. Son taux dépend de la qualité et, s'agissant des descendants, de leur nombre. En l'absence d'héritiers réservataires, le défunt aura pu valablement disposer à titre gratuit de la totalité.
C'est à l'ouverture de la succession, c'est-à-dire au moment du décès, que doit être appréciée l'existence d'héritiers réservataires, et non au moment de la rédaction de la libéralité, ni même au moment du règlement ou du partage de la succession. Ainsi, un testament qui aura été virtuellement totalement efficace en l'absence d'héritier réservataire lors de sa rédaction verra son efficacité restreinte par suite de l'existence d'un héritier réservataire au moment du décès.
I. Adoption simple
A. Conditions relatives à l’adoptant
L’adoption simple est une adoption laissant subsister des liens juridiques entre l’enfant adopté et sa famille d’origine, tout en créant des liens de filiation entre l’adoptant et l’adopté.
Les adoptants doivent obtenir un agrément délivré par l’aide sociale à l’enfance du conseil général de leur domicile (CASF, art. L. 225-2 s.).
L’article 361 du Code civil renvoie à l’essentiel des dispositions relatives à l’adoption plénière.
L’adoption ne peut être demandée que par un couple marié ou une personne seule dans les mêmes conditions que l’adoption plénière (Code civil, articles 361, 343, 343-1 et 346, al. 1er). Toutefois, l’exigence d’un accueil depuis six mois au foyer de l’adoptant n’est pas requise. En cas d’adoption de l’enfant du conjoint, il suffit que l’adoptant ait dix ans de plus que l’adopté.
Les conditions relatives à l’enfant adopté de manière simple sont les mêmes que celles relatives à l’adopté faisant l’objet d’une adoption plénière ; il en va de même pour les modalités de consentement des parents ou du conseil de famille (Code civil, article 361 et 347 s). La seule différence tient à ce qu’il n’existe pas de condition d’âge relative à l’adopté. En effet, l’adoption simple est permise, quel que soit son âge (Code civil, article 360, al. 1er). Toutefois, lorsque l’adopté est âgé de plus de treize ans, il doit consentir personnellement à l’adoption (Code civil, articles 360, al. 4).
En revanche, le placement de l’enfant n’est pas nécessaire et l’adoption simple de l’enfant de son conjoint est toujours possible.
B. Consentement à l’adoption simple
Les parents par le sang doivent donner leur consentement à l’adoption, tout en gardant la possibilité de se rétracter dans un délai de deux mois (Code civil, articles 361, 348 et 348-3). Aucun consentement n’est requis lorsque l’enfant est majeur.
L’adopté qui est âgé de plus de 13 ans doit consentir personnellement à son adoption (C. civ., art. 345, al. 3) ; précision étant faite qu’il importe peu qu’il soit ou non émancipé, puisqu’aux termes de l’article 413-6 du Code civil il doit, pour être adopté, observer les mêmes règles que s’il n’était pas émancipé, c’est-à-dire obtenir le consentement de ses parents ou de son conseil de famille, ainsi que nous le verrons ci-après.
Si l’enfant, âgé de plus de 13 ans, est inapte à exprimer valablement son consentement, en raison d’une altération de ses facultés mentales, il a été jugé, dans le passé, qu’il y avait lieu, à la requête du procureur de la République, de nommer un administrateur ad hoc et de l’autoriser à donner au nom de l’enfant le consentement nécessaire.
Toutefois, il n’est pas certain que les juges admettent une telle nomination de nos jours. La Cour de cassation a en effet décidé que le consentement d’une personne protégée à sa propre adoption est un acte strictement personnel et ne peut être donné en ses lieu et place par son tuteur.
Cette jurisprudence a anticipé la mise en ½uvre de la loi n° 2007-308 du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs, entrée en vigueur, le 1er janvier 2009 ; depuis cette date, sont réputés strictement personnels plusieurs actes parmi lesquels figure le consentement donné à sa propre adoption ou à celle de son enfant (C. civ., art. 458, al. 2).
Néanmoins, dans une telle situation, sous réserve de l’appréciation qui sera faite à l’avenir par la jurisprudence, il est permis de penser que le tribunal de grande instance pourra ne pas tenir compte de l’absence de consentement et prononcer l’adoption, s’il constate que le mineur a réellement été dans l’impossibilité de s’exprimer et que cette adoption est conforme à son intérêt.
Attention : Il ne faut pas perdre de vue que le mineur capable de discernement doit être entendu par le tribunal ou, lorsque son intérêt le commande, par la personne désignée par le tribunal à cet effet. Il doit être entendu selon des modalités adaptées à son âge et à son degré de maturité. Lorsque le mineur refuse d’être entendu, le juge apprécie le bien-fondé de ce refus. Le mineur peut être entendu seul ou avec un avocat ou une personne de son choix. Si ce choix n’apparaît pas conforme à l’intérêt du mineur, le juge peut procéder à la désignation d’une autre personne.
II. Les droits successoraux de l’adopté simple
La succession en cas d’adoption simple
L’adopté simple acquiert des droits successoraux dans sa famille adoptive, sans avoir, toutefois, la qualité d’héritier réservataire à l’égard des ascendants de l’adoptant (Code civil, article 368). Si l’adopté décède sans descendants ou conjoint survivant, sa famille adoptive et sa famille par le sang vont se partager par moitié la succession, une fois les biens reçus par elles repris (Code civil, article 368-1).
L’adopté simple supporte normalement des droits de mutation à taux plein (60 %), sauf exception : notamment lorsque l’adopté est mineur au moment du décès de l’adoptant ou lorsque l’adopté majeur au moment du décès de l’adoptant a, soit dans sa minorité et pendant cinq ans au moins, soit dans sa minorité et sa majorité et pendant dix ans au moins, reçu de l’adoptant des secours et des soins non interrompus au titre d’une prise en charge continue et principale.
À l’instar de l’adopté plénier et en tant qu’héritier réservataire, il peut exercer toute contestation liée à l’atteinte de sa réserve héréditaire par l’action en réduction. C’est une action spéciale par laquelle un héritier réservataire peut obtenir des bénéficiaires de libéralités consenties par le de cujus au-delà de la quotité disponible la restitution de la part excédentaire de ces libéralités afin de rétablir la réserve héréditaire qui a été entamée.
Succession de l’enfant adoptif
La succession d’un enfant adopté par voie d’adoption plénière est réglée dans les conditions de droit commun.
Celle de l’enfant ayant fait l’objet d’une adoption simple obéit à des règles dérogatoires, car elle reste marquée par l’idée qu’il est entré dans la famille adoptive sans rompre pour autant les liens qui le rattachent à sa famille par le sang. C’est pourquoi, si l’enfant adopté par voie d’adoption simple décède en ne laissant ni descendant ni conjoint survivant, la loi organise une succession anomale (C. civ. art. 368-1) : certains biens sont l’objet d’un droit de retour ; le reliquat des biens de l’adopté se répartit par moitié entre sa famille d’origine et celle de l’adoptant, selon le mécanisme de la fente successorale.
Conditions du droit de retour en cas d’adoption simple
Sont concernés par le droit de retour les biens que l’adopté a reçus par donation ou succession testamentaire ou légale, d’un côté, de ses père et mère adoptifs, de l’autre, de ses père et mère biologiques. Il faut encore que ces biens se retrouvent en nature dans sa succession.
Le droit de retour n’existe qu’en l’absence de descendant de l’adopté. Cette condition doit être interprétée comme visant l’absence de descendant acceptant la succession.
Enfin, la condition qui a trait à l’absence de conjoint survivant, rajoutée par la loi du 23 juin 2006, traduit la priorité désormais accordée à la maintenance du conjoint survivant sur la conservation des biens dans la famille dont ils proviennent.
En présence d’un conjoint survivant, il semble bien que sa vocation ab intestat doive être liquidée après le jeu de la fente prévue par l’article 368-1 du Code civil, c’est-à-dire de façon distributive dans chacune des deux parentés, adoptive et biologique. En effet, toute autre solution aboutirait à un résultat paradoxal en minorant artificiellement la vocation du conjoint.
Par exemple, si le de cujus décède à la survivance de sa mère par le sang et de sa mère adoptive en concours avec son conjoint survivant, sans laisser de biens objets du droit de retour légal, deux solutions sont dans l’absolu envisageables :
- ou bien on considère que les ascendants viennent pour 1/4 chacun, et le conjoint pour 1/2 ;
- ou bien l’on pratique d’abord la fente, et chacun des ascendants vient, l’un dans la famille par le sang, l’autre dans la famille adoptive, pour 1/4 soit 1/8e de la succession et donc 1/4 au total ; et le conjoint a vocation aux 3/4 restants.
C’est cette seconde solution qui semble préférable, pour deux raisons : l’esprit de la loi, qui est de promouvoir le conjoint, ce qui explique que l’article 368-1 ait été complété ; la logique intrinsèque de la fente, qui organise une dévolution reposant sur une division préalable de la succession en deux fractions égales.
Exécution du droit de retour
Les biens qui sont l’objet du droit de retour sont dévolus en fonction de leur origine : ils font l’objet d’un droit de retour au profit des ascendants privilégiés (ou, à défaut, de leurs propres descendants) de la famille, soit adoptive, soit par le sang, dont ils proviennent.
Ce retour intervient sous réserve des droits acquis dans l’intervalle par les tiers ; compte tenu de ce qu’il présente un caractère successoral, il emporte la charge de contribuer aux dettes dans la proportion des actifs recueillis (C. civ. art. 368-1).
Si le retour de l’article 368-1 du Code civil est impossible, par exemple parce que le bien a été vendu, donné ou légué, voire détruit, il reste à se demander si le droit de retour légal de droit commun prévu en faveur des père et mère du défunt par l’article 738-2 du Code civil ne prend pas alors le relais, mais en valeur, dans les conditions de droit commun. La question n’est pas tranchée en jurisprudence : tout dépend si l’on admet que la succession anomale évince au préalable la succession ordinaire ou pas.
Sources :
Dossier très complet et informatif