Comment saisir le conseil de prud'hommes (CPH) en respectant les délais de prescription de principe applicables en droit du travail ?
L'action portant sur l'exécution du contrat de travail
Lorsque l'action porte sur un litige né de l'exécution du contrat de travail, le salarié dispose d'un délai de 2 ans pour agir contre son employeur (1).
2 ansPour agir en cas de litige relatif à l'exécution du contrat
Ce délai court à compter du jour où le salarié a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit.
Exemple : si votre employeur ne respecte pas vos jours ou périodes de repos quotidien et/ou hebdomadaire, vous devez saisir le CPH dans un délai de 2 ans à compter du moment où vous avez eu connaissance (ou alors, ou vous auriez dû avoir connaissance) du problème.
L'action portant sur la rupture du contrat de travail (licenciement, rupture conventionnelle, etc.)
En revanche, lorsque l'action en justice porte sur un litige relatif à la rupture du contrat de travail, elle se prescrit par 12 mois (1).
12 mois pour agirEn cas de litige relatif à la rupture du contrat de travail
Ce délai court à compter du jour de la notification de la rupture qui constitue le point de départ de la contestation.
Exemple : une action devant le CPH doit être engagée sous 12 mois lorsque l'employeur a licencié le salarié sans respecter la procédure de licenciement en vigueur.
Procédure devant le CPH : focus sur les délais de prescription exceptionnels
L'action portant sur le paiement du salaire
3 anspour recouvrer les salaires dus
En matière prud'homale, le salarié qui souhaite obtenir le paiement de sa rémunération doit saisir le CPH dans un délai de 3 ans à compter du jour où il a eu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer (3).
Exemple : le salarié qui souhaite obtenir le paiement de son salaire, d'une contrepartie financière à la clause de non-concurrence, d'une prime ou des heures supplémentaires effectuées doit engager une action devant le CPH dans un délai de 3 ans à compter du jour où il a connaissance du problème.
L'action portant sur la réparation d'un dommage corporel
Un salarié victime d'un dommage corporel subi à l'occasion de l'exécution du travail dispose d'un délai de 10 ans pour saisir le Conseil de Prud'hommes compétent afin d'obtenir réparation (5).
10 anspour demander réparation d'un dommage corporel
Le délai de prescription de cette action en responsabilité court à compter de la date de la consolidation du dommage initial ou aggravé.
NB : on parle de "consolidation" lorsque les lésions corporelles n'évoluent plus et ont désormais un caractère permanent.
L'action portant sur des faits de harcèlement ou de discrimination
Lorsqu'un salarié est victime de harcèlement moral au travail ou de harcèlement sexuel, il peut engager une action devant le CPH dans un délai de 5 ans à compter du jour où le salarié a eu ou aurait dû avoir connaissance des faits à l'origine de son action (6).
NB : ce délai commence à courir à compter du dernier acte pouvant être constitutif d'un harcèlement (7).
5 anspour demander réparation d'une discrimination
Le même délai de 5 ans s'applique lorsque le recours du salarié est motivé par des faits de discrimination à son égard. Le délai court à compter de la révélation de la discrimination (8).
🔍 Si vous souhaitez prendre un avocat pour vous conseiller dans la procédure, mais que vous ne disposez pas de ressources financières suffisantes, l'aide juridictionnelle peut vous être octroyée sous conditions.
Les actions relatives à l'existence ou à la mise en œuvre d'une clause de non-concurrence
Il peut arriver que votre contrat de travail prévoie une clause de non-concurrence, destinée à vous empêcher, une fois le contrat de travail rompu et pour un certain temps dans une certaine zone géographique, d'exercer une activité concurrente à celle de votre ex-employeur.
Différents litiges peuvent naître en rapport avec l'existence même ou la mise en œuvre d'une telle clause.
À ce sujet, la Cour de cassation a récemment apporté plusieurs précisions sur le point de départ des délais de prescription applicables (9).
On peut schématiser les termes de sa décision de la manière suivante :
Nature de l'action |
Délai de prescription applicable |
Point de départ du délai de prescription |
Action en responsabilité civile pour nullité de la clause de non-concurrence |
2 ans | Jour de la mise en œuvre de la clause de non-concurrence |
Action en paiement de l'indemnité de non-concurrence |
Pour découvrir le détail de notre tableau, téléchargez notre dossier dédié aux clauses du contrat de travail ! | |
Action en dommages et intérêts pour non-application de la clause de non-concurrence |
Que se passe-t-il si l'employeur, défendeur à l'action, ne se présente pas devant le CPH ? Le juge peut-il décider de juger l'affaire, malgré tout ?
Oui.
Lors de l'audience de conciliation devant le bureau de conciliation et d'orientation (BCO), si l'employeur ne se présente pas sans avoir justifié d'un motif légitime, le bureau peut juger l'affaire en l'état des pièces communiquées de manière contradictoire par la partie présente (10).
Il en est de même lors de l'audience devant le bureau de jugement. Si le défendeur (la partie contre laquelle le litige est porté) ne justifie pas d'un motif légitime pour ne pas comparaître le jour de l'audience, il est statué sur le fond (11).
Combien de temps devez-vous patienter, après avoir défendu votre dossier, pour recevoir un jugement de la part du CPH ?
Les délais de traitement varient selon les CPH concernés.
💡 En 2023, la procédure devant le CPH, prise dans son intégralité, avoisinait les 16 mois.
Il ne s'agit toutefois là que d'une tendance : tout dépend du secteur géographique et du taux d'engorgement du CPH concerné.
Faire appel du jugement du CPH : le point sur la procédure devant la Cour d'appel (avocat, délais, etc.)
1 moisDélai d'appel d'une décision CPH
Le délai d'appel d'un jugement CPH est d'1 mois (14). Ce délai court à partir de la notification du jugement par le greffe du tribunal, généralement par lettre recommandée avec avis de réception à votre domicile (15).
Il est à noter que devant la Cour d'appel, la représentation par avocat est obligatoire (16).
Références :
(1) Article L1471-1 du Code du travail
(2) Articles L1237-14 (rupture conventionnelle) et L1235-7 (licenciement économique) du Code du travail
(3) Article L3245-1 du Code du travail
(4) Article L1234-20 du Code du travail
(5) Articles L1471-1 du Code du travail et 2226 du Code civil
(6) Articles L1471-1 du Code du travail et 2224 du Code civil
(7) Cass. Soc. 9 juin 2021, n°19-21931
(8) Article L1134-5 du Code du travail
(9) Cass. Soc. 2 octobre 2024, n°23-12844
(10) Article L1454-1-3 du Code du travail
(11) Article R1454-20 du Code du travail
(12) Article L1411-1 du Code du travail
(13) Article R1454-18 du Code du travail
(14) Article R1461-1 du Code du travail
(15) Article R1454-26 du Code du travail
(16) Article R1461-2 du Code du travail
Dossier complet répondant à mes questions