L’affaire ne concerne cette fois-ci non pas un réseau de franchise mais de concession à travers lequel, un concessionnaire, moyennant le paiement d’une redevance et le bénéfice d’une exclusivité territoriale, bénéfice d’un droit de s’approvisionner auprès d’un concédant.
En substance, dans le cadre de la présente affaire, un contrat de concession a été signé le 26 janvier 2011 entre le concédant Schmidt et un concessionnaire.
Aussi, postérieurement à la conclusion de ce contrat, le concessionnaire a rapidement été placé en liquidation judiciaire, laquelle a débouché sur une clôture pour insuffisance d’actif.
C’est donc confronté à la faillite de son exploitation que le gérant de la société concessionnaire a assigné le concédant aux fins d’obtenir réparation de son préjudice personnel.
La cour d’appel de Paris à fait droit à ses demandes en lui accordant 51.000 euros de réparation. C’est la raison pour laquelle le concédant s’est pourvu en cassation arguant d’une part de l’irrecevabilité de la demande du gérant, en considération du fait que la société concessionnaire liquidée n’avait pas été mise en cause. Et d’autre part qu’aucun manquement à l’obligation d’information n’était caractérisé.
Le concédant est débouté de ses demandes. Tant sur le fondement de l’irrecevabilité de la demande (A) qu’en ce qui concerne la validité du contrat de concession (B).
I. Le rejet de l’argument relatif à l’irrecevabilité de l’action
La haute juridiction considère tout d’abord que le concédant n’est pas fondé en sa demande, ce au motif qu’« Une partie n'a pas qualité pour opposer à une demande formée contre elle une fin de non-recevoir tirée de la méconnaissance prétendue des droits d'un tiers à l'instance. 8. Il s'ensuit que la société Schmidt n'est pas recevable à invoquer une prétendue méconnaissance, par M. [K], du principe de la contradiction au détriment de la société Sophil concept ». Dit autrement, le concédant ne peut donc pas se prévaloir d’une irrecevabilité de l’action dans l’intérêt d’un tiers.
Dès lors, il ne revient pas au concédant, en ce qu’il est parti à l’action, de soulever l’irrecevabilité de l’action en lieu et place de la société concessionnaire. Partant, l’argument tenant à une hypothétique violation du principe du contradictoire est également battu en brèche.
II. Le rejet de l’argument relatif à la validité des informations transmises au concédant
L’autre enseignement de cet arrêt concerne la sanction du concédant, condamné à payer des dommages et intérêts à l’ancien gérant de la société concessionnaire liquidée en considération du DIP erroné qui a été transmis.
→ En effet, il s’évince que lors de la conclusion du contrat de concession, le concédant a transmis des informations relatives à l’étude du marché, et des prévisionnels qui se sont par la suite avérés erronés.
Assurément, s’il est de principe que seule incombe au concédant, la transmission d’informations relatives à l’état du marché local, il n’en reste pas moins que lorsque ce dernier transmet des informations supplémentaires, allant au-delà de ce que prescrit l’article L 330-3 du Code du commerce – étude du marché local, prévisionnelles -, sa responsabilité peut être engagée si d’aventure ces informations s’avèrent erronées.
Le parallèle peut être fait avec la solution déjà classique qui a été dégagée en franchise en ce qui concerne le contentieux relatif à la transmission de prévisionnels et de la censure de l’erreur sur la rentabilité de l’exploitation (Com. 4 oct. 2011, no 10-20.956 ; Com. 12 juin 2012, n° 11-19.047, Com, 10 juin 2020, n° 18-21.536).
Dans le cadre de la présente espèce, bien que la question de l’erreur sur la rentabilité ne soit pas abordée compte tenu de la liquidation judiciaire du concessionnaire, il n’en reste pas moins que le concédant est quand même sanctionné sur le fondement délictuel en considération des informations équivoques transmises au concessionnaire sur l’étude du marché local.
Dès lors, la Cour de cassation balaie d’un revers de main l’argument brandi par le concédant qui consistait à mettre à la charge du concessionnaire et de son dirigeant, une obligation de s’informer ou de se renseigner par leurs propres soins.
Elle relève tour à tour que « le compte prévisionnel réalisé par l'expert-comptable mandaté par M. [K], faisant apparaître que le chiffre d'affaires de 1 200 000 HT euros était atteignable », qu’une « étude géo-marketing » avait été transmise par le concédant au concessionnaire, ou encore que le concessionnaire a « validé des prévisions de chiffre d'affaires exagérément optimistes et que les prévisions annoncées par celui-ci manquaient de fondement objectif, de rigueur et s'appuyaient sur des hypothèses absconses ». Si bien qu’il ne faisait pas l’ombre d’un doute que le concédant avait transmis « des éléments d'étude du marché local qui présentaient un caractère irréaliste et dénué de sérieux », ce qui justifiait l’engagement de sa responsabilité.
En somme, lorsque le concédant transmet des informations résolument peu sincères, voire exagérément optimistes, sa responsabilité peut être doublement engagée aussi sur le plan contractuel par la société concessionnaire, tout comme sur le plan délictuel par l’intermédiaire de dirigeant personne physique de la société concessionnaire ayant subi un préjudice.
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