Est-ce que les salariés grévistes sont payés en France ? Par principe, non
Définition de la grève
Selon la Cour de cassation, la grève se définit comme une cessation collective totale et concertée du travail, en vue d'appuyer des revendications professionnelles (1).
Exercice du droit de grève : le principe de la retenue sur salaire
💡 Lorsque vous faites grève, votre contrat de travail est suspendu : de fait, en principe, le paiement de votre salaire l'est également.
La retenue sur salaire effectuée par votre employeur doit néanmoins être proportionnelle à la durée pendant laquelle vous cessez de travailler pour faire grève (2).
Concrètement, cela signifie que :
- votre employeur a le droit de ne pas vous payer vos jours de grève effectués ;
- néanmoins, le travail accompli normalement avant et après la période durant laquelle vous avez participé à la grève, doit cependant vous être rémunéré comme prévu (3).
Toute retenue effectuée au-delà de cette limite constitue une sanction pécuniaire interdite.
Modalités de calcul de la retenue sur salaire en cas participation à un mouvement de grève
La durée de la cessation de travail (nombre d'heures pendant lesquelles vous avez manqué le travail en faisant grève) doit être calculée par rapport à la durée de travail qui aurait dû être effectuée sur le mois (horaire mensuel) (4).
En pratique, il convient donc de déduire le salaire correspondant à l'exercice du droit de grève du salaire que vous auriez dû toucher sur le mois.
🔍 Exemple :
Marc travaille 35 heures par semaine du lundi au vendredi, à raison de 7 heures par jour. Son salaire mensuel est de 2.500 euros pour 151,67 heures (salaire mensualisé : (35 X 52)/12)).
Marc fait grève 7 jours en juin (soit 49 heures). En juin, il y a 22 jours de travail effectif soit une durée effective de travail de 154 heures.
La retenue pratiquée sur le salaire de Marc sera de 795,45 euros soit 2.500 X (49/154).
Cas exceptionnels dans lesquels la rémunération des salariés grévistes est maintenue (service minimum, défense de droits essentiels, etc.)
Dans certains cas exceptionnels, l'employeur doit cependant maintenir la rémunération du salarié gréviste :
- lorsque la grève a pour origine un manquement grave et délibéré de l'employeur à ses obligations (non-paiement des heures supplémentaires, non-application d'une convention collective, etc.). Dans ce cas, l'employeur doit verser, aux salariés grévistes, une indemnité compensant la perte de leur salaire (5) ;
- lorsque vous assurez un service minimum (que vous travaillez) à la demande de votre employeur ou en application d'un accord d'entreprise, alors que vous êtes en grève (6) ;
- lorsqu'un accord de fin de grève (accord de fin de conflit) prévoit le maintien de tout ou partie du salaire.
Le salarié qui décide de ne pas faire grève (non-gréviste) est-il payé ?
Oui : en toute logique, un salarié qui décide de ne pas participer au mouvement de grève (et donc, qui travaille), sera payé normalement. L'employeur doit d'ailleurs obligatoirement lui fournir du travail.
En revanche, si l'employeur peut prouver son impossibilité de fournir du travail au salarié non-gréviste, en raison d'un blocage total de l'entreprise par exemple (piquet de grève, occupation de l'entreprise...), et s'il peut prouver qu'il a tenté d'arrêter le mouvement de blocage (action ordonnant l'expulsion des membres du piquet de grève, etc.), il est possible que le salarié non-gréviste ne soit pas payé.
Revendications professionnelles et préavis : doit-on obligatoirement prévenir son employeur quand on fait grève ?
Non : dans le secteur privé, le droit de grève n'est pas soumis à un préavis, c'est-à-dire à un délai de prévenance.
Les salariés peuvent donc démarrer le mouvement à tout moment, et ce, sans que cela entache la légalité de la grève.
🔍 Néanmoins, il faut relever qu'il est obligatoire que l'employeur soit informé, au moment où la grève débute, des revendications professionnelles des salariés à l'origine de la cessation collective et concertée du travail (7).
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Références :
(1) Cass. Soc. 16 mai 1989, n°85-43359
(2) Cass. Soc. 10 juillet 1991, n°89-43147
(3) Cass. Soc. 16 mai 1989, n°86-43399
(4) Cass. Soc. 3 mars 2009, n°07-44794
(5) Cass. Soc. 3 mai 2007, n°05-44776 et Cass. Soc. 4 déc. 2007, n°06-42463
(6) Cass. Soc. 20 févr. 1991, n°89-40280
(7) Cass. Soc. 19 novembre 1996, n°94-42631
Dossier très complet et informatif