Définition : qu'est-ce que le 49-3 ?
L'article 49-3, en réalité "49 alinéa 3" pour être exact, permet au Premier Ministre d'engager la responsabilité du Gouvernement, devant l'Assemblée nationale, pour faire adopter un projet de loi sans procéder au vote de l'Assemblée (1).
Pour rappel : dans le processus habituel, le projet de loi doit être adopté, dans les mêmes termes, par l'Assemblée nationale et par le Sénat (Assemblée nationale + Sénat = le Parlement). Dans le cadre de l'article 49 al.3, le projet est adopté sans passer par le vote de l'Assemblée.
Pour ne pas que le texte soit adopté, il existe tout de même une solution : la motion de censure (2).
24 heuresPour déposer une motion de censure
Quelle est la conséquence d'une motion de censure ?
Le projet de loi ne sera pas adopté si, dans les 24 heures suivant la déclaration du 1er ministre devant l'Assemblée, une motion de censure est déposée. Cette motion doit être signée par au moins 1/10ème des membres de l'assemblée nationale (= 1/10ème des députés).
Elle doit ensuite être votée par la majorité absolue des députés pour être adoptée et pour qu'ainsi, le projet ne soit pas adopté.
Article 49 alinéa 3 : Elisabeth Borne annonce son utilisation pour faire voter la loi de programmation des finances publiques.
La LPFP doit définir la ligne budgétaire du gouvernement jusqu'à la fin du quinquennat. Elle prévoit de réduire le déficit public de 4,8% du produit intérieur brut (PIB) en 2022 à 2,7% en 2027 (l'objectif européen étant de 3%). Selon l'exécutif, le rejet du texte menacerait le versement par l'Union européenne à la France de 17,8 milliards d'euros sur la période 2023-2024.
Dèrnière utilisation : la réforme des retraites 2023
- 10 janvier 2023 : Elisabeth Borne présentait en conférence de presse, le Projet du Gouvernement pour l'avenir de notre système de retraite. Quelques jours plus tard, le 19 janvier, se tenait une première journée de mobilisation contre la réforme des retraites. Plusieurs journées de grève se sont déroulées depuis, la dernière en date, celle du 15 mars 2023.µ
- 23 janvier 2023 : le Projet de réforme des retraites était présenté en Conseil des ministres.
- 17 février 2023 : les débats à l'Assemblée nationale sur le Projet de loi de financement rectificative de la Sécurité sociale portant la réforme des retraites s'étaient achevés sans vote. L'article 7 qui prévoit le report de l'âge légal de départ à la retraite de 62 à 64 ans n'avait pas pu être étudié, Olivier Dussopt, ayant mis un terme aux discussions, conformément à l'article 47, alinéa 1 de la Constitution. Si l'Assemblée nationale ne s'est pas prononcée en première lecture dans le délai de 20 jours après le dépôt d'un projet, le Gouvernement peut limiter les débats. Il saisit alors le Sénat qui doit statuer dans un délai de 15 jours (3).
- 28 février 2023 : C'était au tour du Sénat d'examiner le texte portant sur la réforme des retraites et ce donc, dans un délai de 15 jours.
- 11 mars 2023 : Les sénateurs avaient jusqu'au 12 mars à minuit pour examiner le texte, ils l'ont finalement adopté le 11 mars, avec quelques heures d'avance. Olivier Dussopt avait en effet annoncé la mise en oeuvre de l'article 44, alinéa 3 de la Constitution, dit aussi "vote bloqué" alors qu'il restait des milliers d'amendements à examiner (4). Moins célèbre que l'article 49.3, l'article 44.3 permet à une assemblée, à la demande de l'exécutif, de se prononcer par un seul vote sur tout ou partie d'un texte en discussion en ne retenant que les amendements proposés ou acceptés par le Gouvernement. Indirectement, il permet ainsi d'accélérer les débats et le vote d'un texte.
- 15 mars 2023 : La Commission mixte paritaire, composée de députés et de sénateurs, est parvenue à un accord commun sur le Projet de réforme des retraites. Cet accord a ouvert la voie à un vote définitif ce jeudi 16 mars au Sénat et à l'Assemblée nationale.
- 16 mars 2023 : Le Gouvernement a décidé de recourir à l'article 49.3 de la Constitution pour faire adopter le texte sur la réforme des retraites.
Concernant la loi de programmation des finances publiques que va-t-il se passer ? Qui peut renverser le gouvernement ?
Si une motion est votée, le texte n'est pas adopté et le gouvernement doit démissionner (il est renversé).
D'ailleurs, 1 motion de censure (La NUPES) a déjà été annoncée pour tenter de renverser le Gouvernement qui a annoncé, ce mercredi 28 septembre 2023, l'utilisation du 49.3 pour faire vote la loi de programmation des finances publiques
Si les motions ne sont pas adoptées, le texte sera considéré comme adopté par l'Assemblée nationale et sera alors transmis au Sénat. Si le Sénat vote le projet dans les mêmes termes, le projet sera adopté.
Combien de fois a été utilisé le 49-3 de la Constitution ? Combien de fois peut-on utiliser le 49-3 ? Exemples de recours au 49.3 en France
60 recours au 49.3 depuis 1958
Depuis la promulgation de la Constitution le 4 octobre 1958, l'article 49 alinéa 3, a été utilisé 59 fois. Il s'agit, avec la loi de programmation des finances publiques, du 60ème recours.
Précédemment, c'est celui de Edouard Philippe, le 03 mars 2020, pour l'adoption du projet de la réforme des retraites (finalement abandonné suite à la crise sanitaire).
En 2006, Dominique de Villepin utilise le 49.3 pour faire adopter le projet de loi pour l'égalité des chances incluant le CPE (Contrat Première Embauche). Mais suite à la forte contestation sociale, le CPE est finalement retiré.
En 2022, le gouvernement d'Elisabeth Borne a eu recours à plusieurs reprises au 49.3 pour faire adopter le budget pour 2023, le budget de la Sécurité sociale pour 2023 ou encore la réforme des retraites.
De nombreux autres recours ont eu lieu et une seule motion a abouti au renversement du Gouvernement : celle sous le Gouvernement Pompidou en 1962.
Références :
(1) Article 49 alinéa 3 de la Constitution du 4 octobre 1958
(2) Article 49 alinéa 2 de la Constitution du 4 octobre 1958
(3) Article 47 alinéa 1 de la Constitution du 4 octobre 1958
(4) Article 44 alinéa 3 de la Constitution du 4 octobre 1958
Dossier très complet et informatif